Henry David Thoreau, né David Henry Thoreau le 12 juillet 1817 à Concord (Massachusetts) où il est mort le 6 mai 1862, est un essayiste, enseignant, philosophe, naturaliste amateur et poète américain.
Son œuvre majeure, Walden ou la vie dans les bois, publiée en 1854, délivre ses réflexions sur une vie simple menée loin de la société, dans les bois et suite à sa « révolte solitaire ». Le livre La Désobéissance civile (1849), dans lequel il avance l'idée d'une résistance individuelle à un gouvernement jugé injuste, est considéré comme à l'origine du concept contemporain de « non-violence ».
Opposé à l'esclavagisme toute sa vie, faisant des conférences et militant contre les lois sur les esclaves évadés et capturés, louant le travail des abolitionnistes et surtout de John Brown, Thoreau propose une philosophie de résistance non violente qui influence des figures politiques, spirituelles ou littéraires telles que Léon Tolstoï, Mohandas Karamchand Gandhi et Martin Luther King.
Les livres, articles, essais, journaux et poésies de Thoreau remplissent vingt volumes. Surnommé le « poète-naturaliste » par son ami William Ellery Channing (1780 - 1842), Thoreau se veut un observateur attentif de la nature et ce surtout dans ses dernières années durant lesquelles il étudie des phénomènes aussi variés que les saisons, la dispersion des essences d'arbres ou encore la botanique. Les différents mouvements écologistes ou les tenants de la décroissance actuels le considèrent comme l'un des pionniers de l'écologie car il ne cesse de replacer l'homme dans son milieu naturel et appelle à un respect de l'environnement.
Source (et suite) du texte : wikipedia
Bibliographie (en français) : wikipedia
Ce n'est pas un rêve
Pour orner un vers,
Je ne peux m'approcher plus de Dieu ni du Ciel
Qu'en vivant à Walden.
Je suis les pierres de sa rive,
Et la brise qui passe au-dessus,
Dans le creux de ma main
Se trouvent son eau et son sable,
Et son repère le plus profond
Repose haut dans ma pensée.
Lorsque je vogue, par un jour brûlant, sur les eaux paresseuses de l'étang, je cesse presque de vivre et commence d'être. Un batelier, étendu sur le pont de sa barque, s'abandonnant au soleil de midi, me semble un aussi bon emblème de l'éternité que le serpent qui tient sa queue dans sa bouche. je ne suis jamais plus enclin qu'alors à perdre mon identité. Je me dissous dans la brume ensoleillée.
Journal, p. 33
Journal, p 115.
En ces temps je poussais pendant la nuit comme le maïs, et c'était beaucoup mieux que n'importe quel travail de mes mains. Ce n'était pas du temps soustrait de ma vie, mais autant en sus pour mon ordinaire. Je réalisais ce que les Orientaux entendent par contemplation et par renoncement aux actions. En général, je ne me souciais pas de la façon dont s'écoulaient les heures. Le jour avançait comme pour éclairer un de mes travaux c'était le matin, et voilà, maintenant c'est le soir, et rien de remarquable ne s'est accompli. Au lieu de chanter comme les oiseaux, je souriais en silence à mon incessante fortune (...) C'était sans aucun doute pure oisiveté aux yeux de mes concitoyens, mais si les oiseaux et les fleurs m'avaient jugé selon leurs critères, je n'aurais pas été trouvé en défaut.
Walden, p.98
Je ne me suis jamais senti solitaire, ou le moins du monde accablé par un sentiment de solitude, sauf une fois, et c'était quelques semaines après que je fusse arrivé dans les bois, lorsque, pendant une heure, je craignis que le proche voisinage de l'homme ne fût essentiel à une vie saine et sereine. Etre seul était quelque chose de déplaisant. Mais j'étais en même temps conscient d'une légère folie de mon humeur et il me semblait prévoir ma guérison. Au lieu d'une douce pluie, tandis que ces pensée prévalaient, subitement je fus sensible à cette agréable et bienfaisante compagnie dans la Nature, dans le crépitement même des gouttes d'eau, en chaque son et en chaque vue autour de ma maison, une bienveillance infinie et inexplicable comme une atmosphère qui me soutenait tout à coup, rendant insignifiants les avantages imaginaires d'un voisinage humain, et je n'y ai plus jamais pensé depuis. Chaque petite aiguille de pin se dilatait, se gonflait avec sympathie et me secondait. J'étais si clairement rendu conscient de la présence de quelque chose d'apparenté à moi, même dans des scènes que nous avons coutume d'appeler mornes et sauvages, et aussi que le plus proche de moi par le sang et le plus humain n'était pas une personne ni un villageois, que je pensais qu’aucun endroit ne pourrait jamais me paraître étranger.
Walden, pp.115-116
Aussi intense que soit mon expérience, je suis conscient de la présence et de la critique d'une partie de moi, qui, pour ainsi dire, n'est pas une partie de moi, mais un spectateur, ne prenant part à aucune expérience, mais en prenant note, et ce n'est pas plus moi que ce n'est vous. Quand la représentation - qui peut être la tragédie - de la vie est terminée, le spectateur s'en va. C'est une sorte de fiction, rien qu'un effet de l'imagination, tant qu'il était concerné.
Walden, p. 118
Extraits de : Henry David Thorean, Walden ou la vie dans les bois, Ed. Gallimard, 1990.
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Voir aussi : Gilles Farcet, Henri Thoreau, L'éveillé du Nouveau Monde, Ed. Albin Michel, 1990.
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Nulle richesse ne peut acheter le temps, la liberté et l'indépendance requis, qui sont essentiels à cette profession. Cela n'advient que par la grâce de Dieu. Une dérogation directe des cieux est indispensable pour devenir marcheur. Il faut être né dans la familles des marcheurs. Ambulator nascitur, non fit (On naît marcheur, on ne le devient pas).
De la marche, p. 10
Je crois que je ne pourrais entretenir ma santé physique et intellectuelle si je ne passais pas au moins quatre heures par jour - et souvent davantage - à me balader dans les bois, par les collines et les champs, totalement libre de toute contingence matérielle.
De la marche, p. 11
De la marche, p. 49
Nous abritons un sauvage en nous, et nous portons peut-être un nom sauvage enregistré quelque part comme le nôtre. Je vois bien que mon voisin, qui porte l'épithète familière William ou Edwin, l'enlève en même temps que sa veste. Il n'adhère pas à lui quand il est endormi, en colère ou bien animé par la passion ou l'inspiration. Il me semble entendre prononcé par certains de ses pairs, dans ces occasions, son nom sauvage originel dans une langue rugueuse ou bien encore mélodieuses.
Voici notre immense mère hurlante, la nature qui se déploie tout autour de nous, avec autant de beauté et d'affection pour ses enfants que le léopard, (...)
De la marche p. 54
Ma soif de savoir est intermittente, mais mon envie de baigner ma tête dans des atmosphères inconnues à mes pieds est pérenne et constante. Le plus haut point que nous puissions atteindre n'est pas le savoir, mais la sympathie avec l'intelligence. Je ne sache pas que ce savoir se limite à quelque chose d'aussi défini qu'une surprise grande et nouvelle consistant en la soudaine révélation de l'insuffisance de tout ce que nous appelions savoir auparavant, la découverte qu'il y a plus de chose aux cieux et sur terre qu'on en a rêvé dans notre philosophie. C'est l'illumination de la brume par le soleil. L'homme ne peut accéder à un savoir plus élevé que celui-ci, pas plus qu'il ne peut regarder sereinement et sans impunité la face du soleil.
De la marche p. 57
Par-dessus tout, nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas vivre dans le présent. Il est béni entre tous les mortels, celui qui ne perd aucun instant de la vie à se remémorer le passé. A moins que notre philosophie n'entende le coq chanter dans chaque cour de ferme dans notre horizon, elle est dépassée. Ce bruit nous rappelle d'ordinaire que l'emploi et les habitudes de notre pensée deviennent obsolètes. Sa philosophie indique une époque plus récente que la nôtre. Ce qu'il suggère ne se trouve ni chez Platon ni dans le Nouveau Testament. C'est un testament encore plus nouveau, l’Évangile selon l'instant présent. Il n'est pas resté en arrière, il s'est levé tôt et a conservé son avance, pour être là où il est, au bon moment, à l’extrême pointe du temps.
De la marche, p. 65
Nous marchions dans une lumière si pure et si brillante, dorant l'herbe et les feuilles blanchies, d'une clarté si douce et si sereine, que je pensais que je ne m'étais jamais baigné dans un flot aussi doré, sans une ride ni un murmure. Le versant ouest de chaque bois et chaque butte de terre chatoyaient comme l'orée de l’Élysée et le soleil dans nos dos ressemblait à un gentil berger nous ramenant chez nous le soir.
Ainsi allons-nous vers la Terre Sainte, jusqu'au jour où le soleil brillera avec plus d'éclat qu'il ne l'a jamais fait, où il brillera peut-être dans nos esprits et nos coeurs, où il illuminera notre existence pour nous tirer de notre sommeil, d'une grande lumière, aussi chaude, sereine et dorée que celle qui baigne le rivage en automne.
De la marche, pp. 67-68
Extraits de : Henry David Thoreau, De la Marche, Ed. Mille et une nuit, 2003
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J'accepte de toute coeur la devise suivante : "Le meilleur gouvernement est celui qui gouverne le moins" et j'aimerais la voir suivie d'effet plus rapidement et plus systématiquement. Exécutée, elle se résume à ceci, que je crois aussi: "le meilleur gouvernement est celui qui ne gouverne pas du tout"; et quand les hommes y seront prêts, tel sera le genre de gouvernement qu'ils auront. Un gouvernement, au mieux, n'est qu'un expédient; mais la plupart d'entre eux sont d'habitude, et tous les gouvernements sont quelquefois nuisibles. Les mêmes objections qu'on a opposées à une armée permanente - elles sont nombreuses et de poids et méritent de l'emporte - peuvent en dernier ressort être opposées à un gouvernement permanent. L'armée de métier n'est qu'un bras du gouvernement de métier. Ce dernier lui-même, qui n'est que le moyen choisi par un peuple pour exécuter sa volonté, est également susceptible d'être trompé et perverti avant que le peuple puisse agir par son truchement. (...)
Mais pour parler pratiquement et en citoyen, à la différence de ceux qui se baptisent antigouvernementaux, je réclame, non une absence immédiate de gouvernement, mais immédiatement un meilleur gouvernement. Que chacun publie quel serait le genre de gouvernement qu'il respecterait et nous aurions déjà fait un pas vers sa réalisation. (...)
Le citoyen doit-il un seul instant abandonner sa conscience au législateur ? Pourquoi, alors, chacun aurait-il une conscience ? Je pense que nous devons d'abord être des hommes, des sujets ensuite. Le respect de la loi vient après celui du droit. La seule obligation que j'aie le droit d'adopter, c'est d'agir à tout moment selon ce qui me parait juste. (...)
Extrait de : Henry David Thoreau, La désobéissance civile, Ed. Mille et une nuit, 1996.
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Les Nouveaux chemins de la connaissance par Adèle Van Reeth, Philippe Petit
Le site de l'émission
La Solitude 4/4: Walden, Henry David Thoreau. 20.10.2011
avec Michel Granger, professeur émérite de littérature américaine à l'Université Lyon II 1
avec Michel Granger, professeur émérite de littérature américaine à l'Université Lyon II 1
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