lundi 20 février 2012

Anselme de Cantorbéry


Anselme de Cantorbéry ou saint Anselme est né à Aoste en 1033 (ou 1034 selon les sources) et mort le 21 avril 1109. Il est aussi parfois nommé Anselme d'Aoste, ou Anselme du Bec, selon qu'on veut insister sur son origine valdôtaine ou sur sa longue présence en France. De fait, Aoste faisait partie intégrante du domaine de la Maison de Savoie constitué en 1032.
Il fut un des plus grands écrivains mystiques de l'Occident médiéval, et considéré parfois comme le premier penseur scolastique. Canonisé en 1494, Anselme de Cantorbéry est proclamé docteur de l'Église en 1720.
Source (et suite) du texte : wikipedia
Autre biographie : jesusmarie


Bibliographie :
- Pourquoi Dieu s'est fait homme ? Ed. du Cerf, 1963
- L'oeuvre de S. Anselme de Cantorbéry. 1) Monologion, Proslogion, Ed. du Cerf, 1986
- 2) Le Grammairien. De la vérité. La liberté du choix. La chute du diable. Ed. du Cerf, 1986.
- 3) Lettres sur l'incarnation du Verbe. Pourquoi un Dieu-homme. Ed. du Cerf, 1988.
- 4) La conception virginale et le péché originel. La procession du Saint-Esprit. Lettres sur les sacrements de l'Eglise. Du pouvoir et de l'impuissance. Ed. du Cerf, 1990.
- 5) Sur l'accord de la prescience, de la prédestination et de la grâce de Dieu avec le libre choix. Prière et méditation. Ed. du Cerf, 1988.
- 6) Correspondance. Lettres 1 à 147, Ed. du Cerf, 2005.
En ligne :
- Proslogion : jesusmarie (PDF) / mecanique universelle


Proslogion
I.
Eveil de l'esprit à la contemplation de Dieu.
Et maintenant, homme de rien, fuis un moment tes occupations, cache-toi un peu de tes pensées tumultueuses. Rejette maintenant tes pesants soucis, et remets à plus tard les tensions laborieuses. Vaque quelque peu à Dieu, et repose-toi quelque peu en Lui. Entre dans la cellule de ton âme, exclus tout hormis Dieu et ce qui t'aide à le chercher, porte fermée, cherche-le. Dis maintenant, tout mon coeur, dis maintenant à Dieu : Je cherche ton visage, Seigneur, je le recherche.
Et maintenant, Toi Seigneur mon Dieu, enseigne à mon coeur où et comment Te chercher, où et comment Te trouver. Seigneur, si Tu n'es pas ici, où Te chercherai-je absent ? Et, si Tu es partout, pourquoi ne Te vois-je pas présent ? Mais certainement Tu habites la lumière inaccessible. Où est la lumière inaccessible ? Ou bien comment accéderai-je à la lumière inaccessible ? Ou qui me conduira et introduira en elle pour qu'en elle je Te voie ? (...)

II.
Que Dieu est vraiment
Aussi, Seigneur, Toi qui donnes l'intelligence de la foi, donne-moi, autant que Tu le trouves bon, de reconnaître que Tu es comme nous (le) croyons, et que Tu es ce que nous croyons. Nous croyons en effet que Tu es quelque chose dont rien de plus grand ne puisse être pensé. Est-ce qu'une telle nature n'est pas parce que l'insensé a dit dans son coeur : Dieu n'est pas ? Mais certainement ce même insensé, lorsqu'il entend cela même que je dis : "quelque chose dont rien de plus grand ne peut être pensé", reconnait ce qu'il entend, et ce qu'il reconnait est dans son intelligence, même s'il ne reconnait pas que cela est. (...) Mais certainement cela dont plus grand ne peut être pensé ne peut pas être dans la seule intelligence. En effet, s'il est au moins dans la seule intelligence, qu'il soit aussi dans la réalité peut être pensé, ce qui est plus grand. (...) Quelque chose dont plus grand ne peut être pensé existe donc, sans le moindre doute, et dans l'intelligence et dans la réalité.

XV
Qu'il est plus grand qu'il ne se puisse penser
Par suite, Seigneur, Tu n'es pas seulement tel que plus grand ne peut -être pensé, mais Tu es quelque chose de plus grand qu'il ne se puisse penser. Puisqu'il est possible en effet de penser qu'il est quelque chose de ce genre, il est possible si Tu n'es pas cela même, de penser quelque chose de plus grand que Toi, ce qui ne peut se faire.

XVI
Que telle est la lumière inaccessible qu'Il habite
Telle est vraiment, Seigneur, la lumière inaccessible en laquelle Tu habites. Il n'est vraiment nulle autre chose qui la pénètre pour T'y voir pleinement. En vérité je en la vois pas car elle est trop forte pour moi, tout ce que je vois , par elle pourtant je le vois, comme l'oeil malade voit par la lumière solaire qu'il ne peut regarder dans le soleil lui-même. Mon intelligence ne peut rien vers elle. Elle brille trop, l'oeil de mon âme ne la saisit pas, ni ne supporte de se tendre longtemps vers elle. Il est ébloui par l'éclat, vaincu par l'amplitude, accablé par l'immensité, confondu par la capacité. O lumière suréminente et inaccessible, o vérité totale et bienheureuse, que tu es loin de moi, qui suis si proche de toi ! Que tu es éloignée de mon regard, (de moi) qui suis tellement présent à ton regard ! Partout tu es tout entière présente, et je ne te vois pas. En toi je suis mû, en toi je suis, et je ne puis accéder à toi. Tu es en moi, autour de moi, et je ne te sens pas.

XIX
Qu'Il n'est ni dans le lieu ni dans le temps, mais que toutes choses sont en Lui
Mais, si par ton éternité Tu fus, es et seras, si avoir été n'est point avoir à être, ni être avoir été ou avoir à être, comment ton éternité est-elle tout entière toujours ?
De ton éternité, rien ne serait-il passé en sorte qu'il ne soit plus, rien ne serait-il futur en sorte qu'il ne soit pas encore ? Tu ne fus donc pas hier, Tu ne seras pas demain, mais Tu es hier, aujourd'hui et demain. Bien plus Tu n'es ni hier, ni aujourd'hui ni demain, mais Tu es simplement, hors du temps. Car hier, aujourd'hui et demain ne sont pas ailleurs que dans le temps, Toi au contraire, bien que rien ne soit sans Toi, Tu n'es ni dans le lieu ni dans le temps, mais toutes choses sont en Toi. Rien ne Te contient, mais Tu contient toutes choses.

XXII
Qu'Il est seul ce qu'Il est et qu'Il est
Toi seul, Seigneur, es donc ce que Tu es, et Tu es que Tu es. Car ce qui est une (chose) en (son) tout, une autre en (ses) parties, ce en quoi quelque chose est muable, n'est absolument pas ce qu'il est. Et ce qui commença du non-être, dont on peut penser qu'il n'est pas, et qui revient au non-être s'il ne subsiste par autre chose, ce qui a d'avoir été ce qu'il n'est plus, à être ce qu'il n'est pas encore, n'est point, à proprement parler et absolument (parler). Toi, au contraire, Tu es ce que Tu es car, tout ce que Tu es quelques fois ou de quelque façon, Tu l'es tout entier et toujours.
Et Tu es que Tu es, à proprement parler et simplement (parler), car Tu n'as ni avoir été ni avoir être mais Tu es seulement présent, et il ne se peut penser que quelque fois Tu ne sois pas. Tu es la vie, la lumière, la sagesse, la béatitude, l'éternité et maint bien de cette sorte, Tu n'es pourtant que le bien unique et suréminent, Toi qui te suffis pleinement à Toi-même et n'as besoin de rien, Toi dont toutes choses ont besoin pour être, et être bien.
Extrait du Proslogion, trad. Michel Corbin.
Commande sur Amazon : L'Oeuvre d'Anselme de Cantorbéry, tome 1: Monologion - Proslogion


* * *
Monologion
LXV
Comment (quelque chose de) vrai fut-il discuté sur (cette) chose ineffable.
Nouvelle (difficulté) : si la raison (propre) à cette Ineffabilité se tient ainsi, ou plutôt parce qu'elle est ainsi, comment tiendra tout ce qui fut discuté à son sujet selon les relations de père, de fils et de procédant ? Car, si ce fut expliqué par une vraie raison, comment (l'essence suréminente) est-elle ineffable ? Ou, si elle est ineffable, comment est-elle ainsi qu'il fut discuté ? Put-elle être expliquée un tant soit peu, de sorte que rien n’empêche ce qui fut discuté d'être vrai, est-elle ineffable parce qu'elle ne put absolument pas être comprise ? Et que pourrait-on répondre à ce qui fut déjà établi en cette même discussion, à savoir que l'essence suréminente est tellement au-dessus et hors de toute autre nature que le sens n'est jamais commun si d'aventure on dit d'elle quelque chose en des paroles qui sont communes aux autres natures ? Quel sens en effet ai-je reconnu en toutes ces paroles que j'ai pensées, sinon le sens commun et usuel ? Si le sens usuel des mots lui est étranger, tout ce sur quoi j'ai raisonné ne lui appartient pas. Comment est-il alors vrai que quelque chose ait été trouvé au sujet de l'essence suréminente si ce qui fut trouvé est de fort loin différent d'elle ?
Quoi donc ? Ai-je d'une certaine manière trouvé quelque chose de la chose incompréhensible, et d'une autre manière rien perçu d'elle ? Souvent, de fait, nous disons maintes choses que nous n'exprimons pas proprement comme elles sont, et nous signifions par autre chose ce que nous ne voulons ou ne pouvons pas exprimer proprement et directement, ainsi quand nous parlons par énigmes. Souvent nous voyons une chose non pas proprement comme elle est, mais par quelques ressemblance ou image, ainsi quand nous considérons le visage de quelqu'un dans un miroir. De la sorte assurément nous disons et ne disons pas, nous voyons et ne voyons pas la même et unique chose. Nous disons et voyons par autre chose, nous ne disons et voyons pas par ce qui lui est propre. Pour cette raison, rien n'empêche que soit vrai ce qui fut discuté jusqu'ici sur la nature suréminente et qu'elle-même demeure néanmoins ineffable, à condition de ne jamais penser qu'elle ait été exprimée par ce qui est propre à son essence, mais qu'elle fut désignée en quelque manière par autre chose. Car tous ces noms qui semblent pouvoir se dire de cette nature ne me la montre pas tant par ce qui lui est propre qu'ils ne me l'indiquent par quelque ressemblance. Quand je pense les significations de ces mêmes mots, je conçois mentalement ce que je perçois dans les choses faites plus familièrement que ce que je reconnais transcender toute intelligence humaine.  Dans mon esprit ces (mots) constituent par leur signification quelque chose de bien moindre, ou plutôt de fort loin différent de Cela vers quoi mon intelligence s'efforce de progresser grâce à cette signification ténue. Ni le nom de sagesse ne suffit à me montrer Cela par quoi tout fut fait de rien, et est gardé du rien, ne le nom d'essence ne peut m'exprimer Cela qui, par sa hauteur singulière, est loin au-dessus de toutes choses, et par sa propriété naturelle, bien en dehors de toutes choses. Ainsi cette nature est-elle ineffable, qui ne peut être aucunement annoncée comme elle est, (sans que) soit faut ce que l'enseignement de la raison peut (faire) estimer d'elle par autre chose, comme en énigme. 
Extrait du Monologion, trad. Michel Corbin.
Commande sur Amazon : L'Oeuvre d'Anselme de Cantorbéry, tome 1: Monologion - Proslogion

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...