Suite de la page : Le Cogito Shadok
Précédemment nous avons vu qu'il ne fallait surtout pas mettre autre chose dans la pompe du Cogito que de la pensée cartésienne. Voyons maintenant le fonctionnement de la pompe elle-même.
Descartes nous donne trois formulations de ce qu'il est convenu d'appeler le Cogito. La première, en français, dans le Discours de la méthode (1636), la deuxième, en latin, dans les Méditations métaphysiques (1641) et la troisième, aussi en latin, dans les Principes de la philosophie (1644) :
(1) Je pense, donc je suis
(2) Ego sum, ego existo (Je suis, j'existe)
(3) Ego cogito, ego sum (Je pense, je suis)
(Pour leur contexte voir la page : René Descartes)
A quoi nous voyons que "Je pense, donc je suis" (1) peut se lire sans le "donc" (3) et même sans le "Je pense" (2). Le Cogito de Descartes n'est donc pas une déduction par quoi nous concluons l'existence (du sujet pensant) à partir du constat de la pensée (chez ce même sujet). Le "Je suis" se donne dans une simple intuition ou "inspection de l'esprit" - selon son expression dans sa Réponse aux secondes objections (1641).
(Idem : René Descartes).
Bonne nouvelle : non seulement la pompe à Cogito délivre du "Je suis" sans même avoir besoin de pomper (au sens de raisonner), mais aussi du "Je pense", car elle fonctionne dans les deux sens. En effet nous ne sommes jamais que des "choses qui pensent".
Nous pouvons donc compléter les formulations de Descartes, en posant une double implication, ou une équivalence :
(1a) Je pense, donc je suis (pensant)
(1b) Je suis (pensant), donc je pense
Les contrapositions du conditionnel :
(2a) Je ne suis pas (pensant), donc je ne pense pas
(2b) Je ne pense pas, donc je ne suis pas (pensant)
L'équivalence :
(1c) Je pense <-> Je suis (pensant)->
En résumé, le Cogito n'est pas un raisonnement mais une intuition ou une "percée" (selon le mot de Stephen Jourdain) par laquelle nous accédons à une conscience sans limite. Tout comme chez Jourdain :
"Il ne peut rien y avoir en moi, c'est-à-dire dans mon esprit, dont je ne sois conscient". (Descartes, Lettre, décembre 1640)
Le philosophe fait, ou ferait, donc l'expérience d'une conscience qui accompagne chaque instant de sa vie. Avant même qu'elle ne se scinde (ou le paraisse) d'avec son objet, puisque nous avons une identité entre le penser et l'être (ce qui met Descartes sur les traces de Parménide : "Etre et penser sont la même chose", fragment III - quitte ensuite à s'en éloigner grandement).
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