Évagre (345-399) naquit à Ibora dans le Pont, où son père était chorévêque. De bonne heure, il entra en relation avec les pères Cappadociens : il reçut le lectorat des mains de saint Basile et fut ordonné diacre par saint Grégoire de Nazianze. En 380, Évagre quitte son pays pour n'y plus revenir et il accompagne Grégoire de Nazianze à Constantinople. Après une aventure romanesque avec la femme d'un haut fonctionnaire, il s'embarque pour Jérusalem.
Là, il fut accueilli par Mélanie l'Ancienne et Rufin. En 383, Évagre gagna l'Égypte, où il s'établit définitivement comme moine. Auprès de ceux qui furent parmi les plus illustres des « Pères du Désert », il recueillit cette sagesse pratique, essentiellement empirique, qui se transmettait parmi les moines, et à laquelle il devait contribuer à donner une forme systématique et écrite. Aux Kellia, Évagre devint avec Ammonios le chef d'un groupe de moines, qui furent surnommés « origénistes », en raison de la faveur dont jouissaient parmi eux les œuvres d'Origène et l'exégèse allégorique. Après la mort d'Évagre, cette communauté souffrit de la persécution contre les origénistes, comme aussi les œuvres de leur maître.
Source du texte : Ed. du Cerf
Autre biographie : wikipedia / scourmont
Bibliographie (en français) :
- Traité pratique ou Le Moine, deux tomes, Ed. du Cerf, 1971
- Scholies au Proverbes, Ed. du Cerf, 1987
- Le Gnostique ou A celui qui est devenu digne de la science, Ed. du Cerf, 1989
- Scholies à l'Ecclésiaste, Ed. du Cerf, 1998
- Sur les pensées, Ed. du Cerf, 1998.
- Chapitre des disciples d'Evagre, Ed. du Cerf, 2007.
- Les Leçons d'un contemplatif, Le Traité de l'oraison, traduction et commentaires de L. Hausherr, Ed. Beauchesn, 1960.
Etudes :
Antoine Guillaumont, Un philosophe au désert, Evagre le Pontique, Ed. Vrin, 2004
Gabriel Bunge, La doctrine d'Evagre le Pontique sur l'Acédie, Ed. Abnaye de Bellefontaine, 1997
Jean-Yves Leloup, Praxis et Gnosis d'Evagre le Pontique, Ed. Albin Michel, 1992.
L'Oraison :
(...)
34a. L'oraison sans distraction est la plus haute intellection de l'intelligence.
35. L'oraison est une ascension de l'intelligence vers Dieu.
36. Si tu ambitionnes l'oraison, renonce à tout pour obtenir le tout.
(...)
38. Cherche uniquement dans ton oraison la justice et le règne, c'est-à-dire la vertu et la gnose, et tout le reste te sera ajouté.
(...)
52. L'état d'oraison c'est un habitus impassible qui, par un amour suprême, ravit sur les cimes intellectuelles l'intelligence éprise de sagesse et spirituelle.
(...)
57. Même si l'intelligence s'élève au-dessus de la contemplation de la nature corporelle, elle n'a pas encore la vue parfaite du lieu de Dieu, car elle peut en être à la science des intelligibles et partager leur multiplicité.
(...)
59. Celui qui prie en esprit et en vérité ne tire plus des créatures les louanges qu'il donne au Créateur, mais c'est de Dieu même qu'il loue Dieu.
60. Si tu es théologien, tu prieras vraiment, et si tu pries vraiment, tu es théologien.
61. Lorsque ton intelligence, dans un ardent amour pour Dieu, se met peu à peu à sortir pour ainsi dire de la chair, et qu'elle rejette toutes les pensées qui viennent des sens ou de la mémoire ou du tempérament, se remplissant en même temps de respect et de joie, alors tu peux t'estimer proche des confins de l'oraison.
62. Le Saint-Esprit, compatissant à notre faiblesse, nous visite même non encore purifiés, pourvu seulement qu'il trouve notre intelligence priant avec le désir de l'oraison véritable, il survient en elle et dissipe toute la phalange des raisonnements et des pensées qui l'assiègent et la porte à l'amour (ou aux oeuvres) de l'oraison spirituelle.
63. Tandis que les autres se servent des altérations du corps pour donner à l'intelligence des raisonnements ou des concepts ou des réflexions, lui, le Seigneur, fait le contraire : il survient directement à l'intelligence pour y mettre la gnose; et par l'intelligence il apaise le déséquilibre du corps.
(...)
66. Ne te figure pas la diversité en toi quand tu pries, ni ne laisse ton intelligence subir l'impression d'aucune forme, mais va immatériel à l'immatériel, et tu comprendras.
(...)
69. Tiens-toi sur tes gardes, en préservant ton intellect de tous les concepts au temps de l'oraison, pour qu'il soit ferme dans la tranquillité qui lui est propre; alors Celui qui qui compatit aux ignorants viendra sur toi aussi, et tu recevras un don d'oraison très glorieux.
70. Tu ne saurais avoir l'oraison pure, si tu es embarrassé de chose matérielle et agité de soucis continuels, car l'oraison est suppression de pensées.
(...)
72. Une fois que l'intelligence est parvenue à l'oraison pure et véritable, les démons ne viennent plus à elle par la gauche, mais par la droite. Ils lui représentent une vision illusoire de Dieu en quelque figure agréable aux sens, de manière à lui faire croire qu'elle a obtenu parfaitement le but de la prière. Or, cela, disait un admirable gnostique, est l'oeuvre de la passion de vaine gloire et d'un démon dont les touches font palpiter les veines du cerveau.
(...)
74. L'Ange de Dieu survenant expulse d'un seul mot de notre intérieur toute l'action adverse, et ramène la lumière de l'intellect à une activité sans déviation.
(...)
86. La gnose est excellente, car elle est collaboratrice de l'oraison en éveillant la puissance intellectuelle de l'intelligence à la contemplation de la gnose divine.
(...)
101. Comme le pain est nourriture pour le corps, ainsi que la vertu l'est pour l'âme, et l'oraison spirituelle pour l'intelligence.
(...)
113. Le moine devient l'égal des Anges par la véritable oraison.
114. Aspirant à voir la face du Père qui est aux cieux, ne cherche pour rien au monde à percevoir une forme ou une figure au temps de l'oraison.
(...)
116. L'origine des illusions de l'intellect, c'est la vaine gloire, c'est celle-ci qui pousse l'intellect à essayer de circonscrire la divinité dans des figures et dans des formes.
117. Traduisons d'abord d'après le texte de la Patrologue Grecque : Je dirais ma pensée, que je dis (que j'ai dite) même aux jeunes : Heureux l'intellect qui, au temps de l'oraison, s'est acquis une parfaite indétermination.
118. Bienheureux l'intellect qui dans une oraison sans distraction acquiert toujours de nouveaux accroissements d'amour pour Dieu.
119. Bienheureux l'intellect qui, au temps de l'oraison, devient immatériel et dénué de tout.
120 Bienheureux est l'intellect qui, au temps de l'oraison, a obtenu une parfaite insensibilité.
(...)
123. Bienheureux le moine qui tient tous les hommes pour Dieu, après Dieu.
124. Moine est celui qui est séparé de tout et uni à tous.
125. Est moine celui qui s'estime un avec tous, par l'habitude de se voir lui-même en chacun.
(...)
146. De même qu'il ne sert de rien à qui souffre d'une maladie des yeux de fixer sans voile et avec insistance le soleil en plein midi, quand il est en son plus fort embrasement, de même ne servirait-il absolument de rien à l'intellect passionné et impur de contrefaire la redoutable et suréminente oraison en esprit et en vérité, mais bien au contraire exciterait-il contre lui-même l'indignation de la divinité.
(...)
149. L'attention en quête de l'oraison trouvera l'oraison, car s'il est quelque chose que suit l'oraison, c'est l'attention, il faut donc s'y appliquer.
(...)
153. Car, c'est, quand tu seras parvenu dans ton oraison au-dessus de toute autre joie, qu'enfin, en toute vérité, tu auras trouvé l'oraison.
Extrait de : Le Traité de l'Oraison (ouvrage épuisé)
Le Gnostique :
1. Les pratiques comprendront les raisons pratiques, mais les choses gnostiques, les gnostiques les verront.
2. Le pratique, c'est celui qui a seulement acquis l'impassibilité de la partie passionnée de son âme.
3. Le gnostique, c'est celui qui joue le rôle du sel pour les impurs et de la lumière pour les purs.
4. La science qui nous arrive de l'extérieur s’efforce de faire connaitre les matières par l'intermédiaire des raisons; mais celles qui vient à nous de la grâce de Dieu présente directement les objets à l'esprit, et, en les regardant, l'intellect accueille leurs raisons. A la première s'oppose <l'erreur, à la seconde> la colère et l'irascibilité <et ce qui les suit>.
(...)
22. Il faut que le gnostique ne soit ni sombre, ni d'un abord difficile. Cela, en effet, est de quelqu'un qui ignore les raisons des êtres; ceci, de quelqu'un qui ne veut pas "que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité".
23. Il est nécessaire parfois de feindre l'ignorance, parce que ceux qui interrogent ne sont pas digne d'entendre. Et tu seras véridique, puisque tu es lié à un corps et que tu n'as pas maintenant la connaissance intégrale des choses.
24. Garde-toi de dire, en vue du gain ou du bien-être ou pour une gloire passagère, quelque chose de ce qui ne doit pas être révélé, de peur que tu ne sois rejeté hors de l'enceinte sacrée, comme vendant, toi aussi, dans le Temple, les petits de la colombe.
(...)
27. Ne parle pas de Dieu inconsidérément et ne définis jamais la Divinité. Les définitions, en effet, sont propre aux êtres créés et composés.
(...)
33. A son insu, celui qui guérit les hommes à cause du Seigneur se soigne également lui-même, car le remède qu'applique le gnostique guérit son prochain autant qu'il est possible, mais lui-même nécessairement.
(...)
41. Toute proposition a comme prédicat ou un genre, ou une différence, ou une espèce, ou une propriété, ou un accident, ou ce qui est composé de ces choses, mais, au sujet de la sainte Trinité, rien de ce qui vient d'être dit n'est admissible. Qu'en silence soit adoré l'ineffable !
42. La tentation du gnostique est une opinion fausse qui présente à l'intellect ce qui existe comme n'existant pas, ce qui n'existe pas comme existant, ou encore ce qui existe comme existant autrement qu'il n'est.
43. Le péché du gnostique est la science fausse des objets eux-même ou de leur contemplation, qui est engendrée par une passion quelconque, ou parce que ce n'est pas en vue du bien qu'est faite la recherche.
(...)
45. La colonne de la vérité, Basile de Cappadoce, a dit : La science qui provient des hommes est fortifiée par l'étude et l'exercice assidus, mais celle qui vient en nous par la grâce de Dieu l'est par la justice, la maîtrise de la colère et la miséricorde. La première, il est possible de la recevoir, même pour qui est sujet aux passions, mais la deuxième, seuls les impassibles en sont capables, eux qui, de plus, à l'heure de la prière, contemplent la propre lumière de leur intellect qui les illumine.
(...)
49. Le but de la pratique est de purifier l'intellect et de le rendre impassible, celui de la physique est de révéler la vérité cachée dans tous les êtres, mais éloigner l'intellect des matières et le tourner vers la Cause première, c'est là un don de la théologie.
Le Gnostique :
1. Les pratiques comprendront les raisons pratiques, mais les choses gnostiques, les gnostiques les verront.
2. Le pratique, c'est celui qui a seulement acquis l'impassibilité de la partie passionnée de son âme.
3. Le gnostique, c'est celui qui joue le rôle du sel pour les impurs et de la lumière pour les purs.
4. La science qui nous arrive de l'extérieur s’efforce de faire connaitre les matières par l'intermédiaire des raisons; mais celles qui vient à nous de la grâce de Dieu présente directement les objets à l'esprit, et, en les regardant, l'intellect accueille leurs raisons. A la première s'oppose <l'erreur, à la seconde> la colère et l'irascibilité <et ce qui les suit>.
(...)
22. Il faut que le gnostique ne soit ni sombre, ni d'un abord difficile. Cela, en effet, est de quelqu'un qui ignore les raisons des êtres; ceci, de quelqu'un qui ne veut pas "que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité".
23. Il est nécessaire parfois de feindre l'ignorance, parce que ceux qui interrogent ne sont pas digne d'entendre. Et tu seras véridique, puisque tu es lié à un corps et que tu n'as pas maintenant la connaissance intégrale des choses.
24. Garde-toi de dire, en vue du gain ou du bien-être ou pour une gloire passagère, quelque chose de ce qui ne doit pas être révélé, de peur que tu ne sois rejeté hors de l'enceinte sacrée, comme vendant, toi aussi, dans le Temple, les petits de la colombe.
(...)
27. Ne parle pas de Dieu inconsidérément et ne définis jamais la Divinité. Les définitions, en effet, sont propre aux êtres créés et composés.
(...)
33. A son insu, celui qui guérit les hommes à cause du Seigneur se soigne également lui-même, car le remède qu'applique le gnostique guérit son prochain autant qu'il est possible, mais lui-même nécessairement.
(...)
41. Toute proposition a comme prédicat ou un genre, ou une différence, ou une espèce, ou une propriété, ou un accident, ou ce qui est composé de ces choses, mais, au sujet de la sainte Trinité, rien de ce qui vient d'être dit n'est admissible. Qu'en silence soit adoré l'ineffable !
42. La tentation du gnostique est une opinion fausse qui présente à l'intellect ce qui existe comme n'existant pas, ce qui n'existe pas comme existant, ou encore ce qui existe comme existant autrement qu'il n'est.
43. Le péché du gnostique est la science fausse des objets eux-même ou de leur contemplation, qui est engendrée par une passion quelconque, ou parce que ce n'est pas en vue du bien qu'est faite la recherche.
(...)
45. La colonne de la vérité, Basile de Cappadoce, a dit : La science qui provient des hommes est fortifiée par l'étude et l'exercice assidus, mais celle qui vient en nous par la grâce de Dieu l'est par la justice, la maîtrise de la colère et la miséricorde. La première, il est possible de la recevoir, même pour qui est sujet aux passions, mais la deuxième, seuls les impassibles en sont capables, eux qui, de plus, à l'heure de la prière, contemplent la propre lumière de leur intellect qui les illumine.
(...)
49. Le but de la pratique est de purifier l'intellect et de le rendre impassible, celui de la physique est de révéler la vérité cachée dans tous les êtres, mais éloigner l'intellect des matières et le tourner vers la Cause première, c'est là un don de la théologie.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire