Myriam 2 mn d'arrêt avec Chopin (Grenoble, 8 déc. 2014)
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Les forcenés
par Frédéric Lordon, 8 janvier 2019 - Le Monde diplomatique
Méthodologiquement, et déontologiquement, il faut maintenir les hypothèses psychiatriques dans un statut d’ultime recours quand il est question de politique, et ne se tourner vers elles qu’après avoir tout essayé. Au point où nous en sommes cependant, observant Macron, Griveaux, écoutant le défilé ininterrompu des députés LREM sur les chaînes d’information continue et les chiens de plage arrière qui font « oui oui » en leur passant les plats, on cherche en tous sens, et surtout en vain, ce qui pourrait nous sauver de ce dernier recours. Après avoir épuisé toutes les explications alternatives, il va falloir s’y résoudre : ces gens sont complètement fous.
On savait depuis longtemps que chaque fois que l’un d’eux dit « j’ai bien entendu » ou « nous sommes à l’écoute », il utilise juste d’autres mots pour dire « nous n’en ferons qu’à notre tête et vous n’existez pas ». Cependant, il y a un point où le cynisme bonnasse de type chiraquien ou hollandiste ne fait plus une hypothèse suffisante. Quand un mouvement quasi-insurrectionnel hurle au gouvernement qu’il mettra le feu plutôt que de continuer dans cette direction, et que le gouvernement lui répond qu’il a « bien entendu » « l’impatience », qu’il a bien compris la demande, l’envie même, d’aller encore « plus loin dans le changement », de se montrer « encore plus radical dans les méthodes et les manières de faire », comment écarter l’hypothèse psychiatrique ? Quel type de rapport Benjamin Griveaux entretient-il avec la réalité quand il se prévaut d’une « envie de changement des Français », en tout cas d’une envie du type de celle qui appellerait sa réponse à lui ? Et, accessoirement, pourquoi ne se trouve-t-il pas un média pour le lui faire remarquer clairement ? En commençant d’ailleurs par lui faire observer que « ses » Français, mesurés au score réel de la présidentielle, font à peine plus de 10 % du corps électoral (1), et qu’ils n’ont porté Macron au pouvoir qu’au terme d’une gigantesque prise d’otages de deuxième tour, méthodiquement agencée de longue date avant le premier — autrement dit sans aucune des « envies » que leur délire Griveaux.
Orwell, qui n’est pas redevenu par hasard une référence contemporaine, a dit comme personne le tour de langage propre au pouvoir dictatorial : l’inversion, en fait la négation, systématique des choses par les mots — la guerre qui est la paix, l’esclavage la liberté et l’ignorance la force. Mais c’est autre chose encore, d’une autre nature, qui émane par exemple du discours de « vœux » de Macron. C’est qu’il faut un twist déjà très prononcé pour revendiquer « avoir posé les bases d’une stratégie ambitieuse pour améliorer l’organisation de nos hôpitaux » (2) quand le système de soin est au bord de l’effondrement et que médecins et infirmières en sont à se suicider ; de même pour prétendre « lutter contre le réchauffement climatique » quand les mesures prises finissent par écoeurer un personnage a priori aussi disposé à tous les simulacres que Nicolas Hulot. Ou pour se targuer « d’éradiquer la grande pauvreté » quand, du fait de politiques de guerre sociale à outrance, elle explose dans les statistiques et sous nos yeux mêmes. Il faut avoir passé des caps pour expliquer sans ciller que la transformation « en profondeur des règles de l’indemnisation du chômage », de « l’organisation du secteur public » et de « notre système de retraite », transformations qui promettent les demandeurs d’emploi à une précarité sous surveillance sans précédent, le secteur public au saccage néomanagérial, et les retraités à la misère, pour expliquer, donc, que tous ces bons soins sont faits « au fond pour bâtir les nouvelles sécurités du XXIe siècle ».
Source (et suite) du texte : Le Monde diplomatique
Emmanuel Macron et le risque du chaos
Par Jacques Sapir, le 11 janv. 2019 - Sputnik
La descente aux Enfers d’Emmanuel Macron se poursuit. Sa gestion, catastrophique, de la colère sociale a ainsi abouti à refaire de forces de police et de gendarmerie les «ennemis du peuple», dans une logique que l’on croyait disparue depuis les attentats du 7 janvier 2015, et la tragique séquence d’actions terroristes qu’ils ouvraient.
Le souvenir d’Ahmed Merabet ou Frank Brinsolaro, ces policiers victimes des terroristes en tentant de protéger les victimes à Charlie, et celui du colonel Arnaud Beltrame, tombé en janvier 2018, il y a moins d’un an, s’effacent devant les images des policiers qui éborgnent et défigurent, utilisant – ce qui est contraire aux réglements – leurs Flash Ball pour viser la tête des manifestants. Mesurée à cette aune, le bilan d’Emmanuel Macron est terrible. Il est probablement irrémédiable. Par ses actes, comme par ses propos, Emmanuel Macron conduit la France vers le chaos. Il est devenu aujourd’hui, tant par sa politique, justement détestée, que par sa personne, parfois injustement haïe, le symbole d’une division radicale entre les français.
Un tournant sécuritaire
La déclaration du Premier-ministre sur TF1 lors du journal du 7 janvier confirme que ce gouvernement, et le Président, n’ont rien compris et rien appris aux événements qui se succèdent depuis maintenant près de deux mois. Edouard Philippe a réclamé des peines exemplaires contre les «casseurs». Mais, la justice est en France (théoriquement) indépendante. Ce n’était pas à lui de faire une telle déclaration. Il s’est déclaré choqué par les images diffusées à propos de «l’acte VIII», la manifestation du 5 janvier. Mais, il n’a pas eu un mot pour les victimes des forces de police. Le Premier-ministre entend donc donner une réponse «sécuritaire» aux «violences» provoquées par ce mouvement; mais il ne se rend pas compte que la seule réponse susceptible de faire baisser le niveau de violence est une réponse politique. Une telle attitude démontre que ce gouvernement est aujourd’hui purement réactif et a perdu l’initiative. Car, les mesures annoncées depuis le 10 décembre ont toutes pour caractéristique «trop peu, trop tard».
La question qui est maintenant posée est celle de la démocratie, à travers la revendication du scrutin proportionnel et du référendum d’initiative citoyenne. C’est sur ces points qu’une réponse était attendue. Force est de constater qu’elle n’est pas venue.
Cette situation de crise engendre désormais une coupure grave entre les français et les forces de l’ordre. Ces dernières ont provoqué des centaines de blessés, dont certains très graves. Des femmes et des hommes ont été éborgnés ou grièvement blessés. Alors, il faut dire que certains, une petite minorité, de ces cas sont des accidents. Au-delà des accidents, hélas probablement inévitables, et des bavures, il y a une volonté politique. Elle met en cause le Préfet de Police, le Ministre de l’Intérieur et, bien entendu, le Premier-ministre Édouard Philippe.
Le symptôme du boxeur
L’épisode dit «du boxeur» sur la passerelle enjambant la Seine est symptomatique. Tout le monde à en mémoire la vidéo où l’on voit Christophe Dettinger frapper un policier. Mais il est important aussi de voir la vidéo des minutes précédant son acte [1]. Elle éclaire de manière significative le contexte dans lequel il a eu lieu. Christophe Dettinger a publié ensuite une vidéo où il s’explique et dit regretter son acte [2]. Au delà des faits, qui auront à être jugés, le soutien dont il bénéficie dans une grande partie de l’opinion doit être pris en compte. Une «cagnotte» de soutien, constituée sur une plate-forme numérique, a recueilli en moins de 48h plus de 120 000 euros avant d’être arrêtée, sans doute sur ordre du gouvernement Il semble que plus de 7000 personnes ont contribué à cette cagnotte, qui devrait l’aider à payer des avocats. Une telle mobilisation spontanée pour un individu isolé est assez exceptionnelle. Elle dit beaucoup de choses sur l’état de la situation. Face à ce mouvement de solidarité, la réponse du gouvernement, par l’intermédiaire de Mme Schiappa est consternante. Cette femme, ci-devant Ministre, ne sait visiblement pas que cette cagnotte est parfaitement légale. En appelant à une dénonciation massive des donateurs, Mme Schiappa retrouve les réflexes les plus noirs de notre histoire.
Source (et suite) du texte : Sputnik
Lire aussi : Bloomberg: «La réponse de Macron aux Gilets jaunes fait paraître Poutine plus soft», le 11 janv. 2019, Sputnik
Tatiana Ventose, La stratégie du chaos (Le fil d'actu, le 11 janv. 2019)
Tatiana Ventose, La stratégie du chaos (Le fil d'actu, le 11 janv. 2019)
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Désobéissance civile (Datagueule, 29 juin 2017)
Du Grain à moudre par Hervé Gardette
Colère jaune (8.11.2018-10.01.2019)
(15/15) : La violence est-elle la continuation de la politique par d'autres moyens ?
(14/15) Les "gilets jaunes" réveillent-ils les clivages à gauche ?
(13/15) Vox populi, voie sans issue ?
(12/15) Les experts sont-ils "hors-sol"?
(11/15) : La Suisse est-elle le paradis de la démocratie directe ?
(10/15) : Les circuits de l'information de l'État sont-ils grillés ?
(9/15) : les "gilets jaunes" veulent-ils plus ou moins de démocratie ?
(8/15) : Malaise social : un problème de management ?
(7/15) : Emmanuel Macron est-il l'homme de la situation ?
(6/15) : Une crise, oui... mais une crise de régime ?
(5/15) : Gilets jaunes, Nuit debout, Vérité pour Adama : mêmes combats ?
(4/15) Où s'arrête la critique des médias, où commence la haine ?
(3/15) : La vie est-elle trop chère ou les salaires sont-ils trop bas ?
(2/15) Comment répondre à la colère du peuple ?
(1/15) : Que reflètent les "gilets jaunes" ?
Ardisson sur Macron (RMC, 17 nov. 2018)
Gilets jaunes et chansons :
Est-ce que ces gens sont sérieux ? (Thomas Gaëtan, juin 2018)
Francis Cabrel sauce pré gilet jaune
Macron casse tout, Macron casse-toi (Thomas Gaëtan, 2 sept. 2018)
Manu Chao à la sauce pré gilet jaune
Patrick Peroni, Olé, olé président (28 oct. 2018)
Le chant des partisans (Maria Carmen Lopez, 22 nov. 2018)
Bella Ciao sauce gilet jaune (26 nov. 2018)
Kopp Johnson, Gilets jaunes (23 nov. 2018)
Sortez les gilets du camion (What is life, 30 nov. 2018)
Vegedream à la sauce Gilet jaune
Président Maquereau (Zikoach, 1 déc. 2018)
Manu Chao à la sauce Renaud
Chanson parodique, Il faut lui couper la tête (La mite dans la caverne, 1 déc. 2018)
Edith Piaf à la sauce gilet jaune
Chanson parodique, Macron nous prend pour des cons (Jean Manu, 7 déc. 2018)
Georges Brassens à la sauce gilet jaune
Les Gentils, les Méchants (Marguerite Les Circonstances, 1 janv. 2019)
Michel Fugain à la sauce Gilet jaune
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