Toute conscience est conscience de quelque chose. Parler de "conscience sans objet" est-ce alors parler pour ne rien dire ?
vendredi 6 juillet 2012
Carl-Gustave Jung
Carl Gustav Jung est un médecin, psychiatre, psychologue et essayiste suisse né le 26 juillet 1875 à Kesswil, canton de Thurgovie, mort le 6 juin 1961 à Küsnacht, canton de Zurich, en Suisse alémanique.
Penseur influent, il est l'auteur de nombreux ouvrages de psychologie et de psychosociologie en langue allemande traduits en de nombreuses autres langues. Il est le fondateur du courant de la psychologie analytique. Son œuvre a été d'abord liée à la psychanalyse, de Sigmund Freud, dont il fut l’un des premiers collaborateurs, et dont il se sépara par la suite pour des motifs personnels, et en raison de divergences théoriques.
Carl Gustav Jung a été un pionnier de la psychologie des profondeurs en soulignant le lien existant entre la structure de la psyché (c'est-à-dire l'« âme », dans le vocabulaire jungien) et ses productions et manifestations culturelles. Il a introduit dans sa méthode des notions de sciences humaines puisées dans des champs de connaissance aussi divers que l'anthropologie, l'alchimie, l'étude des rêves, la mythologie et la religion, ce qui lui a permis d'appréhender la « réalité de l'âme ». Si Jung n'a pas été le premier à étudier les rêves, ses contributions dans ce domaine ont été déterminantes.
Auteur prolifique, il mêle réflexions métapsychologiques et pratiques à propos de la cure analytique. Jung a consacré sa vie à la pratique clinique ainsi qu'à l'élaboration des théories psychologiques, mais a aussi exploré d'autres domaines des humanités : depuis l'étude comparative des religions, la philosophie et la sociologie jusqu'à la critique de l'art et de la littérature. On lui doit les concepts d'« archétype », d'« inconscient collectif » et de « synchronicité ».
Source (et suite) du texte : wikipedia
Voir aussi : Soi / Individuation
Bibliographie (citations) :
- Psychologie et Alchimie, Ed. Buchet Chastel, 1970, 2004.
voir sous : bibliographie de psychologie analytique
Ce temps meilleur était celui ou l'esprit de l'alchimiste aux prises avec le problème de la matière, lorsque la conscience, dans son exploration, se heurtait au monde obscur de l'inconnu dans lequel elle croyait percevoir des formes et des lois, qui, en fait, n'appartenaient pas à la matière mais à la psyché. Tout ce qui est inconnu ou vide est automatiquement rempli par une projection psychologique, tout se passe comme si les propres arrières-plans psychiques du chercheur étaient réfléchis par l'obscurité. Ce qu'il voit dans la matière, ce qu'il croit reconnaître, ce sont avant tout les données de son propre inconscient qu'il projette en elle. En d'autres termes, il découvre dans la matière, comme appartenant apparemment à celle-ci, certaines propriétés et certaines significations potentielles de la nature psychique desquelles il est totalement inconscient. Ceci est particulièrement vrai pour l'alchimie classique, dans laquelle la science empirique et la philosophie mystique étaient pour ainsi dire indifférenciées. (...) (Les concepts de base de l'alchimie, Introduction)
Je suis d'avis que les espoirs des alchimistes de tirer de l'or philosophique, la panacée ou la pierre miraculeuse de la matière, d'une part, est une illusion déterminées par des projections, mais, d'autre part, correspond à certains faits psychiques qui sont d'une grande importance dans la psychologie de l'inconscient. Comme le montrent les textes et leur symbolique, l'alchimiste projette ce que j'ai appelé le "processus d'individuation" dans les phénomènes de transformation chimique. Un terme scientifique tel qu'"individuation" ne signifie en aucune façon qu'il s'agit d'un état de faits connu et définitivement tiré au clair. Il désigne seulement un domaine de recherche jusqu'à maintenant très obscur et qui a bien besoin d'être exploré : celui des processus de centralisation formateur de la personnalité dans l'inconscient. Il s'agit de processus vitaux qui, du fait, de leur caractère numineux, ont de tout temps constitué le stimulant le plus important à la formation de symboles. Et ces processus sont mystérieux, dans la mesure où ils posent une énigme à l'entendement humain, énigme que ce dernier s'efforcera encore pendant longtemps, et peut-être en vain, de résoudre. Car, en dernière analyse, on peut douter que la raison soit l'instrument qui convienne à cette recherche. Ce n'est pas e vain que l'alchimie se considère comme un "art", sentant à juste titre, qu'elle s'occupe de processus créateurs que l'intellect peut décrire, mais que seule l'expérience vécue peut réellement saisir. Les alchimistes eux-même disaient : Déchirez vos livres, pour éviter que ne soient déchirés vos coeurs, et ce alors même que, d'un autre côté, ils insistaient sur l'étude des lièvres. Mais c'est bien l'expérience vécue, et non les livres, qui conduit à la compréhension. (...) (Epilogue)
Extrait de : Psychologie et Alchimie
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Quelques critiques de Titus Burckhardt :
[Contre l'hypothèse de la projection]
Ce n'est pas l'avis de la moderne "psychologie des profondeurs", qui se propose de trouver dans le symbolisme alchimique une confirmation de sa propre thèse sur l'"inconscient collectif". Selon cette thèse, l'alchimiste, dans sa recherche comparable à un rêve, projette en celle-ci certains contenus de sa propre âme, jusqu'alors inconnus de lui-même, et par là, sans même avoir l'intention consciente, opère une sorte de réconciliation entre sa conscience quotidienne ou superficielle et la puissance latente de l'"inconscient collectif". Une telle "réconciliation" du conscient et de l'inconscient donnerait naissance à une expérience intérieur tenant subjectivement lieu du magistère auquel l'alchimiste aspirait. Ce point de vue, comme le précédent, est fondé sur l'hypothèse que l'intention initiale de l'alchimiste serait de fabriquer de l'or. L'alchimiste est donc considéré comme prisonnier d'une sorte de délire ou comme dupe de sa propre "projection" imaginative, et par conséquent comme pensant et agissant à la manière d'un être en état de rêve. Cette explication a quelque chose de séduisant parce que d'une certaine façon elle approche de la vérité - même si c'est pour s'en éloigner immédiatement et radicalement ! Il est exact que la réalité spirituelle, que l'oeuvre alchimique doit dégager une chose dont le novice est relativement inconscient. C'est une réalité profondément cachée dans l'âme. Néanmoins, cette "profondeur secrète" ne doit pas être confondue avec le chaos du prétendu "inconscient collectif" pour autant que ce concept plus qu'élastique ait une signification valable. La "fontaine de jouvence" des alchimistes ne jaillit nullement d'un obscur fond psychique, elle coule de la même source que toute vérité intemporelle. Elle est cachée à l'alchimiste au début de son "oeuvre", parce qu'elle se situe, non pas au-dessous des phénomènes de la conscience ordinaire, mais à un niveau supérieur.
L'hypothèse des psychologues s'évanouit dès qu'on réalise que les véritables alchimistes ne furent jamais prisonniers de quelques rêve cupide de fabrication de l'or, et qu'ils ne poursuivaient pas leur but comme des somnambules ou selon le jeu de "projections" passives des contenus inconscients de leurs âme. Ils suivaient, au contraire, une méthode bien étudiée dont l'expression symbolique en terme de métallurgie - art de transmutation des métaux vils en argent ou en or - a évidemment égaré bien des chercheurs no initiés, pourtant cette expression est en elle-même logique et même, réellement profonde. (...)(pp.8-9)
[Contre l'identification de la materia prima à l'inconscient collectif]
Symboliquement, la materia prima se situe "en bas", parce qu'elle est complètement passive, et elle parait obscure, parce qu'elle est rigoureusement dépourvue de forme, elle élude toute tentative de saisie de la part de l'intelligence. De là, le malentendu qui a fait confondre la materia prima des alchimistes avec "l'inconscient collectif" de la psychologie moderne. La materia prima, cependant, n'est guère une sorte de volcan subconscient à éruptions irrationnelles mais, comme nous l'avons déjà dit, le substratum passif de toutes les formes, tant sensibles qu'idéelles. Le terme "collectif", appliqué à ce domaine mal défini que les psychologues ont en vue, est d'ailleurs fort contradictoire, (...)
Il faut distinguer, d'une part, la couche de conscience plus ou moins obscure qui se trouve sous la conscience ordinaire (cette couche ne peut d'ailleurs être totalement inconsciente, puisqu'elle interfère d'une certaine façon dans la conscience ordinaire) et, d'autre part, le véritable fond de l'âme, purement passif et, par conséquent, sans forme en lui-même. La couche obscure que nous venons de mentionner - s'apparentant à un crépuscule de plus en plus dense, plutôt qu'aux ténèbres de la nuit - est constitué par l'accumulation d'impressions psychiques et des traces de nos comportements. Le vrai fond de l'âme, d'autre part, n'est en lui-même ni sombre ni clair, ce n'est pas, non plus, une source d'impulsions irrationnelles. Au contraire, lorsqu'il n'est pas complètement voilé, de sorte qu'alors il paraît obscur, c'est le miroir fidèle de son pôle complémentaire, l'Esprit universel, il reflète ainsi toutes les vérités qui, lorsque la puissance latente de l'imagination approche du pur état de materia prima, s'expriment éventuellement sous forme de symboles. (...)(pp.98-99)
[Contre l'interprétation du "mariage chimique"]
Ici il nous faut mentionner certaine thèse de la moderne "psychologie des profondeurs", selon laquelle le "mariage chimique" ne serait autre chose que l’intégration, dans la conscience individuelle - ou "personnelle" -, de puissances psychiques jaillissant de l"'inconscient collectif". Selon cette thèse, la force "coagulante" du Soufre correspondrait à la conscience "personnelle", plus ou moins rationnelle et centrée sur le "moi", tandis que la puissance "dissolvante" du Mercure résumerait les impulsions venant de l'"inconscient". C'est se tromper singulièrement de proportion, car la polarité dont il s'agit se situe à un tout autre niveau, n'oublions pas que le Mercure parfait, assimilé par ailleurs à la "Lune", ne comporte aucun élément trouble, qu'il n'est pas "irrationnel" ou "alogique" comme les "sédiments" du subconscient, mais au contraire très pur, il est le miroir sans taches du Soufre-Soleil, dont la chaleur et la luminosité suggèrent tout autre chose que la conscience égocentrique. Le Soufre est en quelque sorte l'âme-sujet, tandis que le Mercure correspond à l'âme-objet, qui est le substratum de toutes les formes psychiques. (...)
Revenons maintenant à la thèse psychologique mentionnée et réfutée ci dessus, et disons qu'elle comporte un grain de vérité parce que, dans la mesure ou l'Esprit supraformel domine et pénètre l’âme, les forces naturelles de celle-ci, qui s'étendent jusqu'aux confins de la conscience individuelle, sont comme réintégrées dans l'unité "personnelle", d'ou les répercussions quasi miraculeuses de celle-ci.
Il en résulte que la conscience ordinaire est comme située entre deux sphères "inconscientes", une sphère supérieure, qui n'est "inconsciente" que d'une façon provisoire, car elle est en elle-même lumière pure et indivise, et une sphère inférieur, qui est, non pas absolument inconsciente, mais subconsciente et plus ou moins obscure ou chaotique. La sphère supérieur échappe totalement à l'analyse psychologique, vouloir la saisir rationnellement, c'est comme vouloir éclairer le soleil en se servant d'un miroir. Quant à la sphère inférieur, elle peut faire l'objet d'une analyse indirecte, mais qui risque fort de n'être que la projection de notre propre ombre sur une paroi de brouillard. (...)(pp. 150-152)
Extrait de : Titus Burckhart, Alchimie, Sa signification et son image du monde, Ed. Archè Milano, 1974.
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