mardi 8 avril 2014

Raimundo Pániker Alemany ou Raimon Pannikar

Raimundo Pániker Alemany connu comme Raimon Panikkar est né le 3 novembre 1918 à Barcelone d'une mère catalane et catholique et d'un père hindou et mort le 26 août 2010 à Tavertet, près de Barcelone. Il était docteur en philosophie, en chimie et en théologie et reconnu comme un des plus grands spécialistes mondiaux du bouddhisme.
Ordonné prêtre en 1946, il enseigne en Inde à partir de 1954, puis, en 1966, devient professeur de philosophie orientale à Harvard et à Santa Barbara en Californie. Après sa retraite en 1987, il rejoint l'Espagne pour s'installer définitivement à Tavertet, petit village de montagne situé dans la province de Barcelone où il a créé la Fondation catalane Vivarium, chargée de promouvoir la tolérance le dialogue entre les religions à travers le monde. Il fut un des promoteurs du dialogue interreligieux hindu-chrétien. Il en avait fait sa recherche et son enseignement tant en Inde (où il put rencontrer le père Henri Le Saux avec qui il fit le pèlerinage aux sources du Gange) qu'aux États-Unis.
Auteur de plus 80 ouvrages et 900 articles sur la philosophie des sciences et les religions comparées, notamment "El concepto de la Naturaleza" (Le concept de la Nature), "La trinidad y las religiones del mundo" (La trinité et les religions du monde) et "El dialogo interreligioso" (Le dialogue interreligieux), Raimon Panikkar est titulaire, entre autres, du Prix National de Littérature et du Prix international d'essai Antonio Machado.
Source (et suite) du texte : wikipedia
Autres biographies : Raimon Pannikar


Bibliographie (en fr) :
- Le Christ et l’hindouisme, une présence cachée, 1972
- Le dialogue intrareligieux, Ed. Albin Michel, 1985.
- Éloge du Simple. Le moine comme archétype universel, Ed. Albin Michel, 1995.
- Entre Dieu et le cosmos; une vision non-dualiste de la réalité, Ed. Albin Michel, 1997.
- L'expérience de Dieu, Ed. Albin Michel, 2002
- La Trinité; Une expérience humaine primordiale, Ed. du Cerf, 2003
- Initiation aux Védas, Ed. Actes sud, 2003
- Le silence du Bouddha; une introduction à l'athéisme religieux, Ed. Actes Sud, 2006.
- La plénitude de l'homme, Ed. Actes Sud, 2007
- L'inévitable dialogue : Dieu, Yahweh, Allah, Bouddha, ... Ed, Le Relié poche, 2008
- Paix et désarmement culturel, Ed. Actes sud, 2008
- Pélerinage au Kailash : Retour à la source, Ed. du Cerf, 2011
- Culture et religions en dialogue,
- Oeuvres I, Mystique et spiritualité, Mystique plénitude de vie 1, Ed. du Cerf, 2012
- Oeuvres VI, Pluralisme et interculturalité, Culture et religion en dialogue 1, Ed. du Cerf, 2012
- Oeuvres VIII, Vision trinitaire et cosmothéandrique : Dieu-Homme-Cosmos, Ed. du Cerf, 2013
- Pluriversum, Pour une démocratie des cultures : avec aperception du temps, Ed. du Cerf, 2014
En cours de publication : Oeuvres complètes (12 tomes) aux Ed. du Cerf 
Site officiel : Raimon Panikkar


La culmination du développement de l'homme est la conscience de la transcendance. Le pouvoir de la réflexion fait de l'Homo sapiens l'être supérieur qu'il croit être. Le lieu de la divinité sera ici celui d'un super-Etre. Son lieu sera méta-ontologique, au delà de l'Être.
L'homme est fier de sa capacité à se rendre compte qu'il ne peut pas tout comprendre. La divinité est ici perçue non seulement comme au-delà du monde physique, mais aussi comme au-delà des confins de tout domaine naturel, y compris le monde humain (intellect, désirs, volonté) ou n'importe quel autre. Elle ne sera même pas appelée natura naturans (Averroès, Spinoza, etc.) ou ungenaturte natur (Eckhart), parce qu'elle n'est pas natura.  La transcendance ou altérité est si absolue qu'elle se transcende elle-même et ne peut être appelée transcendante. La divinité n'est pas, son être est au-delà de l'Etre. Son lieu est méta-ontologique. Elle n'est même pas Non-Etre. L'apophatisme est absolu. La divinité n'est ni n'existe, elle n'est ni pensable ni nommable. Le silence est notre unique attitude, non pas du fait que nous sommes incapables de parler d'elle, mais du fait que sa spécificité consiste à être silence. Ce silence ne cache ni ne révèle. La divinité est silence parce qu'elle ne dit rien, parce qu'il n'y a rien à dire. Un nom possible pour cette divinité est nirvana ou "Ni-Etre-Ni-Non-Etre". Un autre nom est le mia pege theo-têtos (une seule source de la divinité) de la Patristique, adopté au VIe concile de Tolède (638), où l'on se mit d'accord pour appeler Père fons et origo totius divinitatis (source et origine de toute divinité). La divinité est aperçue ici comme une réalité méta-ontologique. Toute pensée à son sujet serait idolâtrie. (...)
(Le triple horizon dans lequel apparaît la divinité. L'horizon ontologique. p. 54)

La Trinité est autant un défi au monisme qu'au dualisme. S'il n'y a qu'un Dieu, la Trinité est superflue ou n'est qu'une simple modalité. S'il y a trois dieux, la Trinité est une aberration. Et si Dieu n'est ni "un" ni "trois", que signifie alors la Trinité ? Précisément cela : que Dieu n'est ni un ni trois, qu'Il ne se laisse enfermer dans aucun nombre. Qui incipit numerare incipit errare (Qui commence à compter commence à se tromper), dit saint Augustin.
(Conception chrétienne du divin. p.95)

Le mal en tant que mal est inintelligible. Le mysterium iniquitatis (mystère du mal) est mystère précisément parce qu'il échappe à notre raison, que nous ne lui trouvons ni d'explication, ni d'intelligibilité interne, qu'il s'avère incompréhensible pour nous. Si nous parvenions à expliquer le mal, si à travers Freud, Jung ou Lacan, nous trouvions les clefs nous permettant de le justifier, alors le mal n'existerait pas. Si nous étions capables de l'expliquer, il ne serait alors plus qu'une bombe  à laquelle on aurait retiré son détonateur : il serait désactivé. Une fois désactivé le mystère, le mal n'existerait plus.
(Le mal. Intelligible. p.164/5)

Comme nous l'avons dit au début, le silence est une condition indispensable pour que notre discours sur Dieu ne dégénère pas en logomachie. Il nous parait ici opportun d'insister à nouveau sur le silence, il est non seulement la condition mais aussi l'atmosphère dans laquelle l'expérience de Dieu peut respirer sans se noyer dans la dialectique. (p.190)(...)
Le lecteur qui aura eu la patience (qu comme toujours est salvifique : Lc 21,19) de lire jusqu'au bout sera peut-être surpris d'une apparente contradiction entre les premières pages où l'on pouvait lire qu'il n'y avait pas d'expérience de Dieu possible et ces dernières pages qui affirment rien de moins que l'universalité de l'expérience du divin. C'est pour cette raison que notre première note, au début, mentionnait l'oxymore comme la manière de penser non dualiste.
Il n'y a pas d'expérience de Dieu comme substance et transcendance, il n'y a pas de connaissance de l'Infini. Mais il y a une connaissance directe de notre contingence, comme nous venons de le dire. Et c'est précisément dans cette contingence que nous touchons (cum tangere) l'infini. L'expression chrétienne de ce contact est "Incarnation". Un autre langage nous dirait que dans l'expérience du samsara on touche le nirvana, ou, d'une manière plus poétique et plus prosaïque : "Dieu est aussi dans la cuisine, entre les marmites" - avec un "entre" qui n'est pas distinct de cet entos qui est le lieu du royaume de Dieu (Lc 17,21). Nous rencontrons Dieu entre les choses : en leur intérieur et entre nous et elles.
Notre contingence est à la fois humaine et divine - en son point tangentiel. Nous ne pouvons faire l'expérience d'un Dieu exclusivement immanent qui se confondrait avec nous en une identité panthéiste. Nous ne pouvons non plus faire l'expérience d'un Dieu exclusivement transcendant, ce qui serait contradictoire en soi. On rencontre Dieu en relation. Et nous avons dit que nous sommes ce point de contact.
(Le silence. p. 199/200)
Extraits de : L'expérience de Dieu
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