mardi 21 mars 2017

L’OTAN menace notre sécurité

MAJ de la page : Daniele Ganser

"La paix n'est pas l'absence de guerre, c'est une vertu, un état d'esprit, une volonté de bienveillance, de confiance, de justice". Spinoza

L’OTAN menace notre sécurité
Par Daniele Ganser, historien, Gabriel Galice, président du GIPRI, Hans von Sponeck, ancien Secrétaire général adjoint de l'ONU, le 19 mars 2017 -  GIPRI (Institut International de Recherche pour la Paix à Genève)

 
L’OTAN masse des troupes et des armes aux marches de la Russie. Nous tenons à exprimer notre inquiétude devant la propagande qui déforme la réalité des menaces qui pèsent sur la paix. Cette propagande insidieuse fabrique des ennemis imaginaires pour justifier le surdéveloppement de dépenses militaires, des conquêtes de territoires ou de « parts de marché », des prises de contrôle d’approvisionnement énergétique et pour corroder la démocratie.
Non, la Russie n’est pas l’agresseur et ne menace aucunement les Pays-Baltes, la Pologne ou la Suède. A l’implosion de l’URSS et du Pacte de Varsovie, la bévue stratégique des Etats-Unis et de leurs alliés a été de ne pas refonder l’architecture internationale de sécurité. Oubliée la Charte de Paris (1990) qui promettait la paix à l’Europe.

Dans son livre, Le Grand échiquier – l’Amérique et le reste du monde, Zbigniew Brezinski posait en 1997 la question de savoir s’il fallait intégrer la Russie dans l’OTAN et dans l’UE. Il finissait par privilégier la sécurité tactique sur la paix stratégique, non sans prévoir que cela déclencherait des réactions russes. Il préconisait l’intégration de l’Ukraine, l’un des cinq « pivots géopolitiques » de l’Eurasie, dans l’OTAN et dans l’UE. En 2010, Charles A Kupchan, Professeur à la Georgetown University, proposait d’intégrer les Russes dans l’OTAN.

Oubliant la promesse des USA aux Russes, lors de la réunification allemande, de ne pas étendre l’OTAN à l’Est, les Occidentaux n’ont eu de cesse de repousser, d’encercler et d’humilier les dirigeants russes successifs. Quoi que nous pensions du régime russe, le principal défaut de Vladimir Poutine (et de bien d’autres pays du monde), aux yeux des Occidentaux, est de cesser d’acquiescer aux volontés hégémoniques occidentales.
Après l’illégale guerre d’Irak, l’extension du nombre de pays membres de l’OTAN et l’expansion tout azimut de son aire d’action, le renversement du régime de Kadhafi en Libye, puis le coup d’Etat en Ukraine, auront été les lignes rouges déclenchant les ripostes russe et chinoise qui avaient déjà constitué l’Organisation de Coopération de Shanghai après le premier élargissement de l’OTAN. Il aura fallu les opérations en Libye et en Ukraine et l’appui de l’occident (dès 2006 selon Time Magazine du 19 décembre 2006) aux « rebelles » résolus à renverser le régime syrien, pour que les Russes soutiennent l’autonomie de la Crimée et interviennent militairement en Syrie.

Tandis qu’il est avéré que la CIA a surveillé l’élection présidentielle française de 2012, que la NSA, espionne partout entreprises, organisations et particuliers, la mode est d’imputer aux dirigeants russes une ingérence directe dans les élections américaines, françaises, allemandes.

Les pays européens renforcent leur alignement sur la politique étrangère des USA, embargo contre la Russie inclusivement. Le Président François Hollande parachève la réintégration de la France dans le commandement militaire de l’OTAN, entamée par Nicolas Sarkozy.

Et les pays neutres ? La Suède rétablit la conscription, ce au moment de la diffusion sur Arte d’un reportage édifiant intitulé « Guerre froide dans le Grand Nord » .

L’Etat-major suédois manœuvrait naguère de concert avec l’OTAN et les Etats-Unis, ce à l’insu du gouvernement d’Olof Palme qui préconisait la détente avec Moscou…et qui en mourut assassiné.

L’adhésion de la Suisse au Partnership for Peace (ou PfP) de l’OTAN vaut-elle neutralité ? Daniele Ganser cite William Perry : la différence entre l’adhésion pleine et entière à L’OTAN et le PfP doit tendre à devenir plus ténue qu’une feuille de papier (Illegale Kriege, p.28) Des avions suisses survolent la Baltique aux côtés de chasseurs de l’OTAN.

Non, l’OTAN, devenue une alliance offensive, n’assure pas notre sécurité. Misons sur l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), dialoguons avec la Russie et mettons en œuvre les articles 46 et 47 de la Charte de l’ONU, stipulant un comité d’état-major auprès du Conseil de Sécurité.

Gabriel Galice, Président du GIPRI, auteur de Lettres helvètes 2010-2014

Daniele Ganser, historien et irénologue, auteur de Les armées secrètes de l’OTAN et Illegale Kriege – Wie die NATO-Länder die UNO sabotieren

Hans von Sponeck, ancien Secrétaire général adjoint de l’ONU

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Sicile base d’attaque USA/Otan
Par Manlio Dinucci, le 21 mars 2017 - Mondialisation

Du 12 au 24 mars se déroule, en face des côtes méditerranéennes de la Sicile, l’exercice naval Otan Dynamic Manta auquel participent les marines militaires des Etats-Unis, Canada, Italie, France, Espagne, Grèce et Turquie. Le fer de lance des 16 unités navales engagées est le sous-marin nucléaire étasunien d’attaque rapide California SSN-781. Armé d’une centaine de torpilles et de presque 150 missiles de croisière pour attaque à objectifs terrestres, il fait partie de la Task Force 69, responsable des opérations USA de guerre sous-marine en Europe et Afrique.

Outre le sous-marin d’attaque, la U.S. Navy participe à l’exercice avec le destroyer lance-missiles Porter et des avions de patrouille maritime, avec la station Muos de Niscemi et la base aéronavale de Sigonella.


 Le Dynamic Manta 2017 se déroule dans l’aire du Commandement de la force conjointe alliée (dont le quartier-général est à Lago Patria, Naples), sous les ordres de l’amirale étasunienne Michelle Howard, qui commande en même temps les Forces navales étasuniennes en Europe et les Forces navales étasuniennes pour l’Afrique. L’Italie, en plus de participer à l’exercice avec ses propres unités, joue ce que le contre-amiral De Felice, commandant de MariSicilia, définit comme un « rôle fondamental » parce qu’elle fournit tout le support logistique. Particulièrement importante est Augusta (Syracuse), « point stratégique en tant qu’elle fournit les ravitaillements de combustible, de munitions et de support pour les unités navales qui viennent même de pays au-delà de l’Atlantique ». Essentiel aussi le port de Catane, disponible pour accueillir au moins neuf navires de guerre.

Simultanément, sont en cours depuis février les exercices à balles réelles de forces spéciales étasuniennes dans le polygone de tir maritime de Pachino (Syracuse). Cette zone a été officiellement concédée à l’ «usage exclusif des Etats-Unis », sur la base d’un accord souscrit avec le Pentagone en avril 2006, pendant le gouvernement Berlusconi III.


Dans ce même accord ont été concédées aux Etats-Unis en usage exclusif une zone à l’intérieur de la base de Sigonella, pour la station aéronavale, et une à Niscemi, pour le centre de transmissions radio navales et la station terrestre successive du Muos. Dans ces zones, a-t-on spécifié en toutes lettres, « le Commandant USA a le plein commandement militaire sur le personnel, les équipements et les opérations étasuniennes », avec le seul engagement de « notifier de façon anticipée au Commandant italien toutes les activités étasuniennes significatives ».


Concernant les dépenses de la station aéronavale étasunienne, sur la base de cet accord est financée exclusivement par les Etats-Unis la Nas I, la zone administrative et la zone vie, tandis que la Nas II, celle des services opérationnels et donc la plus coûteuse, est financée par l’Otan, c’est-à-dire aussi par l’Italie.

La situation de la Sicile, emblématique de la situation nationale, devrait être un des thèmes centraux de la mobilisation du 25 mars, jour suivant la conclusion du Dynamic Manta. On ne peut pas penser se libérer des pouvoirs représentés par l’Union européenne sans se libérer de la domination et de l’influence que les USA exercent sur l’Europe directement et par l’intermédiaire de l’Otan. Aujourd’hui, 22 des 28 pays de l’Ue, avec plus de 90% de la population de l’Union, font partie de l’Otan, reconnue par l’Ue comme « fondement de la défense collective ».

L’Otan sous commandement étasunien est en train de préparer d’autres guerres, après celles de Yougoslavie 1999, Afghanistan 2001, Irak 2003, Libye 2011, Syrie depuis 2011, Ukraine depuis 2014. C’est ce que confirme le Dynamic Manta, qui a certainement testé aussi les capacités d’attaque nucléaire dans l’exercice de guerre sous-marine. Nouvelle restée immergée dans les mailles des grands réseaux d’ « information ».

 Manlio Dinucci

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