dimanche 31 mai 2015

La leçon des maîtres Zen



Les Racines du ciel par Frédéric Lenoir, Leili Anvar
La leçon des maîtres Zen avec Catherine Despeux 31.05.2015

Catherine Despeux, née en 1945 ou 19461, est une sinologue française. Elle est professeur émérite de l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO) et administratrice de l'Institut d'études bouddhiques (naguère université bouddhique européenne).
Elle est notamment connue du grand public pour ses travaux sur le taoïsme et le tai-chi-chuan.
Source (et suite) du texte : wikipedia
Bibliographie : CRCAO

Son dernier livre :
Pratiques des femmes taoïstes. Méditation et alchimie intérieure, Ed. les Deux Océans, 2013
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Le renouveau du bouddhisme chan dans la Chine contemporaine (Sagesse bouddhiste, 2015)



Le tai chi chuan (Ina, 2009)
Autres : INA


L’alchimie intérieure dans le taoïsme
Par Catherine Despeux, le 10 février 2010
(Revue Aurores. No 43. Mai 1984)

L’immortalité ou la longue vie ont toujours été l’un des thèmes essentiels du taoïsme. Maints empereurs se sont entourés de devins et magiciens leur promettant l’immortalité grâce à des recettes diverses. La quête de l’immortalité se faisait alors à travers un vaste choix de techniques, depuis les jeûnes, la gymnastique, la méditation avec visualisation, les rituels, jusqu’à l’alchimie censée mener au but recherché par l’absorption de drogues diverses, dont certains minéraux hautement toxiques comme le mercure et l’arsenic. L’ingestion de ces pilules d’immortalité a d’ailleurs causé la mort de plusieurs empereurs et alchimistes, au point que l’on a pu se demander si, dans ce dernier cas, l’on n’était pas en présence de suicides volontaires avec automomification du corps.
C’EST probablement en réaction contre ce phénomène qu’apparaît vers le VII-VIIIe siècle une alchimie intérieure opérant avec les éléments du corps et de l’esprit de l’adepte. Le corps y tient le rôle de l’athanor de nos alchimistes; hermétiquement clos, il est le siège des transmutations. De même que le grand chaos est la matrice de l’univers, le corps, véritable microcosme, est la matrice dans laquelle est engendré l’être de lumière divine. Ainsi l’adepte est-il à la fois lieu de sublimation et image du macrocosme, avec les mouvements duquel il s’harmonise.
Le travail alchimique est traditionnellement divisé en trois étapes: fondre l’essence séminale et la raffiner en souffle, fondre le souffle et le raffiner en énergie spirituelle, fondre l’énergie spirituelle et la faire retourner à la vacuité. Ces étapes concernent trois régions du corps: les trois champs de cinabre situés respectivement au niveau de l’abdomen, du cœur et de la tête. Outre la transmutation au cours de ces trois étapes de l’essence, du souffle et de l’énergie spirituelle en trois «fleurs», l’on observe une transmutation du cycle d’engendrement des énergies des cinq viscères (reins, rate, foie, poumons, cœur) correspondant aux cinq éléments (eau, terre, bois, métal, feu). Cette transmutation vise à l’union des contraires, de sorte que «l’eau naisse au sein du feu» et que l’adepte parvienne progressivement à l’Un et atteigne ainsi l’immortalité. Car l’immortalité n’est plus en alchimie intérieure une libération du corps par la mort, mais une libération de l’être dans l’Un, se situant de ce fait au-delà de la dualité vie-mort. Le recours dans les textes et dans la transmission orale à un vocabulaire typiquement alchimique a deux conséquences: il en rend d’une part la compréhension difficile au commun qui ne peut se passer des explications d’un maître guidant constamment l’adepte dans sa recherche intérieure; il permet d’autre part aux différentes écoles de dissimuler sous les mêmes vocables des techniques parfois différentes.
La pierre philosophale est le plus souvent appelée remède. Elle est formée à partir de la copulation à l’intérieur du corps des énergies masculine et féminine, du Yin et du Yang ou encore de la quintessence de l’eau et du feu appelée tigre et dragon, ou plomb et mercure selon l’étape à laquelle se situe le travail. L’éminent alchimiste Zhang Ziyang s’exprime ainsi: «Le tigre et le dragon montent et descendent, tournoient, le vent produit des vagues, passion et nature s’harmonisent, et dans la cour centrale apparaît tout naturellement l’embryon».
LA FORMATION DU CINABRE
La forme première de l’embryon appelé aussi cinabre est celle d’un grain de riz ou d’une perle de rosée. Lorsqu’à partir du plomb et du mercure s’est formé le cinabre qui brille comme l’or pourpre, l’adepte jouit de la beauté du paysage intérieur de son corps, rafraîchi par la fine pluie et la brise printanières, favorisant le labourage qui s’effectue sans effort dans cette terre devenue de l’or jaune.
La perle de rosée, ou remède, est soumise à une cuisson interne, qui s’opère selon des rythmes précis accordée aux rythmes de la nature. Mais si le remède est connu, le régime du feu nécessaire à cette cuisson est jalousement tenu secret. Celui-ci est en relation avec la circulation du souffle dans deux anaux, passant respectivement au milieu du dos et au milieu du devant du corps, formant un anneau; cette circulation du souffle en tant qu’énergies féminine et masculine est comparée à la révolution céleste de la lune et du soleil; Elle accélère le rythme des transmutations. Un célèbre alchimiste chinois du XIe siècle écrit: «Pour l’œuvre divine de circulation du souffle et du feu, il ne faut pas plus d’une matinée; alors le souffle du Yang originel apparaît dans le palais de l’eau, tel le lever du soleil à l’aurore».
Le résultat final est la naissance d’une réplique miniature de l’adepte sous forme d’un être de lumière, cette lumière étant sa nature primordiale progressivement réintégrée à la vacuité. La démarche alchimique est donc ici conçue comme une renaissance. D’une part l’adepte par une inversion, un retour — mouvement essentiel du Tao — remonte jusqu’à l’état de nouveau-né, puis d’embryon, puis d’avant la naissance, effectuant ainsi une plongée profonde aux origines de sa vie; d’autre part il devient un créateur et un parturiant repassant consciemment par les différentes phases de la conception, de la gestation et de la naissance.

L’ESSENTIEL S’OPERE PAR LA MÉDITATION
Si le travail alchimique comporte diverses techniques recourant à des procédés diététiques, gymniques, respiratoires, ou de visualisation, l’essentiel de ce travail s’opère par la méditation dans la quiétude, grâce à laquelle le cinabre intérieur peut être obtenu sans effort. Restant dans un état de parfaite tranquillité, ne réagissant qu’à un stimulus extérieur, c’est ainsi que l’adepte utilise son esprit. Il est tel l’étoile polaire de la Grande Ourse, pivot céleste immuable autour duquel gravitent les étoiles. Il y a dans l’absence de mouvement quelque chose que l’on peut appeler mouvement, présence dans la sérénité de l’eau vive et de la lumière qui fertilisent le paysage intérieur. Au sein de cette clarté spirituelle, la lune brille de tout son éclat dans un ciel sans nuage.
«Avant l’apparition des cinq éléments Avant la génération par les parents Est le corps fondamental, vide parfait Pure sphère de lumière.»
Catherine Despeux.
Source : 3e Millénaire

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