jeudi 19 juillet 2018

«En 2018, il faut aller sur une chaîne russe pour de vrais débats»

Cruel retournement, moins de trente ans après la chute de l'Union soviétique l'Occident joue le rôle du totalitarisme soft.  Les médias privés sont (presque tous) dans les mains d'oligarques et les gouvernements votent des lois pour restreindre les libertés, confisquer le débat démocratique, et augmenter la surveillance de leurs citoyens au prétexte de lutte contre les fake-news ou le terrorisme.
En France, après la tentative de supprimer Cash Investigation des chaines publiques, Frédéric Taddei est contraint de s'exiler sur la chaine Russia Today (que le gouvernement français rêve d'interdire) pour pouvoir organiser de vrais débats contradictoires.




Lavrov s'inquiète de la loi française contre les Fake-News "Si ce n'est pas de la censure, si ce n'est pas une tentative de limiter l'espace de libre expression, alors je ne comprends pas grand chose à la vie" (RT, 16 juillet 2018)

Lire aussi : Frédéric Taddeï animera quatre émissions hebdomadaires sur RT France, le 16 juil. 2018 - RT


Frédéric Taddeï rejoint Russia Today France : «Les injures, je m’en fiche»
Par Paul Géli, le 18 juillet 2018 - Le Parisien

Le journaliste rejoint à la rentrée la chaîne controversée RT France et assume son choix.
Après avoir été évincé de l’émission « D’art d’art » sur France 2 et relégué en week-end sur Europe 1, Frédéric Taddeï, 57 ans, rejoint en septembre la rédaction de Russia Today (RT) France, chaîne financée par le gouvernement russe. Il s’explique sur cette arrivée inattendue.

Pourquoi avoir rejoint RT France ?
C’est la seule chaîne qui m’ait donné carte blanche pour faire ce que je préfère à la télévision : une vraie émission culturelle avec de vrais débats, comme à l’époque de « Ce soir ou jamais » sur France 3 et France 2. La question que l’on devrait se poser, c’est pourquoi, en 2018, il faut aller sur une chaîne russe pour pouvoir le faire.

À quoi ressemblera cette nouvelle émission ?
Rien n’est encore défini, pas même le nom, mais ce sera une heure de talk-show à partir de 19 heures, du lundi au jeudi.

Ça ne vous pose pas un problème de travailler pour un média financé et contrôlé par le Kremlin ?
Je ne suis pas le premier. Larry King, l’ex-intervieweur vedette de CNN, est sur RT America depuis cinq ans. De célèbres journalistes américains de gauche y animent des talk-shows, comme Chris Hedges, lauréat du prix Pulitzer 2002, qui est très anti-Trump. Sur RT France, il y a déjà Jean-Marc Sylvestre. Et Jean-Luc Hees, l’ancien président de Radio France, est président du comité d’éthique. Ils m’ont dit qu’il n’y avait pas de problème, que je pouvais venir. Les gens qui me reprochent d’aller animer des débats sur RT sont ceux qui aimeraient bien qu’il n’y ait plus de débats du tout. J’aurai une totale liberté sur le choix des sujets et des invités, comme je l’ai toujours eue. Le jour où il y aura un débat sur la Russie, j’inviterai des pro-Poutine, ce que j’ai toujours fait et que mes confrères ne font pas, et, bien entendu, des anti-Poutine.

Ne craignez-vous pas de perdre la liberté que vous aviez ailleurs ?
Pas du tout. J’ai animé « Ce soir ou jamais » pendant dix ans sur une chaîne d’État. Je n’ai pas fait la propagande du gouvernement pour autant. J’anime des débats, j’invite tout le monde.

RT France a déjà été mis en demeure par le CSA pour manquement à la diversité des points de vue et à l’honnêteté.
La mise en demeure du CSA visait une voix mal synchronisée, une erreur de montage, purement technique. Toutes les chaînes françaises ont été un jour ou l’autre mises en demeure par le CSA. On en parle davantage parce que RT France est très « observée ». L’Élysée refuse d’accréditer les journalistes de RT, ce qui est un peu ridicule. Ça rappelle le FN qui faisait la même chose avec « le Petit Journal » de Yann Barthès. Le SNJ, premier syndicat des journalistes, a dénoncé « la guerre puérile », je le cite, menée par l’Élysée contre RT France. Il a même parlé de « censure d’État ». En ce qui me concerne, respecter la diversité des points de vue est une spécialité. On me l’a suffisamment reproché ! J’ai toujours été libre. « Ce soir ou jamais » m’a valu beaucoup d’éloges, mais aussi pas mal d’injures. Ce sera pareil sur RT. Je m’en fiche. J’ai ma conscience pour moi. RT respecte les lois en vigueur dans mon pays, c’est tout ce qui m’importe.

La visibilité de RT reste nettement moins forte que France 2 ou France 3…
La chaîne est diffusée sur la Freebox, sur Fransat, sur plusieurs satellites, et en clair sur YouTube et sur RtFrance.tv. Quand je faisais « Paris Dernière » sur Paris Première, ce n’était pas non plus une très forte visibilité. L’émission a tout de même marqué pas mal de gens.

Qu’allez-vous faire sur Europe 1 à la rentrée ?
Je passe d’une quotidienne à une hebdomadaire. Je reprends l’émission de Nikos Aliagas le dimanche de 11 heures à 12h30, qui va assurer la matinale du lundi au vendredi.

Que pense Europe 1 de votre arrivée sur RT ?
Ils me font confiance. Je suis l’un des plus anciens sur Europe 1. Ils m’ont toujours soutenu.

Vous ne présenterez plus « D’art d’art » sur France 2 à la rentrée. Que s’est-il passé ?
J’ai appris trois semaines avant l’enregistrement que je ne faisais plus l’émission (NDLR : désormais animée par Adèle Van Reeth). C’est le producteur qui m’a averti. Je n’ai pas cherché à en savoir plus.
 

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