Homère (en grec ancien Ὅμηρος / Hómêros, « otage » ou « celui qui est obligé de suivre ») est réputé avoir été un aède (poète) de la fin du viiie siècle av. J.‑C. On lui attribue les deux premières œuvres de la littérature occidentale : l’Iliade et l’Odyssée. Il était simplement surnommé « le Poète » (ὁ Ποιητής / ho Poiêtếs) par les Anciens.
Il est encore difficile d'établir aujourd'hui avec certitude si Homère a été un individu historique ou une identité construite, et s'il est bien l'auteur des deux épopées qui lui sont attribuées. Cependant plusieurs villes ioniennes (Chios, Smyrne, Cymé ou encore Colophon) se disputaient l'origine de l'aède et la tradition l'individualisait en répétant qu'Homère était aveugle.
La place d'Homère dans la littérature grecque est tout à fait majeure puisqu'il représente à lui seul le genre épique à cette période : on lui a attribué l’Iliade et l’Odyssée dès le VIe siècle av. J.-C., ainsi que deux poèmes comiques, la Batrachomyomachia (littéralement « la bataille des grenouilles et des rats ») et le Margitès, et les poèmes des Hymnes homériques. La langue homérique est une langue déjà archaïque au VIIIe siècle av. J.‑C. et davantage encore au moment de la fixation du texte, au VIe siècle av. J.‑C. : elle est associée à l'emploi de l'hexamètre dactylique. (...)
Source (et suite) du texte : wikipedia
Autre bio : exposition BNF
"Le seul auteur du monde qui n'ait jamais soûlé ni dégoûté les hommes"
Michel de Montaigne
Bibliographie :
- Iliade, Odyssée, trad. Robert Flacière et Victor Bérard, Ed. Gallimard, La Pléiade, 1955
- Odyssée, trad. Philippe Jaccottet, Ed. La Découverte, 2004.
- Iliade, trad. Paul Mazon, Ed. Gallimard, Folio Classique, 1975
- Odyssée, trad. Victor Bérard, Ed. Gallimard, Folio Classique,
- Hymnes, trad- Jean Humbert, Ed. les Belles Lettres, 1976
(...)
Liste des traducteurs et illustrateurs de l'Iliade et de l'Odyssée
En ligne :
- Iliade, trad. Leconte de Lisle / fichier mp3 (livre audio)
- Odyssée, trad. Leconte de Lisle / fichier mp3 (livre audio)
- divers traductions : Odyssée / Iliade
Jean-Pierre Vernant, La Guerre de Troie : vidéo TSR / L'Odyssée d'Ulysse : vidéo TSR
AUX MUSES
Chantons d'abord les Muses, Apollon et Zeus : c'est par les Muses et l'Archer Apollon qu'il existe sur terre des hommes qui chantent et jouent de la cithare - aussi bien que par Zeus, il existe des rois : fortuné celui que chérissent les Muses, douces sont les paroles qui coulent de ses lèvres !
Salut, filles de Zeus ! Daignez favoriser mon chant ! Pour moi, je penserai à
vous dans mes autres chants.
Extraits de : HymnesSalut, filles de Zeus ! Daignez favoriser mon chant ! Pour moi, je penserai à
vous dans mes autres chants.
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Masque d'Agamemnon |
Et maintenant, dites-moi, Muses, habitantes de l'Olympe - car vous êtes, vous, des déesses : partout présentes, vous savez tout; nous n'entendons qu'un bruit, nous, et ne savons rien - dites-moi quels étaient les guides et les chefs des Danaens.
Iliade, chant II, 485-490.
(...)
Magnanime Tydéide, pourquoi t'informes-tu de ma race ? La génération des hommes est semblable à celle des feuilles. Le vent répand les feuilles sur la terre, et la forêt germe et en produit de nouvelles, et le temps du printemps arrive. C'est ainsi que la génération des hommes naît et s'éteint.
Iiliade, chant VI
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* * *
Reine, j’embrasse tes genoux ! Es-tu femme ou déesse ?
Si tu es l’un des dieux qui possèdent le ciel immense,
c’est à la fille du grand Zeus, à la pure Artémis,
que ta beauté, ton port et ta grandeur te font pareille !
Si tu es des mortels qui ont sur terre leur demeure,
trois fois heureux ton père et ta royale mère,
trois fois heureux tes frères : car leur âme, sans nul doute,
est toujours grâce à toi par le bonheur illuminée,
qui regardent fleurir la danse telle fleur !
Et plus heureux encore que tous les autres dans son âme,
celui-là qui, plus généreux, t’emmènera dans sa maison !
Non! jamais je n’ai vu de mortel, homme ou femme, à toi
pareil; et devant toi, je me sens plein de révérence.
Je n’ai rien vu de tel qu’à Délos, autrefois,
près l’autel d’Apollon, le tronc droit d’un jeune palmier :
car je fus là aussi, tout un peuple m’accompagnait
sur cette route où je devais trouver tant de soucis...
Comme alors, devant lui, je demeurai longtemps dans la
stupeur, car jamais un tel fût n’était monté de terre,
de même, femme, je t’admire avec stupeur, je crains
infiniment de toucher tes genoux. (...)
Odyssée, chant VI, 149-169, trad. Philippe Jaccotet
(...)
Dès lors, neuf jours durant, les vents funestes m'entraînèrent
sur la mer poissonneuse; le dixième, nous débarquions
au pays des mangeurs de fleurs, les Lotophages .
On descendit à terre, on refit provision d'eau fraîche,
on mangea vite auprès des rapides navires.
Quand on eut apaisé la soif et l'appétit,
j'envoyai de mes compagnons pour s'informer
quels étaient les mangeurs de pain qui vivaient là;
j'en choisis deux, auxquels j'adjoignis un héraut.
Aussitôt, ils partirent se mêler aux Lotophages;
ceux-ci n'en voulaient pas à la vie de mes compagnons,
ils leur offrirent du lotus pour qu'ils en goûtent.
Mes gens, ayant goûté à ce fruit doux comme le miel,
ne voulaient plus rentrer nous informer,
mais ne rêvaient que de rester parmi ce peuple
et, gorgés de lotus, ils en oubliaient le retour...
Je dus les ramener de force, tout en pleurs,
les traîner aux vaisseaux et les attacher sous les bancs.
J'enjoignis au restant du fidèle équipage
de monter aussitôt à bord des prompts navires,
craignant que le lotus n'égarât encor d'autres hommes.
Embarqués promptement, ils prirent place à leur tolet
en bon ordre, et frappèrent de leur rame la mer grise.
Odyssée, chant IX, 82, trad. Philippe Jacottet.
(...)
"Sois gentil, donne-m'en encore, et puis dis-moi ton nom,
tout de suite, que je te fasse un cadeau qui te plaise !
Car la terre du blé pour les Cyclopes porte aussi
le vin en lourdes grappes que grossit la pluie de Zeus:
mais ça, c'est de l'essence d'ambroisie et de nectar !"
Ainsi dit-il, et je lui reversai du vin de feu;
trois fois je l'en servis, et trois fois l'imprudent le but.
Puis, quand le vin lui eut embrumé les esprits,
je lui soufflai ces mots aussi doux que du miel :
"Cyclope, tu t'enquiers de mon illustre nom. Eh bien,
je répondrai: mais tu n'oublieras pas le don promis !
Je m'appelle Personne, et Personne est le nom
que mes parents et tous mes autres compagnons me donnent."
A ces mots, aussitôt, il repartit d'un coeur cruel :
"Eh bien, je mangerai Personne le dernier
et les autres d'abord. Voilà le don que je te fais !"
Alors, tête en arrière, il tomba sur le dos;
Puis sa grosse nuque fléchit, le souverain dompteur,
le sommeil, le gagna; de sa gorge du vin jaillit
et des morceaux de chair humaine; il rotait, lourd de vin.
J'enfouis alors le pieu sous l'abondante cendre
pour le chauffer; j'encourageai de mes propos
mes compagnons, afin qu'aucun, de peur, ne défaillit.
Mais, quand bientôt le pieu d'olivier dans le feu
rougeoyant, quoique vert, jeta une lueur terrible,
m'approchant, je l'en retirai; mes compagnons étaient
autour de moi; un dieu nous insufflait un grand courage.
Eux, s'emparant du pieu d'olivier acéré,
l'enfoncèrent dans l'oeil; moi, appuyant par en dessous,
je tournai, comme on fore une poutre pour un bateau
à la tarière, en bas les aides manient la courroie
qu'ils tiennent aux deux bouts, cependant que la mèche tourne:
ainsi, tenant dans l'oeil le pieu affûté à la flamme,
nous tournions, et le sang coulait autour du pieu brûlant.
Partout sur la paupière et le sourcil grillait l'ardeur
de la prunelle en feu; et ses racines grésillaient.
Comme quand le forgeron plonge une grande hache
ou une doloire dans l'eau froide pour la tremper,
le métal siffle, et là gît la force du fer,
ainsi son oeil sifflait sous l'action du pieu d'olivier.
Il poussa un rugissement, la roche en retentit,
nous nous enfuîmes apeurés; alors, il arracha
le pieu qu'un sang nombreux salissait de son oeil,
le jeta loin de lui de ses mains, affolé,
et à grands cris héla les Cyclopes qui habitaient
dans les grottes des alentours, sur les cimes venteuses.
En entendant ses cris, ils accoururent de partout
et, demeurés dehors, lui demandèrent ses ennuis :
" Quel mal t'accable, Polyphème, pour que tu cries ainsi
dans la céleste nuit, et nous empêches de dormir ?
Serait-ce qu'un mortel emmène malgré toi tes bêtes ?
Serait-ce qu'on te tue par la ruse ou la force ? "
Du fond de l'antre, le grand Polyphème répondit :
" Par ruse, et non par force, amis ! Mais qui me tue ? Personne !
En réponse, on lui dit ces paroles ailées :
"Si tu es seul et si nul ne te fait violence,
contre la maladie qui vient de Zeus, on ne peut rien.
Implore donc plutôt le seigneur Poséidon, ton père !"
lls s'éloignèrent sur ces mots, et mon âme riait
de les voir abuser par mon nom et par ma personne. (...)
Odyssée, chant IX, 365, trad. Philippe Jaccotet
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Reine, j’embrasse tes genoux ! Es-tu femme ou déesse ?
Si tu es l’un des dieux qui possèdent le ciel immense,
c’est à la fille du grand Zeus, à la pure Artémis,
que ta beauté, ton port et ta grandeur te font pareille !
Si tu es des mortels qui ont sur terre leur demeure,
trois fois heureux ton père et ta royale mère,
trois fois heureux tes frères : car leur âme, sans nul doute,
est toujours grâce à toi par le bonheur illuminée,
qui regardent fleurir la danse telle fleur !
Et plus heureux encore que tous les autres dans son âme,
celui-là qui, plus généreux, t’emmènera dans sa maison !
Non! jamais je n’ai vu de mortel, homme ou femme, à toi
pareil; et devant toi, je me sens plein de révérence.
Je n’ai rien vu de tel qu’à Délos, autrefois,
près l’autel d’Apollon, le tronc droit d’un jeune palmier :
car je fus là aussi, tout un peuple m’accompagnait
sur cette route où je devais trouver tant de soucis...
Comme alors, devant lui, je demeurai longtemps dans la
stupeur, car jamais un tel fût n’était monté de terre,
de même, femme, je t’admire avec stupeur, je crains
infiniment de toucher tes genoux. (...)
Odyssée, chant VI, 149-169, trad. Philippe Jaccotet
(...)
Dès lors, neuf jours durant, les vents funestes m'entraînèrent
sur la mer poissonneuse; le dixième, nous débarquions
au pays des mangeurs de fleurs, les Lotophages .
On descendit à terre, on refit provision d'eau fraîche,
on mangea vite auprès des rapides navires.
Quand on eut apaisé la soif et l'appétit,
j'envoyai de mes compagnons pour s'informer
quels étaient les mangeurs de pain qui vivaient là;
j'en choisis deux, auxquels j'adjoignis un héraut.
Aussitôt, ils partirent se mêler aux Lotophages;
ceux-ci n'en voulaient pas à la vie de mes compagnons,
ils leur offrirent du lotus pour qu'ils en goûtent.
Mes gens, ayant goûté à ce fruit doux comme le miel,
ne voulaient plus rentrer nous informer,
mais ne rêvaient que de rester parmi ce peuple
et, gorgés de lotus, ils en oubliaient le retour...
Je dus les ramener de force, tout en pleurs,
les traîner aux vaisseaux et les attacher sous les bancs.
J'enjoignis au restant du fidèle équipage
de monter aussitôt à bord des prompts navires,
craignant que le lotus n'égarât encor d'autres hommes.
Embarqués promptement, ils prirent place à leur tolet
en bon ordre, et frappèrent de leur rame la mer grise.
Odyssée, chant IX, 82, trad. Philippe Jacottet.
(...)
"Sois gentil, donne-m'en encore, et puis dis-moi ton nom,
tout de suite, que je te fasse un cadeau qui te plaise !
Car la terre du blé pour les Cyclopes porte aussi
le vin en lourdes grappes que grossit la pluie de Zeus:
mais ça, c'est de l'essence d'ambroisie et de nectar !"
Ainsi dit-il, et je lui reversai du vin de feu;
trois fois je l'en servis, et trois fois l'imprudent le but.
Puis, quand le vin lui eut embrumé les esprits,
je lui soufflai ces mots aussi doux que du miel :
"Cyclope, tu t'enquiers de mon illustre nom. Eh bien,
je répondrai: mais tu n'oublieras pas le don promis !
Je m'appelle Personne, et Personne est le nom
que mes parents et tous mes autres compagnons me donnent."
A ces mots, aussitôt, il repartit d'un coeur cruel :
"Eh bien, je mangerai Personne le dernier
et les autres d'abord. Voilà le don que je te fais !"
Alors, tête en arrière, il tomba sur le dos;
Puis sa grosse nuque fléchit, le souverain dompteur,
le sommeil, le gagna; de sa gorge du vin jaillit
et des morceaux de chair humaine; il rotait, lourd de vin.
J'enfouis alors le pieu sous l'abondante cendre
pour le chauffer; j'encourageai de mes propos
mes compagnons, afin qu'aucun, de peur, ne défaillit.
Mais, quand bientôt le pieu d'olivier dans le feu
rougeoyant, quoique vert, jeta une lueur terrible,
m'approchant, je l'en retirai; mes compagnons étaient
autour de moi; un dieu nous insufflait un grand courage.
Eux, s'emparant du pieu d'olivier acéré,
l'enfoncèrent dans l'oeil; moi, appuyant par en dessous,
je tournai, comme on fore une poutre pour un bateau
à la tarière, en bas les aides manient la courroie
qu'ils tiennent aux deux bouts, cependant que la mèche tourne:
ainsi, tenant dans l'oeil le pieu affûté à la flamme,
nous tournions, et le sang coulait autour du pieu brûlant.
Partout sur la paupière et le sourcil grillait l'ardeur
de la prunelle en feu; et ses racines grésillaient.
Comme quand le forgeron plonge une grande hache
ou une doloire dans l'eau froide pour la tremper,
le métal siffle, et là gît la force du fer,
ainsi son oeil sifflait sous l'action du pieu d'olivier.
Il poussa un rugissement, la roche en retentit,
nous nous enfuîmes apeurés; alors, il arracha
le pieu qu'un sang nombreux salissait de son oeil,
le jeta loin de lui de ses mains, affolé,
et à grands cris héla les Cyclopes qui habitaient
dans les grottes des alentours, sur les cimes venteuses.
En entendant ses cris, ils accoururent de partout
et, demeurés dehors, lui demandèrent ses ennuis :
" Quel mal t'accable, Polyphème, pour que tu cries ainsi
dans la céleste nuit, et nous empêches de dormir ?
Serait-ce qu'un mortel emmène malgré toi tes bêtes ?
Serait-ce qu'on te tue par la ruse ou la force ? "
Du fond de l'antre, le grand Polyphème répondit :
" Par ruse, et non par force, amis ! Mais qui me tue ? Personne !
En réponse, on lui dit ces paroles ailées :
"Si tu es seul et si nul ne te fait violence,
contre la maladie qui vient de Zeus, on ne peut rien.
Implore donc plutôt le seigneur Poséidon, ton père !"
lls s'éloignèrent sur ces mots, et mon âme riait
de les voir abuser par mon nom et par ma personne. (...)
Odyssée, chant IX, 365, trad. Philippe Jaccotet
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Photographié dans le musée de l'Acropole |
Rien n'est à part dans le monde d'Homère. C'est bien pourquoi il s'agit d'un "monde", où tout se trouve rassemblé dans la même lumière. Si le Soleil "voit" tout, c'est que tous les êtres sont acteurs d'une même pièce. Chacun joue son rôle. Le rôle d'Achille n'est pas celui d'Ulysse, d'Ajax ou de Diomède. Ulysse et Ajax, envoyés en ambassade par Agamemnon, vont le long du rivage où bruit la mer; Achille touche de la cithare en chantant les exploits des héros, tandis que Patrocle, assis en silence, épie les moments où son maître et ami s'arrête de chanter. Le Poète nous montre les héros en acte : dans leur faire, leur action, leur posture, leur façon d'âtre. Mais ce qu'il montre aussi, c'est leur être. Ainsi en est-il pour tout ce qui est au jour, au sens où la nuit aussi est au jour : car la nuit se dé-clôt de sa propre opacité lorsqu'elle est nommée. Tout ce qu'il y a est montré dans l'effectuation de son rôle et agissant, non pas inerte mais prenant part au concert : la mer bruit, l'aube se lève, le soleil observe, la terre "fait naître un tendre gazon" (Il. 14.347), les chevaux parlent, le fleuve se fâche, etc. Mais, de plus, ce qui aussi bien est montré, c'est le fait qu'il y ait Achille et Ulysse, et la terre et la mer, les chevaux et le fleuve, etc. Ainsi ce qui se trouve dé-clos est le fait même d'être de qui est.
Le Poème va ici à l'encontre de la prose. Car, si je dis : "Achille joue de la cithare", je dis ce qu'il fait et c'est cela qui m’intéresse, non qu'il soit jouant de la cithare. De même, si je dis "le temps est mauvais", c'est pour signifier, par exemple, que ce n'est pas un temps à aller se promener, ou pour quelque autre raison, non pour souligner le fait même d'être pour le mauvais temps et pour réfléchir sur ce qu'ici veut dire "être". Heidegger distingue ce qui est et le fait, pour ce qui est, d'être : l'étant et l'être de l'étant. Il observe que l'homme, attentif aux déterminations de l'étant qui l’intéressent, autrement dit à la signification de l'étant relativement à ses projets, que l'homme donc, regarde vers l'étant sans regarder vers l'être : l'homme "oublie" l'être, dit-il. Le terme "oublier" est impropre : on n'oublie pas ce que l'on a jamais vu. Je ne dirai pas : "N'oubliez pas que je vous attends", si la personne à qui je m'adresse n'a aucune connaissance de mon attente. L'homme de l'existence journalière ne porte pas son attention sur l'être. Il est moins "oublieux" que distrait. Cette distraction est constitutive de sa manière d'être au monde, de son Dasein. Où, si l'on veut : son ouverture au monde est ouverture à ce qui est, à l'étant - pour autant que l'étant l’intéresse - donc à la vérité de l'étant sans être ouverture à la vérité de l'être. Par exemple, je roule à bicyclette. Un pneu se dégonfle : le voici "à plat". Ce qui m'interesse est cette nouvelle détermination du pneu, en vue de le déterminer à nouveau comme pneu gonflé, non l'être du pneu et ce que c'est qu'"être" pour un pneu qui "est". Or, le Poème, au contraire, tout en disant les rôles de toutes choses dans l'universel concert, les montre, tout d'abord, comme simplement étant là, purement étantes ou présentes. L'éclaircie du Poème décèle la vérité de l'être.
Extrait de : Marcel Conche, L'éclaircie d'Homère dans Marcel Conche, Essais sur Homère, Ed. Puf, 1999.
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Et pour finir avec un célèbre homonyme... :
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