Michel Onfray, "Souverainiste" (Le Point, avril 2017)
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Métapolitique, nouveaux clivages et Présidentielle 2017
Le 13 avril 2017 - Pouvoir au peuple
Le clivage gauche-droite a longtemps été un outil de classification des idées politiques. Aujourd’hui, il semble être en partie éprouvé, près d’un français sur trois ne sachant plus se positionner par rapport à lui.
Dans cet article je vous propose une nouvelle grille de lecture des clivages profonds qui surplombent les courants d’idées traditionnels, en postulant l’existence de quatre autres axes majeurs formant la matrice idéologique fondamentale de la politique française.
Un des problèmes essentiels que pose le clivage gauche-droite tel qu’il est généralement perçu aujourd’hui, c’est qu’il englobe la question des valeurs morales. Ainsi la personne de gauche se doit d’être progressiste sur le plan des valeurs, et la personne de droite conservatrice. L’inconvénient majeur résultant de cette vision se situe dans l’impossibilité de créer une union populaire entre les tenants d’une vision de gauche progressiste d’une part et d’une vision de droite conservatrice d’autre part. Ils se retrouvent alors piégés car à l’opposé sur le plan des valeurs, rendant leurs opinions et leurs choix politiques a priori irréconciliables pour l’intérêt général.
Quelle nouvelle grille de lecture faciliterait l’analyse contemporaine des courants d’idées politiques et une meilleure identification des intérêts de chacun ?
I – Un clivage traditionnel de plus en plus obsolète
Voici le clivage gauche-droite actuel tel qu’il est généralement perçu :
Autrement dit, voilà schématiquement ce que les médias de masse et un grand nombre de figures politiques, syndicales et journalistiques présentent habituellement :
Nous aimons que les choses soient bien rangées, qu’elles soient « à leur place ». Il n’y a rien de mal à cela, c’est utile pour nous aider à donner du sens aux évènements du monde dans le but de structurer notre conscience. Le problème, c’est que cette vision de la politique est au moins en partie archaïque, qu’elle perd de sa substance, même si de nombreux politiciens s’appliquent encore à la faire perdurer artificiellement pour servir leurs intérêts électoraux.
Il y a encore quelques temps, nous aimions à penser que la gauche fut systématiquement « socialiste » ou « communiste » et que la droite fut toujours « républicaine ». Mais cela a bien changé. La droite républicaine a probablement disparu avec Charles De Gaulle, tandis que le socialisme et le communisme ont si fortement évolué que les grands partis qui s’en revendiquent aujourd’hui n’ont plus grand chose à voir avec les idées d’origine.
Les partis politiques traditionnels et les médias dominants sont en interaction constante entre eux, immergés dans l’environnement politico-médiatique. Ils façonnent largement l’opinion publique à la politique. Les médias de masse fonctionnent comme des réceptacles bien clivants, en présentant ceux qui ont pour fonction de recueillir les mécontents avec des étiquettes repoussantes (« extrême-droite », « extrême-gauche »), en misant sur le fait qu’ils ne seront jamais assez fédérateurs et nombreux pour gouverner. Un pari risqué, dont la cote diminue chaque jour davantage.
Partant du constat que le clivage gauche/droite perd en pertinence, nous proposons deux grands clivages qui façonnent plus ou moins discrètement la vie politique française. Nous les appelons les clivages métapolitiques.
II – Les clivages métapolitiques
Souveraineté VS Européisme et Mondialisme
(l’État-nation contre la Supranation)
et
Démocratie VS Oligarchie
(le Peuple contre l’Élite dominante)
Plusieurs facteurs nous permettent d’accréditer l’existence de nouveaux axes centraux pour comprendre la politique française.