mardi 16 mai 2017

Saint McRon

MAJ de la page : Macron 



Lire aussi (plus bas dans la page) :
- Kennedy arrive ! (Mais les trottoirs de Paris sont vides), par Daniel Schneiderman
- L’intronisation d’Emmanuel Macron tourne à l’extase chez les commentateurs télé, par Xavier Frison
- Macron, le président du vieux monde, par Hervé Kempf


Dans la «machine» à fabriquer Macron
Richard Werly,le 9 mai 2017 - Le Temps

En autorisant plusieurs réalisateurs à filmer les coulisses de la campagne présidentielle, le nouveau président français a soigné sa légende. Une opération télévisuelle réglée au millimètre

Esprits critiques, s’abstenir: diffusés lundi soir sur TF1 et France 3, les deux premiers documentaires télévisés sur la victoire présidentielle d’Emmanuel Macron ont commencé à tisser la légende du futur chef de l’Etat français.

Le Temps n’a pas pu prendre connaissance du troisième reportage réalisé «dans les coulisses», diffusé jeudi soir dans Envoyé spécial sur France 2. Mais au vu des images utilisées et des séquences choisies par les réalisateurs de TF1 et France 3, le ton paraît donné: un «miracle» Macron a déferlé sur la France. Ce, grâce à une équipe jeune, incroyablement dévouée, et au talent hors pair de l’ancien ministre de l’Economie, présenté comme un héros moderne capable de passer sans transition de son rôle de beau-père aimant, dans le jardin de sa maison du Touquet pour la collecte des œufs de Pâques avec les petits-enfants de son épouse Brigitte, à sa marche solitaire, quasi royale, dans l’enceinte du Louvre le soir de sa victoire, dimanche 7 mai.

Autour de l’homme

La vérité, jamais expliquée dans ces documentaires riches de moments inédits filmés en marge des meetings et au QG d’En marche!, est que la campagne d’Emmanuel Macron a été conçue comme aucune autre. En apparence improvisée, elle a d’emblée été scénarisée. «Notre force est notre point de départ: nous avons tout accroché autour de l’homme Macron, alors que ses adversaires, soutenus par les partis politiques traditionnels, sont restés enfermés dans leur programme», concédait dimanche au Temps, dans la tente réservée à la presse de l’esplanade du Louvre, un des collaborateurs du président sur le point d’être élu. Plus que la promotion d’un parcours, celle d’une aventure hors norme, avec ses personnages calés dans leur rôle: les communicants qui copinent avec les journalistes, les conseillers politiques qui épient les concurrents, les caciques (comme Gérard Collomb, le maire de Lyon) qui sont là pour redonner confiance et apprendre à ce candidat jamais élu à «faire président»…

Lorsqu’en 2007, Nicolas Sarkozy avait défié l’ordre chiraquien en s’appuyant sur sa «firme» de conseillers tels que Rachida Dati, Brice Hortefeux ou Franck Louvrier, la TV française, déjà, avait mis en scène sa volonté de rupture avec le style du président vieillissant, terré à l’Elysée. Bis repetita dix ans plus tard: le chef de l’Etat sortant qui a pourtant ouvert le chemin politique à Emmanuel Macron en le prenant pour conseiller, puis pour ministre… est absent des films produits sur l’ascension de son ancien collaborateur. Tout est fait pour démontrer que le candidat s’est fait tout seul et contre tous, même si France 3 ressort des images d’archives le montrant lors de son passage à la Commission Attali sur l’économie française en 2007, ou interroge le banquier François Henrot, son employeur chez Rothschild entre 2008 et 2012.

Autre manque sidérant: celui d’interlocuteurs s’interrogeant sur ce parcours éclair, ou sur les soutiens financiers de la «Macronie» naissante. Aucun ne prend la parole à l’écran alors que la presse écrite et un livre ont publiquement questionné la façon dont Emmanuel Macron a, durant son passage réussi au Ministère de l’économie (de 2014 à 2016), installé l’idée de sa candidature. Mieux: lorsqu’une polémique trouve enfin place dans le documentaire de TF1 – autour des propos déformés d’Emmanuel Macron sur la Manif pour tous et le mariage homosexuel – elle concerne Les Inrocks, le magazine détenu par… le banquier de Lazard Matthieu Pigasse (également coactionnaire du Monde), connu pour son inimitié avec le président élu.

Comme pour Obama

La machine à fabriquer Macron est à sens unique. Logique. Tout est fait pour valoriser son champion. Mais pourquoi toutes les images réalisées «en coulisses» le présentent-elles sous un jour favorable, hormis peut-être le «coaching» constant de son épouse Brigitte? Où sont les doutes, les faux pas, les inévitables moments de tension dans le couple Macron et dans l’équipe? Car il y en eut. «Mon impression est qu’il existe en France une fascination télévisuelle pour le couple Macron comme nous l’avons vécu avec les Obama. La TV française veut son couple de légende. Regardez les références à Kennedy…» expliquait à l’AFP en 2016 Melissa Bell, la correspondante de CNN en France. L’arrivée à En marche! de Laurence Haïm, ancienne correspondante de Canal + aux Etats-Unis et intervieweuse… d’Obama, est donc logique: «La jeunesse, la disruption, l’empathie naturelle, le côté intello… cela ne vous rappelle rien?» ironise une ex-communicante de François Fillon.

Le fait le plus saillant, révélé par la profusion de ces documentaires (trois équipes de télé au moins autorisées à suivre les coulisses de la campagne), est surtout la mutation télévisuelle de cette campagne présidentielle française. Caméras et médias sociaux (nourris de clips vidéo choisis) ont, pour la première fois, régné en maître. «L’ironie suprême est que Macron, homme de littérature féru de philosophie, croit avant tout en politique à l’image parce qu’elle permet mieux d’entretenir l’ambiguïté. Nos confrontations avaient toujours lieu lorsque je lui mettais le programme écrit du candidat Hollande sous les yeux», se souvient l’ancien conseiller présidentiel Aquilino Morelle, auteur de L’Abdication (Ed. Grasset).

Le président élu, qui demande à relire tous les entretiens qu’il accorde – une pratique généralisée en France –, ne s’est ainsi pas privé durant la campagne de sermonner la presse écrite alors qu’il évitait les algarades (filmées) avec ceux de l’audiovisuel. «Macron aime les livres, mais beaucoup moins les journaux. A la différence de Hollande qui les révère…» risque un de ses anciens collègues ministres.

Bien après la victoire de Nicolas Sarkozy, et alors que son mandat présidentiel n’était pas achevéx, un long-métrage de fiction présenté à Cannes, La Conquête, avait en 2011 raconté sa victoire de 2007. Le locataire de l’Elysée avait collaboré, donnant détails et anecdotes. Qui jouera, demain, le rôle d’Emmanuel et de Brigitte Macron dans une série Netflix ?



Exclu : le 1er jour d'Emmanuel Macron à l'Elysée (Canal+, 12 mai 2017)

* * *

Kennedy arrive ! (Mais les trottoirs de Paris sont vides)
Par Daniel Schneidermann, le 15 mai 2017 - Arrêt sur image


Et en plus, il est plus fort que la pluie.

"Quand Hollande était sous la pluie, on parlait de la pluie. Macron sous la pluie, on parle de Macron" constate un des commentateurs de la journée multi-chaînes de la passation de pouvoir - on ne sait plus lequel, tant elles rivalisent dans la macronmania.

"Maintenant, être président, c'est savoir bien prendre la pluie", renchérit Ruth Elkrief, dans une de ces magnifiques envolées performatives du meubleur de direct. Et de tartiner sur la perfection des mouvements de maxillaire, l'enrobé des accolades, le savant contraste entre démarche hiératique, et montée quatre à quatre des escaliers "à la Chaban-Delmas" (car le commentateur politique, même s'il n'était pas né, "sait" que Jacques Chaban-Delmas, Premier ministre de Pompidou, montait les escaliers quatre à quatre).

Si l'on n'a pas entendu vingt fois "écrouelles", tout au long de la journée, on ne l'a pas entendu une seule fois. En revanche, pas une seule occurence des "deux corps du Roi", mais je n'ai pas pu tout entendre.

Dualité du commentateur qui feint de ne pas voir la pluie, et s'ébahit dans la foulée de sa propre capacité miraculeuse à ne pas voir la pluie.

Trottoirs vides de Paris

"Il a, entre guillemets, de la gueule, s'extasie sur France 2 l'expert militaire Pierre Servent. Les militaires y sont sensibles. Ce n'était pas le cas des deux derniers présidents" (car l'expert militaire "sait" que le militaire est sensible à "la gueule"). Pour ne rien dire de Daech !

On imagine Daech désormais terré, devant "la gueule" du nouveau président, debout dans son "command car" couleur camouflage. Quelle image : attention Daech, Kennedy arrive ! Mais l'envolée performative a ses limites. Au-delà des véhicules militaires et du parc automobile, des tenues chamarrées des "personnages importants de l'Etat", des rétrospectives Mitterrand-Sarkozy-Hollande, de tout cet appareillage à faire "aimer" l'Etat en ses incarnations successives, l'image la plus obstinée de la journée, ce furent les trottoirs vides de Paris.

Bruine ou éclaircies, ils restèrent désespérément vides. Vide la place Charles de Gaulle. Vide la place de l'Hôtel de ville, que montraient les impitoyables plans aériens. Mais la machine semblait ne pas les voir, ces trottoirs vides, qui criaient pourtant l'indifférence populaire à cette journée de Sacre. Toute une machine tournait à vide, et se voyait tourner à vide, car la machine a des yeux, et ces yeux voyaient comme les nôtres ces trottoirs vides. C'est un vrai talent, toute une journée, de parvenir à ne pas voir l'immanquable éléphant dans le couloir.

* * *

L'intronisation d'Emmanuel Macron tourne à l'extase chez les commentateurs télé
Par Xavier Frison, le 14 mai 2017 - Marianne


À l'occasion de la passation de pouvoir entre François Hollande et Emmanuel Macron, certains journalistes ont viré "gagas". Exemple avec France 2 et BFMTV.
Une partie de la presse avait déjà tressé des lauriers en or massif à Emmanuel Macron, au soir de sa victoire du 7 mai. Pour son investiture au cours de la passation de pouvoir avec François Hollande ce 14 mai, certaines chaînes de télévision n'ont pas moins versé dans la flagornerie.

En ce dimanche matin, le service public était particulièrement en forme, à l'heure de semer sur le parcours du nouveau président mille qualificatifs plus élogieux les uns que les autres. Compilés par certains twittos, dont le journaliste Samuel Gontier, les saillies des commentateurs de France 2 ne laissent guère planer de doutes sur la cote d'amour d'Emmanuel Macron auprès de ces derniers. Florilège.

Laurent Delahousse orchestrait "ces instants républicains", avec une myriade d'envoyés spéciaux dans les rues de Paris. La seule remontée des marches en courant du nouveau président suscite l'admiration : "Il a monté les marches quatre à quatre, à une vitesse incroyable. Ça rappelle Jacques Chaban-Delmas", apprécie le journaliste Franck Ferrand.

Tandis que les figures obligées de la passation de pouvoir se déroulent sans surprise particulière, le plateau de France 2 est en ébullition : "C’est l’investiture la plus romanesque de la Ve République", "On est véritablement dans le roman, et même, osons le mot, dans l’épopée". Rien que ça. Et quand Laurent Delahousse y va de sa description du nouveau président, voilà le résultat : "Ce visage, ce masque d’Emmanuel Macron, cette gravité qui arrive".

Le journaliste vedette de France 2 peut bien feindre de demander si "les Français avaient besoin d’être réassurés sur la présidentialisation d’Emmanuel Macron ?", pour lui, il n'y a aucun doute. D'ailleurs, quand Emmanuel Macron prend une femme en larmes dans ses bras, "c’est le protecteur de la Nation" qui se présente à nous. "Des personnes se sont réfugiées dans ses bras. Autrefois, les rois touchaient les écrouelles le lendemain du sacre, il y a un peu de ça", lâche un intervenant, dans une comparaison tout en simplicité.

Des personnes se sont réfugiées dans ses bras. Autrefois, les rois touchaient les écrouelles le lendemain du sacre, il y a un peu de ça.

Invité sur le plateau, l'ancien patron du Monde Eric Fottorino voit lui en Emmanuel Macron "un alliage". Et pas de la camelote, s'il vous plaît : "Les aciéries font des métaux spéciaux. Il est d’un autre métal." Plus fort, plus rare, plus indestructible, cela va de soi.

Serge Moati, lui, est marqué au fer par Gérard Collomb, incapable de retenir ses larmes au moment de serrer la main de celui en qui il a cru avant bien d'autres : "L’image de Gérard Collomb bouleversé, ça me fait penser à Mitterrand embrassant Mendès-France", estime le journaliste.

Et puis, le type a "de la gueule", selon un autre intervenant sur le plateau de France 2 ce dimanche matin. D'ailleurs, Nathalie Saint-Cricq ne se sent "pas autorisée en tant que femme à dire qu’il a le physique de l’emploi", renvoyant cette responsabilité incongrue à ses collègues masculins, mais il se passe clairement quelque chose dans le coeur de la patronne du service politique de la chaîne.

Lire aussi (sur Marianne) : Ces médias qui ont déjà béatifié Emmanuel Macron, par Jack Dion, le 10 mai 2017

"Il y a cinq ans, on parlait de la pluie, là on parle d’Emmanuel Macron. Quelque chose a changé", entend-on encore sur le plateau.

Au moment où Emmanuel Macron revient de son petit tour de voiture à l'Élysée, costume détrempé, en refusant le parapluie tendu par un membre du personnel, c'est l'éclat de rire charmé sur le plateau de France 2. Même rigolade quelques secondes plus tard, quand on entend Emmanuel Macron dire sur le perron "Je vais me changer, je pense". Les commentateurs s'extasient devant tant d'autodérision.

Sur BFMTV, on avait choisi un consultant bien particulier en la personne de Mounir Mahjoubi, candidat La République en marche pour les législatives et proche d'Emmanuel Macron. Une façon d'éviter les remarques de pisse-froid en ce jour de gloire pour le nouvel arrivant à l'Élysée. En complément, un curieux dispositif permettait d'entendre Ruth Elkrief au téléphone, dans une liaison qui donnait l'impression que l'éditorialiste de BFMTV avait été envoyée à Bagdad. Elle s'exprimait en fait de la salle de presse de l'Élysée, mezza voce pour ne pas déranger les confrères. Ce qui ne l'a pas empêché d'en faire des tonnes : "C'est la marque d'Emmanuel Macron, s'extasie Ruth Elkrief après le premier discours du nouveau président. Tout en rendant hommage à tous les présidents qui l'ont précédé (…) lui, il veut trancher. C'est le personnage Macron qui parle, sa jeunesse, son énergie, sa volonté de rendre les choses différentes".

C'est le personnage Macron qui parle, sa jeunesse, son énergie, sa volonté de rendre les choses différentes. Ruth Elkrief
[Voir aussi : Ruth Elkrief fait un chek à Emmanuel Macron sur BFMTV]

Ludovic Vigogne, journaliste à l'Opinion, estime pour sa part que Macron a la baraka : "On voit que l'alignement des planètes continue pour Emmanuel Macron : aujourd'hui il fait beau, et en plus la passation d'Emmanuel Macron tombe un dimanche. C'est génial, ça permet une audience maximale, tous les Français peuvent être devant leur télé et assister aux premiers pas d'Emmanuel Macron. Et puis ça va permettre peut-être à plus de badauds d'être sur les Champs-Élysées".

Le fait de ne pas encore connaître le nom de celui qui sera le Premier ministre d’Emmanuel Macron, annoncé le lendemain ? Sur le plateau de BFMTV, on s'enflamme : "On est vraiment dans l'invention d'une politique, la redéfinition d'une fonction en direct, c'est très inédit."

Vers 14h, le journaliste en plateau sur BFMTV pouvait lâcher, en guise de résumé, à l'évocation d'Emmanuel Macron remontant les Champs Élysées sur un véhicule de l'armée : "On retiendra quand même cette image spectaculaire d'Emmanuel Macron sur cet engin militaire". On retiendra aussi sans doute ces envolées des commentateurs, tout aussi spectaculaires.

* * *


"Macron, produit jamais testé mais recommandé par les plus grandes banques" (RTS, 2017)


Macron, le président du vieux monde
Par Hervé Kempf, le 9 mai 2017 - Reporterre

Sous les habits neufs de M. Macron, le néo-libéralisme continue sans changer. Marginalisant l’écologie, et oubliant l’inégalité sociale.

Emmanuel Macron est un personnage remarquable : on ne gravit pas aussi rapidement les échelons de la pyramide du pouvoir si l’on n’est pas doté de qualités exceptionnelles. Et même si la chance a largement joué son rôle - la faillite de François Fillon, la déliquescence plus rapide que prévue du Parti socialiste -, la capacité à s’engouffrer dans les opportunités est un talent que tous n’ont pas. Il ne fait pas de doute que cette énergie ascensionnelle va continuer à se déployer dans les premiers mois de la nouvelle présidence.

Il reste que M. Macron n’a pas gravi la montagne à la force de son seul poignet. Massivement soutenu par tous les médias des dominants (faut-il encore rappeler que la "presse" est aujourd’hui l’instrument des Arnault, Bolloré, Bouygues, Dassault, Drahi, Lagardère, Niel, Pigasse, Pinault... ?), il n’a pas gagné à la loyale. Plutôt qu’un duel Macron-Le Pen, on aurait pu assister à un duel Macron-Mélenchon bien plus stimulant si la presse oligarchique n’avait pas pilonné dans la dernière ligne droite le candidat de la France insoumise. Mais l’oligarchie avait bien sûr choisi son camp. Ce serait Fillon ou Macron. Fillon tombant à l’eau, ce fut Macron.

Homme remarquable, appliquant les méthodes entrepreneuriales en vogue - En marche a appliqué tous les outils marketing et a fonctionné en mode "start-up", comme l’a raconté Mediapart -, M. Macron n’en est pas moins porteur des idées du vieux monde. Le vieux monde ? Celui où l’on croit que la croissance reste le moteur de l’équilibre social, que la question écologique est secondaire, et qu’une société peut vivre sans désordre avec de fortes inégalités.

Pour grimper rapidement, M. Macron a adopté les idées de ses parrains. Ou étaient-ce les siennes ? Peu importe. Deux hommes en particulier l’ont propulsé vers les hautes sphères : Henry Hermand, millionnaire ayant fait fortune dans la construction de centres commerciaux dévoreurs de terres agricoles et propageant l’étalement urbain, et Jacques Attali, qui l’a recruté en 2007 dans sa "Commission pour la libération de la croissance". Le nom de cette commission créée par M. Sarkozy en disait tout. Parmi les prescriptions qui révélaient la pertinence de ses analyses, il y avait la libération accrue des règles du marché financier parisien, un an avant que n’éclate la grande crise financière... Mais l’oligarchie n’a cure de ses erreurs, et M. Attali continue à parader, tandis que ses poulains galopent dans les prairies du pouvoir. Et de l’argent, puisque M. Macron est passé par la banque Rotschild.

Béton, croissance et finances


Béton, croissance et finances, voilà donc le terreau idéologique sur lequel M. Macron s’est épanoui. Le nouveau président a déjà quatre ans d’expérience gouvernementale à son actif, à l’Elysée où il a conseillé François Hollande dans son orientation néo-libérale, puis au ministère de l’Economie.

Et la liste des actes ou intentions de M. Macron parle d’elle-même : travail le dimanche, facilitation de l’affichage publicitaire, permis de recherche de gaz de schiste, soutien au projet nucléaire d’Hinkley Point, autorisation de l’extraction de sable à Lannion, accord très favorable aux sociétés autoroutières, encouragement à l’exploitation minière en Guyane, amendement législatif sur les déchets nucléaires à Bure - l’écologie est le cadet des soucis du nouveau président.

Et les signaux qu’il a lancé ne sont pas très positifs : en matière d’agriculture, il veut « continuer le combat » de son « ami » Xavier Beulin, chantre de l’industrialisation agricole et de la compétitivité. Son programme d’investissement sur la transition écologique s’élève à un modeste 15 milliards d’euros sur cinq ans, moins, rappelait Thomas Porcher lors de notre Alter soirée électorale que le coût du projet nucléaire d’Hinkley Point en Angleterre. Quant à son entourage proche, il vient pour partie du monde du béton de son parrain Henry Hermand : avant de rejoindre En marche comme porte-parole, Benjamin Griveaux était chez Unibail Rodamco, grand promoteur de l’immobilier commercial (qui veut par exemple lancer Val Tolosa). « Le programme Macron fait saliver les promoteurs », signale La Lettre A, en laissant notamment prévoir l’abaissement des possibilités de recours contre les permis de construire.

Sur les autres domaines que l’environnement, n’attendez pas de progrès. Le mot « inégalité » n’apparait pas dans le programme de M. Macron, pas plus que celui d’évasion fiscale. Une nouvelle loi Travail sera imposée par ordonnances (une variante du 49.3, consistant à forcer la main au Parlement pour légiférer), et pour la « sécurité », on embauchera 10.000 policiers et gendarmes supplémentaires et l’on construira 15.000 places de prison.

Tout cela n’est guère encourageant. Le néo-libéralisme continue sous de nouveaux habits, l’écologie est marginalisée, le vieux monde perdure.

Mais il craque. Le niveau étonnamment élevé des votes blancs ou nuls au deuxième tour de l’élection présidentielle montre que de plus en plus de gens ne supportent plus le chantage qui nous est imposé entre le fascisme et le néo-libéralisme. L’assise de M. Macron n’est pas solide. Et autre tournant porteur d’espoir de cette campagne présidentielle, le camp de la gauche a solidement intégré l’écologie dans sa vision du monde et dans sa politique. Il reste à ce que ce camp s’unisse. Sinon les vieilles idées de M. Macron continueront à détruire le monde.




Don't walk

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...