jeudi 7 mars 2013

Désespoir au chocolat


MAJ de la page : U.G. Krishnamurti




Ne plus fuir le désespoir.

Vous n'avez jamais regardé le vrai désespoir en face, il y a seulement le désir vague de vous sortir d'une mauvaise passe que vous appelez désespoir. Mais vous ne laissez pas ce désespoir suivre son cours. (Si c'était le cas) l'événement dont je vous ai parlé aurait lieu. Vous y pensez toujours, hein ? Montrez-moi ce désespoir ! Il n'est pas du domaine de l'intellect. Vous devriez le sentir, là, dans vos os. Qu'est-ce que c'est que ce désespoir dont vous me rabattez les oreilles ? Tant que vous fuyez aussi loin que possible de ce désespoir, il n'y a pas de vrai désespoir.

Vous n'avez qu'une idée en tête, c'est d'échapper à ce désespoir. La pensée vous en protège. Si c'était le vrai désespoir il serait tel qu'il devrait mettre fin à ce désir d'y échapper. Vous vous gardez bien de laisser à ce désespoir la possibilité d'agir. Tout ce que vous voulez, c'est trouver une solution, vous sortir de cette mauvaise passe, revenir à la normale et vous appelez ça votre "désespoir". Il n'y a pas de désespoir. Vous n'agissez pas comme un vrai désespéré. Vous en parlez seulement, vous parlez de désespoir, de vide, de néant. Mais ce n'est pas le vrai vide. Si c'était le vrai vide, alors il y aurait la vie pleine.

Alors bien sûr vous allez me demander . "Qu'est-ce que cette vie pleine ?". Si je vous en donne une définition, nous sommes perdus. (...)


Que va-t-il se passer ? Cette réalité ne va jamais être saisie dans le contexte de la pensée. Tout ce qui se passe en référence à la structure de pensée, ou qui est le produit de la pensée, va ajouter au désespoir, à coup sûr. Au mieux, tout ce que la conceptualisation de la crise peut faire pour vous est de vous donner une raison, ou ajouter à votre expérience, et évidemment vous allez vouloir encore plus, et c'est reparti. Le système se perpétue, et vous voilà plein d'espoir. 




La manière dont vous voyez les choses, il y a l'espoir d'un côté, le désespoir de l'autre. Vous voulez contrôler la situation, vois s'il n'y a pas moyen de rester du bon côté, de l'autre côté du désespoir  Vous ne laissez pas le désespoir être, et voir ce qui en résulte. Tout est bon pour vous mettre à l'abri du désespoir. 

Cela est vrai pour toutes les situations dans la vie. Vous êtes submergé de frustration, de désespoir, de quelque chose. Que faire ? La solution est là, en vous, elle ne viendra pas de l'extérieur. Si je vous propose une solution, elle s'ajoutera aux centaines d'autres qu'on vous a déjà proposées. Elle ne touchera pas à votre problème, elle le rendra encore plus entier. La seule vraie solution est de ne plus fuir le désespoir, qui est en vous, et de ne pus attendre d'aide de l'extérieur. Dans ce cas, une chose extraordinaire se passe.

Une fois que le problème du désespoir est résolu, tous les autres sont aussi résolus, parce qu'ils sont tous une variante du même problème. Voilà pourquoi vous ne voulez jamais résoudre votre problème. Vous ne voulez pas le résoudre, vous ne voulez que conceptualiser d'autres solutions. je répète la même chose sans arrêt, de dix manières différentes. (Mon vocabulaire n'est pas très riche, j'utilise les mêmes mots. On pourrait en trouver d'autres, forger de nouvelles expressions, mais à quoi bon ?).

L'instrument que vous utilisez - la pensée, l'intellect - ne peut pas admettre que ces problèmes puissent être résolus ici, maintenant, sur-le-champs, parce que vous êtes vous-mêmes le produit du temps et de l'effort. Le monde que vous connaissez est celui des expériences qui vous ont formés au cours des ans. Vous n'avez pas d'autre instrument, vous ne savez pas comment aborder ces problèmes autrement. Ce mécanisme ne peut pas concevoir qu'il soit possible de découvrir la solution ici, instantanément. Il veut toujours reculer la solution dans le futur, toujours plus loin, ça se fera dans le temps, mais pas maintenant.

Cet instrument fonctionne dans le temps, et il ne peut concevoir la possibilité que quelque chose d'autre puisse arriver qui ne soit pas dans le temps, impossible de concevoir une action qui soit en dehors du temps. Ne croyez pas que je donne dans la métaphysique en ce moment.

La solution - si tant est qu'on puisse parler de solution - doit être ici et maintenant. S'il y a en vous cette aspiration, il faut la satisfaire. Une faim qui ne peut être assouvie vous dévore, vous réduit en cendres. La situation est angoissante, et un moyen d'y échapper est de vous contenter des miettes que vous pouvez ramasser ici et là, en attendant que quelqu'un vous donne le pain tout entier, ou qu'un faiseur de miracles multiplie les pains pour vous.
Voilà quelque chose qui n'arrivera pas. Le désir en vous n'est pas absolu. Vous ne voulez pas résoudre votre problème, parce qu'alors vous vous trouveriez sans problème. Votre force et votre énergie vous viennent du désir de résoudre le problème. Si jamais il était résolu, il ne resterait plus rien que le vide et la frustration. (...)

Extrait de :
U.G., Le dos au mur, Le mythe de la perfection (chap. Je ne peux rien faire pour vous), trad. et commenté par J.-M. Terdjiman, Ed. Les Deux Océans, 1998.
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