Les Chemins de la philosophie par Adèle Van Reeth
Bergson, La pensée et le mouvant (19-22 juin 2017)
(1/4) Les deux premiers essais introductifs
Avec Frédéric Worms, professeur de philosophie à l'École normale supérieure, où il dirige le Centre international d'étude de la philosophie française contemporaine, et membre du Comité consultatif national d'éthique
(2/4) Le possible et le réel
Avec Arnaud François, professeur de philosophie à l'Université de Poitiers
(3/4) L’intuition philosophique
Avec David Lapoujade, maître de conférences à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne
(4/4) : La perception du changement
Avec Paul-Antoine Miquel, professeur de philosophie contemporaine à l’Université de Toulouse 2- Le Mirail
Quand Turner et Corot regardent la nature, que voient-ils de plus que nous ?
William Turner, Pluie, vapeur et vitesse, le chemin de fer de la Great Western, 1844
« Il y a, depuis des siècles, des hommes dont la fonction est de voir et de nous faire voir ce que nous n'apercevons pas naturellement. Ce sont les artistes.
À quoi vise l'art, sinon à nous montrer, dans la nature et dans l'esprit, hors de nous et en nous, des choses qui ne frappaient pas explicitement nos sens et notre conscience ? […]
Les grands peintres sont des hommes auxquels remonte une certaine vision des choses qui est devenue ou qui deviendra la vision de tous les hommes. Un Corot, un Turner, pour ne citer que ceux-là, ont aperçu dans la nature bien des aspects que nous ne remarquions pas. – Dira-t-on qu'ils n'ont pas vu, mais créé, qu'ils nous ont livré des produits de leur imagination, que nous adoptons leurs inventions parce qu'elles nous plaisent, et que nous nous amusons simplement à regarder la nature à travers l'image que les grands peintres nous en ont tracée ? – C'est vrai dans une certaine mesure ; mais, s'il en était uniquement ainsi, pourquoi dirions-nous de certaines œuvres – celles des maîtres – qu'elles sont vraies ? […] Approfondissons ce que nous éprouvons devant un Turner ou un Corot : nous trouverons que, si nous les acceptons et les admirons, c'est que nous avions déjà perçu quelque chose de ce qu'ils nous montrent. Mais nous avions perçu sans apercevoir. C'était, pour nous, une vision brillante et évanouissante, perdue dans la foule de ces visions également brillantes, également évanouissantes, […] et qui constituent, par leur interférence réciproque, la vision pâle et décolorée que nous avons habituellement des choses. Le peintre l'a isolée ; il l'a si bien fixée sur la toile que, désormais, nous ne pourrons nous empêcher d'apercevoir dans la réalité ce qu'il y a vu lui-même. »
Henri Bergson, La pensée et le mouvant, 1934, « La perception du changement : 1ère conférence », conférences faites à l’université d’Oxford (1911), Quadrige, p.149.
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