lundi 1 novembre 2010

Fernand Brunner



Fernand Brunner (1920 - 1 novembre 1991) est un philosophe suisse, qui après des études à Lausanne et à Paris, a été professeur à l'université de Neuchâtel.
Il a uni de manière intime la réflexion philosophique à la pratique de l'histoire de la philosophie. Il s'est intéressé à la philosophie antique, au Moyen Âge, à l'époque moderne, mais aussi aux philosophies traditionnelles arabes et juives, ainsi qu'à la pensée indienne, pratiquant beaucoup la comparaison entre philosophes et traditions. Dans la tradition occidentale, son attention s'est portée particulièrement sur la tradition platonicienne et néo-platonicienne, sur Maître Eckhart, Ibn Gabirol et Leibniz.
Il défend une idée de la philosophie comme liée à la sagesse, et de l'histoire de la philosophie comme une discipline étroitement liée à la philosophie elle-même. Dans son ouvrage Science et réalité, il fait une critique des fondements de la science moderne, à laquelle il oppose la philosophie. C'est dans le même esprit qu'il a rédigé une introduction à la philosophie à travers son histoire, qui vise moins à mettre le lecteur au courant de cette histoire (ce qu'elle fait aussi) qu'à l'introduire à la pensée philosophique et à ses questions.
Source du texte : Wikipedia



OUVRAGES : 
- Etudes sur la signification historique de la philosophie de Leibniz, Vrin, Paris, 1950.
- Ibn Gabirol (Avicebron) - La source de vie, livre 3, de la démonstration des substances simples, trad. et notes par Fernand Brunner. Ed. Vrin, 1950.
- Science et réalité, Aubier, Paris, 1954.
- Platonisme et aristotélisme, La critique d’Ibn Gabirol par saint Thomas d’Aquin. Publications Universitaires de Louvain, Béatrice-Nauwelaerts, 1965.
- Maître Eckhart. Ed. Seghers, 1969, (coll. Philosophes de tous les temps, n°59).
- Métaphysique, histoire de la philosophie : recueil d'étude offert à Fernand Brunner. Ed. La Baconnière, 1981.
- Maître Eckhart - le commentaire de la Genèse, précédé des Prologues, trad. du latin et notes de Fernand Brunner. Ed. du Cerf, 1984.
- Proclus et son influence : actes du colloque de Neuchâtel, juin 1985. Ed. Grand Midi, 1987.
- Le dépassement de soi dans la pensée philosophique : acte du colloque des 19 et 20 octobre pour les septante ans de Fernand Brunner. Ed. La Baconnière, 1994.
Recueil des comptes rendus d'ouvrages philosophies 1949-1992, Université de Neuchâtel, 1994.
- Métaphysique d'Ibn Gabirol et de la tradition platonicienne (recueil d'articles), Ashgate, 1997.
- Maître Eckhart, approche de l'oeuvre. Ed. Ad Solem, 1999.
- Introduction à la philosophie (notes de cours). Éditions du Grand Midi, Zurich, 1995. 
- Maître Eckhart - Sermons et leçons sur l'Ecclésiastique, trad. du latin et commentaires par Fernand Brunner. Ed. Ad Solem, 2002.
- Etudes sur Maître Eckhart, (recueil d'articles), Ed. Hermann, 2012. 
ARTICLES :
(i) Regroupés dans le recueil intitulé Métaphysique d'Ibn Gabirol et de la tradition platonicienne : 
- Sur le Fons Vitae d'Avicembron.
- Sur l'hylémorphisme d'Ibn Gabirol.
- La transformation des notions de matière et de forme d'Aristote à Ibn Gabirol.
- La doctrine de la matière chez Avicembron.
- Etudes sur le sens et la structure des systèmes réalistes : Ibn Gabirol, l'école de Chartres.
- Réflexions sur le réalisme de l'idée à propos d'Ibn Gabirol.
- Maître Eckhart et Avicembron.
- Le conflit des tendances platoniciennes et aristotéliciennes au moyen âge.
- Creatio numerorum, rerum est creatio
- Deus forma essendi
- Le néoplatonisme au moyen âge.
- Création et émanation. Fragment de philosophie comparée. 
- Création et émanation. (Inédit).
- Les métaphores de l'émanation sont-elles ornementales ou nécessaires ?
- Qu'est-ce que l'idée platonicienne ?
- L'ontologie de Platon.
- Un imbroglio herméneutique. A propos d'un livre récent concernant la critique de Platon par Heidegger.
- L'idée de kairos chez Proclus.
- De l'action humaine selon Proclus.
- Théorie et pratique dans l'évolution de la pensée occidental.
- La notion de philosophie en Orient et en Occident.
- Philosophie et religion ou l’ambiguïté de la philosophie.
(ii) Regroupés dans le recueil intitulé Etudes sur Maître Eckhart : 
- Maître Eckhart philosophe (1968)
- L'analogie chez Maître Eckhart (1969)
- Foi et raison chez Maître Eckhart (1977)
- Le mysticisme de Maître Eckhart : Etude comparative (1980)
- Compatibilité chez Maître Eckhart de la thèse esse est deus et de l'affirmation de l'esse rerum (1984)
- La structure de l'Opus propositionum de Maître Eckhart (1985)
- Maître Eckhart et la mystique allemande (1990)
- Peut-on dépasser l'espace et le temps ? (1988)
- Le dépassement de l'espace et du temps chez Maître Eckhart (1988)
- Mysticisme et rationalité chez Maître Eckhart (1991)
- Eckhart ou le goût des positions extrêmes (1994)
(iii) Sur la philosophie indienne :
"Une comparaison entre Proclus et l'advaita vedanta", Studia philosophica, 35 (1975), p.32-57.
"Une théorie de la perception dans l'advaita vedanta et quelques comparaisons avec la philosophie occidentale", Revue de Théologie et de Philosophie, 3, série 25 (1975), p. 252-274.
"Une comparaison entre le néoplatonisme et le viçishtâdvaita", Néoplatonisme, Mélanges offerts à Jean Trouillard, Fontenay-aux-Roses, 1981, p. 103-124.
"L'inférence selon la Vedantaparibhasha", Etudes asiatiques, 49 (1987), p. 92-119.
(...)
Pour une bibliographie exhaustive (jusqu'en 1992), voir la fin de l'ouvrage intitulé Le dépassement de soi dans la pensée philosophique, actes du colloque des 19 et 20 octobre pour les septante ans de Fernand Brunner. Ed. La Baconnière, 1994.






SCIENCE ET REALITE (1950 - ouvrage épuisé). 
L'auteur part de la critique de l'objectivité scientifique, qui ne s'inquiète pas de la totalité de l'objet, pour lui opposer une science véritable qui, elle, sera fondée sur la métaphysique ou connaissance de Dieu, dépassant la subjectivité de la conscience individuelle. La connaissance de Dieu est dite nécessaire (ch. 10), pour éviter qu'en admettant son existence on s'occupe d'autre chose et possible (ch.11) pour stimuler l'attention de ceux qui se tournent vers un autre objet. Mais ce n'est pas une connaissance humaine finie, pour elle Dieu reste inconnaissable (ch.12). C'est seulement à partir de là qu'une science authentique est envisageable. 

"La conclusion de cet ouvrage indique comment cette connaissance transcendante descend dans les différents degrés de la pensée et de l'être pour assumer finalement les formes de la perceptions sensibles et de la vie pratique et constituer ainsi la connaissance véritable du monde". 

Un premier livre d'inspiration guénonienne, paru trois ans après la mort de l'auteur de "Critique du monde moderne", écrit dans la même veine que celui-ci, tout en proposant une rénovation de la science. 

EXTRAITS (ch.11 - La possibilité de la connaissance de Dieu) : 

La connaissance imparfaite de Dieu suppose une certaine intuition de Dieu qui est imparfaite mais qui peut nécessairement devenir parfaite puisqu'elle est une intuition de Dieu. La connaissance que nous avons de Dieu, si imparfaite qu'elle soit, ne laisse pas d'être en son fond une connaissance de Dieu en lui-même, sinon il n'y aurait pas de connaissance du tout. (...)

La plupart observe l'expérience qu'ils font de la pensée plutôt que l'essence de la pensée; ils suivent leurs pensées et oublient de rechercher la pensée. Au lieu de rendre la pensée à elle-même, ils l'attachent à des intérêts limités et la laissent dans l'ignorance d'elle-même. La pensée s'applique par leur faute à des objets où elle ne peut se reconnaître, alors que tournée vers Dieu elle trouve en lui sa plénitude et son identité. La pensée est un mystère aussi grand que Dieu même puisque celui qui cherche à la saisir la voit s'élever au-dessus de lui et voit le monde s'effacer en elle comme dans sa cause. La pensée en son essence est dans un autre monde que le nôtre; rien ne l'enferme alors qu'elle enferme tout; elle se confond avec la transcendance divine. Dieu qui se fait connaitre à nous par la pensée se connait lui-même en elle. C'est parce que la connaissance existe que la connaissance de Dieu est possible. La connaissance et Dieu nous sont donnés conjointement. (..)


La conscience n'aurait pas le pouvoir de poser le problème de son essence si elle n'avait pas celui de la résoudre; la présence de ce problème en elle est un souvenir de Dieu et l'invitation à rendre à cette pensée sa clarté première. La conscience est donc capable de sortir des limites où elle s'enferme momentanément, de se ressaisir en elle-même, au delà des formes qu'elle peut prendre en l'homme, pour se découvrir en sa source. (...)
Nous sommes pour nous-même comme une réalité le long de laquelle nous pouvons nous déplacer. La tâche de la pensée est de se mettre en présence de Dieu seul afin de découvrir l'axe qui relie son être à l'être de l'homme et du monde.

EXTRAITS (ch.12 - Que Dieu est inconnaissable) : 

Il faut donc que nous disions que Dieu est inconnaissable non pas pour nous détourner de Dieu, mais pour le connaitre tel qu'il est, en nous détournant de ce qui n'est pas lui. Il faut dire en un sens que la connaissance de Dieu est impossible pour que l'on ne connaisse Dieu que par lui-même.  Dieu est inconnaissable parce qu'il est connu au-delà de toute connaissance déterminable; quoiqu'il soit dans la pensée, rien ne peut lui être comparé. (...)

L'ignorance peut-être le vide pur et simple ou la place faite à l'intelligible suprême. Dans le premier cas, elle est morte et sans vie; dans le second, elle est la découverte d'une vie toute-puissante et sans commune mesure avec nous. En ce sens elle est étonnement et crainte tant que l'individu subsiste pour lui-même. Ensuite elle est amour. (...)

Ce n'est plus lui qui aime, car Dieu seul est présent. L'ignorance est alors parfaite. L'ignorance est l'apport humain dans la connaissance de Dieu. En elle Dieu nous nie selon nous pour nous affirmer selon lui. Elle est comme l'air obscur qu'illumine la lumière et devient lumière à son tour. Elle représente l'humanité dans l'union du Verbe et de la nature humaine. 
Si la connaissance de Dieu ne peut être que divine, elle est nécessairement ignorance du point de vue de l'homme. (...)

Si nous connaissions les choses finies par l'infini qui est leur source, il n'y aurait qu'un seul tout dans la pensée comme il n'y a qu'un seul tout dans l'être. (...)


EXTRAITS (conclusion - De la science véritable) : 

Dieu est partout certes, mais en tant que Dieu; et nous ne pouvons distinguer sa présence en toutes choses qu'en le connaissant d'abord pur de tout mélange. (...)

Rattachant le sensible à son fondement intelligible, la pensée ici en épuise le sens, saisit la chose dans sa réalité même et avec elle tous les degrés de l'être universel. La science véritable recourt donc à un autre instrument que la mesure pour relier le sensible à l'intelligible. Elle se sert de la forme, de la mesure même ou de toute autre détermination comme d'un signe dont elle déchiffre le sens à la lumière de la connaissance qu'elle a reçue de l'origine du monde. Le signe tient à la fois du sensible et de l'intelligible. Il est le sceau de l'intelligible dans le sensible, il conduit la pensée à la vérité du sensible et la libère du sensible puisqu'il l'utilise. (...)
Le signe ne fait pas appel au même type d'intelligence que la mesure. Celle-ci s'adresse à l'intelligence discursive et individuelle; celui-là se rattache à l'intelligence intuitive et transcendante. (...)
Le signe n'a donc pas les contours rigides du concept ou du nombre. Employé comme langage universel, il a plusieurs sens, opposés parfois, suivant les applications dont il peut-être l'objet dans les différentes régions du réel; inversement, plusieurs signes, empruntés à des domaines différents de réalité, peuvent avoir le même sens. (...)
Cette "logique" non discursive - comme la "logique" de la passion, mais à l'opposé d'elle - rapproche la science véritable de l'art. C'est par l'art en effet que la connaissance s'exprime, l'art non seulement de la parole et de l'écriture, mais aussi du dessin, des couleurs, des sons, des gestes. La science juge de l'intelligible, mais c'est à l'art de convertir le sensible en intelligible sur le plan même du sensible. L'art apporte au sensible le caractère de l'intelligence; il est de l'intelligence sensible. Car l'art normal ne relève pas plus de la simple puissance sensible ou affective que la science véritable ne se borne à la relation rationnelle. Il puise son inspiration à la source de la connaissance pour analyser la structure des choses et manifester leur origine et leur fin. L'art est l'écriture de la science. Il donne aux choses leur essence visible et rend la pensée perceptible et communicable. Il fait apparaître ce que les choses contiennent d'absolu. C'est pourquoi la beauté ne vient pas de la forme sensible; elle est la beauté intelligible de la connaissance. L'art est le corps dont la science est l'âme. (...)

Seule une inspiration divine peut insuffler dans une société une vie spirituelle assez puissante pour cristalliser autour d'elle toutes les disciplines humaines (...). 

La science véritable n'est pas seulement un voeu spéculatif; elle est une nécessité immédiate. (...)

TABLE DES MATIERES :

Introduction
Chapitres : 
1 De l'objectivité
2 Anthropomorphisme et science
3 (suite)
4 De la littéralité en histoire
5 La situation de la science
6 La domination du monde
7 Science contingente et science nécessaire
8 Que la science moderne n'est pas un chemin direct vers Dieu
9 Sur la phénoménologie
10 La nécessité de la connaissance de Dieu
11 La possibilité de la connaissance de Dieu
12 Que Dieu est inconnaissable
Conclusion : De la science véritable


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