Bruno Guigue, Chronique de l'impérialisme (2018)
Comme si une bonne fée s’employait, magnanime, à faire coïncider sa morale et ses intérêts, le prétendu monde libre revêt ses ambitions matérielles des oripeaux de la justice et du droit. C’est ainsi qu’il pratique le bombardement de pays étrangers à des fins « démocratiques », mais de préférence dans les contrées riches en hydrocarbures ou en ressources minières. Conjuguant la foi du charbonnier et la rapacité du capitaliste, il agit comme s’il pouvait convertir sa puissance économique en privilège moral. Le reste du monde n’est pas dupe, mais finalement peu importe. « Le monde libre » a toujours raison car il est du côté du Bien, et il ne risque pas la contradiction aussi longtemps qu’il est le plus fort — c’est du moins ce qu’il croit. La barbarie congénitale qu’il attribue aux autres est l’envers de son monopole autoproclamé de la civilisation. Auréolé du sacro-saint « droit d’ingérence », ce mariage réussi du sac de sable façon GI’s et du sac de riz façon Kouchner, l’Occident vassalisé par Washington s’imagine sans doute qu’il sauve le monde en le soumettant à l’impitoyable razzia exigée par les vautours de la finance et les multinationales de l’armement.
Quatrième de couverture
Bruno Guigue, Chronique de l'impérialisme, Ed. Delga, 2018
Bruno Guigue, La fable du libéralisme qui sauve le monde
LA PAUVRETÉ aurait été vaincue grâce aux recettes libérales ? Dans l’imagination des libéraux, certainement. Dans les faits, la réussite économique de la Chine doit davantage à la main de fer de l’État qu’à la main invisible du marché. Cette économie mixte pilotée par le parti communiste chinois a porté ses fruits. En trente ans, le PIB a été multiplié par 17 et 700 millions de personnes ont été extraites de la pauvreté. Comme la réduction de la pauvreté dans le monde dans la même période est due à la politique économique chinoise, il est cocasse d’attribuer au libéralisme les progrès récemment enregistrés par l’humanité.
Quatrième de couverture
Bruno Guigue, La fable du libéralisme qui sauve le monde, Ed. Delga, 2019
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Bill Gates affirme que la pauvreté est en baisse. Il ne pourrait pas se tromper davantage.
Par Jason Hickel, janvier 2019 - The Guardian / Le Partage (trad.)
Une série de graphiques approuvés par le groupe de Davos présente l’histoire de l’imposition d’une prolétarisation mondiale comme un triomphe néolibéral.
La semaine dernière, au moment où les dirigeants mondiaux et les élites marchandes arrivaient à Davos pour le Forum Économique Mondial, Bill Gates a tweeté une série de graphiques à ses 46 millions d’abonnés, suggérant que le monde allait de mieux de mieux. « C’est ma série de graphique préférée, a-t-il écrit. Beaucoup sous-estiment à quel point la vie s’est améliorée au cours des deux derniers siècles. »
Des six graphiques – développés par Max Roser de Our World in Data – le premier est celui qui a le plus attiré l’attention. Il montre que la proportion de personnes vivant dans la pauvreté a diminué, passant de 94% en 1820 à seulement 10% aujourd’hui. L’affirmation est simple et convaincante. Bill Gates n’est d’ailleurs pas le seul à l’avoir propagée. Ces chiffres ont été colportés par beaucoup au cours de l’année, de Steven Pinker à Nick Kristof en passant par une grande majorité du groupe de Davos, dans une tentative de prouver que l’extension mondiale du capitalisme de libre marché aurait bénéficié à tout le monde. Pinker et Gates sont même allés plus loin, affirmant que nous ne devrions pas nous plaindre de la montée des inégalités, puisque ces mêmes forces qui confèrent tant de richesses aux riches sont aussi en train d’éradiquer la pauvreté, ainsi que nous devrions le constater.
Un récit puissant. Et complètement faux.
Source (et suite) du texte : Le Partage
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