jeudi 24 décembre 2015

La victoire annoncée du casino mondial



Quants, les alchimistes de Wall Street 
Film entier (en anglais) : Youtube


La victoire annoncée du casino mondial. 
Par Liliane Held-Khawam, le 22 décembre 2015 - LHK

On parle beaucoup des ultra-riches en tant que personnes physiques. Rien n’est plus faux. C’est un Système qui s’est mis en place [par les grandes banques]. Le monde a été financiarisé grâce à des instruments financiers puissants élaborés par des ingénieurs et aujourd’hui gérés par des robots. Un Système froid, puissant et totalement déshumanisé. L’intelligence artificielle y remplace l’humain pour un avenir incertain et inquiétant.

Ce Système ne semble plus contrôlable par l’homme. Il est devenu autonome, fonctionne par lui-même, pour lui-même avec une logique qui lui est propre. Impitoyable, il a réussi à accumuler toutes les richesses laissant aux populations leur équivalent sous forme de dettes. Le principe de l’esclavage est posé sous le regard vide de gouvernants humains dépassés par l’ampleur du phénomène.

Les plus futés de la société essaient de faire ami-ami avec le monstre ne voulant pas voir que leur tour viendra d’être broyé un jour. La systématique de la raison leur sera aussi fatale qu’elle l’aura été à leurs congénères. Bref, la financiarisation de la planète pilotée par des robots annonce la défaite de l’humanité et nous fait entrer de plain-pied dans l’ère post-humaine.

Réjouissez-vous !
Liliane Held-Khawam


Graphique

Le Casino géant au service du dieu-argent est étalé ci-dessous [cliquez sur l'image pour l'agrandir] dans toute sa splendeur.
Ce visuel  est éloquent quant au processus de financiarisation de TOUT ce que la planète porte.
Parions que les quelques richesses résiduelles finiront très bientôt sous formes de produits dérivés. L’Etat transnational financier mondial sera alors achevé.





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Dans quel état se trouve véritablement le monde financier
Par Graham Summers,  directeur de la recherche et de l'investissement chez Phoenix Capital, le 9 décembre 2015 - 24hgold

Six années durant, le monde a fonctionné dans l’idée complètement absurde que les banques centrales avaient pu remédier à la crise de 2008.

Tous les arguments venus défendre cette idée ont défié tout bon sens. Un enfant pourrait deviner tout seul qu’il est impossible de résoudre le problème de la dette en en émettant davantage. De la même manière, toute personne dotée d’un cerveau pourrait vous dire qu’une poignée d’intellectuels sans aucune expérience du monde réel et qui n’ont jamais monté une entreprise ou créé un emploi n’est pas en mesure de sauver l’économie.

Mais beaucoup d’argent dépend de notre croyance en cet amas de mensonges. C’est pourquoi les médias, les banques et les politiciens se font une joie de nous les répéter. Nous pourrions facilement aller jusqu’à dire que le capital et le pouvoir que détiennent ceux qui se trouvent au plus haut de la pyramide découlent de cette fiction.

Il n’est donc pas surprenant qu’aucun d’entre eux daigne admettre les faits : la Fed et les autres banques centrales n’ont pas seulement aucune idée de quelle solution apporter au problème, elles n’ont aussi aucune raison de le faire. Mais penchons-nous sur les faits :

1)   Le VRAI problème du système financier est la bulle sur les obligations. En 2008, au début de la crise, elle représentait 80 trillions de dollars. Elle représente aujourd’hui plus de 100 trillions de dollars.
2)   Le marché des produits dérivés qui utilise ces obligations en tant que collatéral représente plus de 555 trillions de dollars.
3)   Une majorité des grosses corporations internationales, des gouvernements souverains et des municipalités ont eu recours aux produits dérivés pour dissimuler leurs revenus et leurs dettes. Personne ne sait jusqu’à quel degré ils ont pu aller, mais puisque 20% des directeurs financiers de corporations ont admis avoir manipulé les revenus de leur entreprise par le passé, il se peut que cette pratique soit extrêmement répandue.
4)   L’effet de levier des corporations est plus élevé aujourd’hui qu’il ne l’était en 2007. Comme l’a récemment soulevé Stanley Druckenmiller, en 2007, les obligations des corporations représentaient 3,5 trillions de dollars… Aujourd’hui, elles représentent 7 trillions de dollars, ou près de la moitié du PIB des Etats-Unis.
5)   L’effet de levier des banques centrales est aujourd’hui supérieur ou égal à celui de Lehman Brothers juste avant son implosion. La Fed a un effet de levier de 78 pour un. Celui de la BCE est de plus de 26 pour un. Celui de Lehman Brothers était de 30 pour un.
6)   Les banques centrales n’ont aucune idée de la manière dont mettre fin à leurs stratégies. Janet Yellen était inquiète de ne pouvoir y mettre fin alors que les bilans de la Fed s’élevaient à 1,3 trillions de dollars. Ils sont aujourd’hui de plus de 4,5 trillions de dollars.

Nous marchons tout droit vers une crise qui sera pire encore que celle de 2008. Les banques centrales du monde ont littéralement parié le système financier sur leurs théories. Et elles n’ont pas fonctionné. Tout ce qu’elles ont fait, c’est rendre le monde plus vulnérable encore. La prochaine crise verra des nations entières sombrer dans la banqueroute.

La situation est claire : la crise de 2008 n’était qu’un échauffement. La véritable crise arrive. Et elle verra s’effondrer le système bancaire centralisé.

Les investisseurs avisés s’y préparent dès aujourd’hui.

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Le Grand Transfert: Le Casino gagne, mais ses Gérants perdront 
Par Bruno Bertez, le 22 décembre 2015 - Le blog à Lupus

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Nous saisissons l’occasion du texte de LHK « La victoire annoncée du casino mondial » [voir plus haut] pour développer une idée plus optimiste, si on ose dire, et affirmer que la névrose financière ne permettra pas aux élites dominantes de gagner. On ne gagne pas quand on vit dans un univers faux, de signes, et de carton-pâte. Hélas les élites auront fait beaucoup de dégâts, causé beaucoup de souffrances avant.


C’est un Système pervers qui s’est mis en place; propulsé et permis par la technique, la technologie et les innovations financières qui accompagnent toujours, dans l’histoire les phases de globalisation, les phases de laxisme monétaire et les phases de jeu spéculatif, vous savez ce que l’on appelle l’appétit pour le risk pour lui retirer son côté sulfureux. Voir les travaux de Michael Pettis sur ce sujet.

Ces périodes sont également celles au cours desquelles on assiste à une croissance exponentielle des inégalités. Ces périodes se terminent presque toujours par des conflits armés très destructeurs, car la masse de « faux capital », de capital de poids mort, accumulée doit être détruite. Elle l’est par l’euthanasie des plus faibles.

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Les classes moyennes non seulement sont laminées et terme de revenu et de patrimoine et de statut social, mais aussi en terme de liberté. Elles déchoient dans une servitude béate, voire veule. Par ailleurs, elles fournissent le gros contingent des victimes des guerres.

Le Système n’est pas neuf, non, c’est le même qui enfle et prospère depuis longtemps avec des ratés et des retours en arrière. Il a pris cette fois un élan, une ampleur et une vitesse de développement que l’on n’imaginait pas dans le passé : accélération de l’histoire, progrès de techniques, inflation de l’arsenal des armes financières de destruction massive pourrait-on dire.

Il y a également les progrès de la pensée, de l’intelligence, stimulés par l’appât du gain, la folie de l’accumulation à tout prix.

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Cette pensée et c’est là où je veux en venir, progresse de façon inégale c’est à dire que le développement du Système n’est pas seulement déséquilibré en termes matériels, il est déséquilibré en terme de compréhension, en terme de capacité à comprendre le monde. La complexité est devenue extrême. Beaucoup sont laissés pour compte. Victimes collatérales.

Le monde n’est plus ce qu’il paraît être au commun des mortels, il s’est complexifié et je dirais enfoui, dissimulé. La vérité ne se donne plus à voir. C’est ce qui explique la facilité avec laquelle les élites et leurs complices trompent les peuples et leurs représentants. Il y a développement inégal de la capacité à comprendre le monde. Les peuples ne comprennent plus et  leurs guides soit sont largués soit ils passent de l’autre coté comme on le voit chez les syndicats et les faux partis de gauche de la sociale démocratie. Il y a développement inégal plus trahison. Ceci rend très difficiles sinon impossibles les luttes, même par ceux qui pourtant seraient capables de les mener en tant que sujets de l’histoire n’ayant plus rien à perdre. Et là je pense aux Grecs. Et aux jeunes.

Je ne suis pas totalement pessimiste pour autant car ceux, une infime minorité, qui refusent cette évolution perverse accélérée du Système ont un allié de poids : cet allié c’est le Réel. Le réel jalonne de ses diverses crises les échecs des nouveaux « saigneurs ».

Les combats que mène l’élite ne sont que des combats pour repousser les échéances, gagner du temps, « kick the can » selon la belle expression qui a été forgée pendant toute la période depuis 2008.

L’élite ne pense pas juste, elle pense faux, elle est névrosée, elle prend ses constructions pour le réel, elle est prise dans un monde faux qui « s’inadapte » lui-même en une forme de boomerang. Les modèles économiques sur lesquels par exemple sont fondés sa finance sont des modèles qui « résonnent » comme des tambours, creux et faux. Ils sont tellement pris dans leur névrose qu’ils prennent leurs tautologies idéologiques pour le monde concret et ce faisant ils augmentent les facteurs de crise, ils les augmentent au fur et à mesure qu’ils repoussent les échéances.

La gravité du sinistre qui va se présenter sera sans commune mesure avec celle que l’on aurait dû subir en 2008. Tout se passe comme si ces élites, pour s’en sortir, creusaient. Creusaient sans se rendre compte que ce qu’ils creusent, c’est leur tombe. Ils s’ensevelissent eux même sous la dette. La fausseté des modèles mathématiques, économiques, pseudo-scientifiques de l’élite dominante, est le principal allié/renfort de ceux qui ont choisi de s’opposer.

Seule la pesanteur de la vérité est efficace. Et elle écrasera les gérants du Casino !

Bruno Bertez

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La Russie débat d’une alternative financière orthodoxe non orthodoxe
Par F. William Engdahl, le 22 novembre 2015 – Neo / Le Saker francophone

Un important débat est en cours en Russie depuis l’imposition des sanctions financières occidentales aux  banques et aux sociétés russes en 2014. Il fait suite à une proposition présentée par le Patriarcat de Moscou de l’Église orthodoxe. La proposition, qui ressemble à bien des égards aux modèles bancaires islamiques sans intérêts, a été dévoilée la première fois en décembre 2014, face à la profondeur de la crise du rouble et au prix du pétrole en chute libre. Depuis août, l’idée a reçu un énorme coup de pouce avec l’approbation de la Chambre de commerce et d’industrie de Russie. Elle pourrait changer l’histoire pour le meilleur selon ce qui en sera fait et où elle conduit.

Il y a vingt ans, pendant l’ère Eltsine, dans le chaos de l’hyperinflation en Russie suite à la thérapie de choc du FMI, l’Église orthodoxe russe a présenté une proposition alternative pour des services bancaires sans intérêts. Pendant cette période, une tripotée d’économistes russes libéraux, adeptes du marché libre, dans l’entourage de Eltsine, comme Yegor Gaider, ont prévalu. Ils ont livré les actifs de l’État russe au pillage par les banques occidentales, les hedge funds et les corporations.

Lors de ma première visite en Russie, en mai 1994, pour donner une conférence dans un institut économique russe sur la thérapie de choc du FMI, j’ai vu de première main la mafia sans foi ni loi, la mafia Russkaya, fonçant à travers la rue Tverskaya presque vide, près de la Place Rouge dans la nouvelle limousine Mercedes 600 dernier modèle, sans plaques d’immatriculation. Ce fut un temps dévastateur pour la Russie, et Washington et les technocrates du FMI savaient exactement ce qu’ils faisaient en favorisant le chaos.

Les sanctions américaines concentrent l’attention

En 2014, beaucoup de choses ont changé en Russie. Plus important encore, l’engouement qui existait il y a deux décennies pour tout ce qui venait de l’Amérique a naturellement disparu. Les sanctions financières du Trésor américain ont été lancées par étapes en 2014 contre des individus spécifiques autour du président Poutine, puis des banques et des sociétés ciblées dépendant du crédit étranger. Elles ont eu pour effet de forcer un réexamen critique de la part des intellectuels, des représentants du gouvernement russe et du Kremlin lui-même.

Les attaques de Washington, actes de guerre contre une nation souveraine légalement parlant, ont été lancées par le Bureau du Trésor américain sur le terrorisme et le renseignement financier, la seule agence de finances publiques dans le monde ayant son propre service de renseignements. Le Bureau a été créé sous le prétexte d’identifier et de geler les avoirs et les comptes bancaires des cartels de la drogue et des terroristes. C’est une chose pour laquelle cette agence semble étrangement inapte si l’on juge la minceur de leur dossier concernant des groupes comme ISIS ou al-Qaïda en Irak. Elle semble beaucoup mieux s’en sortir concernant des pays indésirables comme l’Iran et la Russie. Elle possède des bureaux dans le monde entier, y compris à Islamabad et à Abu Dhabi.

Ces sanctions financières guerrières du Trésor américain et la perspective d’autres bien pire à venir, ont suscité un profond débat en Russie sur la façon de défendre la nation contre de nouvelles attaques. La vulnérabilité de leur système bancaire aux sanctions occidentales a conduit la Russie, comme la Chine, à développer une version russe interne de paiements interbancaires pour remplacer SWIFT. Maintenant, la nature même de l’argent et son contrôle sont au cœur du débat.

Proposition orthodoxe non-orthodoxe

En janvier 2015, au plus profond de la crise financière, avec un rouble valant la moitié de ce qu’il valait quelques mois plus tôt et des prix du pétrole en chute libre à la suite de l’accord de septembre 2014 entre John Kerry et le Roi Abdallah, le Patriarcat de Moscou a réitéré son idée.

Dmitri Lubomudrov, le conseiller juridique de l’Église orthodoxe, a déclaré aux médias à l’époque: «Nous avons réalisé que nous ne pouvions pas rester dépendants du système financier occidental, mais nous devons développer notre propre système. Comme avec le système islamique, celui, orthodoxe, sera basé non seulement sur la législation, mais aussi sur la moralité orthodoxe, et sera une invitation aux hommes d’affaires en quête de sécurité dans un moment de crise.» Parmi ses caractéristiques, il y aurait l’émission de crédit sans intérêt et l’interdiction des investissements dans les casinos ou dans des activités allant à l’encontre des valeurs morales de l’Église.

Puis au début août de cette année, le plan orthodoxe pour la création d’argent sans intérêt a gagné un soutien supplémentaire majeur. Sergei Katyrin, à la tête de la Chambre de commerce et d’industrie russe, après une rencontre avec Vsevolod Chaplin, un haut clerc orthodoxe supervisant le projet, a annoncé: «La Chambre de commerce et d’industrie soutient la création du système financier orthodoxe […] et elle est prête à fournir sa plate-forme pour une discussion approfondie et professionnelle de ces questions avec les commissions compétentes de la chambre.» La proposition vise à réduire la dépendance de la Russie au système bancaire occidental, une exigence essentielle de sécurité économique nationale.

Tout comme les modèles bancaires islamiques ont interdit l’usure, le système financier orthodoxe ne permettrait pas d’intérêts sur ces prêts. Les participants a ces systèmes partagent les risques, les profits et les pertes. Tout comportement spéculatif est interdit, ainsi que les investissements dans le jeu, la drogue et d’autres entreprises qui ne respectent pas les valeurs chrétiennes orthodoxes. Il y aurait une nouvelle banque ou organisme de crédit à faible risque qui contrôle toutes les transactions des fonds d’investissement ou des sociétés qui investissent à la source et organisent la médiation lors du financement du projet. Cela permettrait d’éviter explicitement des opérations présentant des risques financiers. «La priorité serait d’assurer le financement du secteur réel de l’économie» a déclaré son porte-parole.

Fait intéressant, la plus grand république autonome islamique de la Russie, le Tatarstan, a récemment introduit la banque islamique en Russie pour la première fois et cela a été soutenu positivement par German Gref, PDG de l’entreprise publique Sperbank, la plus grande banque de Russie. En mai dernier, M. Gref a qualifié cela d’instrument très important au vu des problèmes actuels de collecte de fonds sur les marchés internationaux. En juillet, la Sberbank et la République du Tatarstan ont signé un accord sur la coopération dans le domaine de la finance islamique.

Sous le tsar Alexandre III et son ministre des Finances Nicolas Bunge, la Russie a créé la Banque foncière des paysans au début des années 1880 pour accorder des prêts sans intérêts aux paysans qui avaient été libérés du servage en 1861 par son père, Alexandre II, et à qui on avait donné de la terre. La Land Bank a investi dans la modernisation de l’agriculture russe, les agriculteurs ne payant qu’un petit supplément pour la gestion des crédits. Le résultat a été une augmentation spectaculaire de la production du blé russe, et d’autres céréales. La Russie est devenue le grenier à blé du monde jusqu’au déclenchement de la Première Guerre mondiale, dépassant la production combinée des États-Unis, de l’Argentine et du Canada de quelque 25%.

Les propositions de Glaziev

La nouvelle importance du modèle monétaire orthodoxe dans les discussions russes vient à un moment où l’un des conseillers économiques de Vladimir Poutine, Sergueï Glayzev, la personne conseillant le président sur l’Ukraine ainsi que sur les relations avec les autres membres de l’Union économique eurasienne, a présenté un plan pour renforcer la sécurité économique et financière nationale de la Russie. Cela dans l’hypothèse tout à fait raisonnable que les sanctions financières et maintenant des pressions militaires de la part de Washington et de l’Otan ne soient pas un accident fortuit, mais une stratégie profonde pour affaiblir et détruire économiquement l’une des deux nations qui se dressent sur le chemin d’un Nouvel Ordre Mondial américain globaliste.

En mai 2014, quelques semaines après que l’administration Obama a imposé une série sélectives de sanctions sur des individus russes importants, des banques et des sociétés d’énergie, frappant au cœur de l’économie, Glazyev a donné une interview au journal financier russe Vedomosti dans laquelle il a proposé un certain nombre de mesures défensives prudentes. Parmi celles-ci, il s’en trouvait plusieurs qui sont maintenant la politique officielle. Cela incluait un échange de crédit et de devises avec la Chine pour financer les importations indispensables ; un changement de règlement sur les devises nationales, le rouble et le renmimbi ; la création d’un système russe d’échange d’informations interbancaires analogue à SWIFT pour les paiements et les règlements au sein de l’Union économique eurasienne et d’autres pays partenaires.

Une proposition stratégique de Glazyev pour que l’État impose un moratoire sur toutes les exportations d’or, de métaux précieux et de terres rares, et exige que la Banque centrale achète l’or sur les marché internationaux pour renforcer les réserves de ce métal. Cette dernière proposition a malheureusement été refusée par le Gouverneur de la Banque centrale, Elvira Nabiullina, qui a dit à la Douma: «Nous ne croyons pas qu’un moratoire soit nécessaire sur les exportations d’or. Nous sommes en mesure d’acheter assez d’or pour diversifier nos réserves d’or et de devises.»

Nabiullina a été critiquée par les membres de la Douma pour d’être beaucoup trop lente dans l’accumulation de réserves d’or pour conforter le rouble. La Russie est aujourd’hui le deuxième plus grand producteur d’or au monde, après la Chine, et la Chine a accumulé au cours des dernières années, via la Banque populaire de Chine, des réserves d’or à un rythme effréné. Les banques centrales occidentales, menées par la Réserve fédérale, depuis que le soutien de l’or pour le dollar a été abandonné en août 1971, ont tout fait, y compris des manipulations de marché, pour décourager dans le monde entier la constitution de réserves d’or en vue d’y adosser des devises.

Plus récemment, le 15 septembre, Glazyev a présenté une nouvelle série de propositions économiques au Conseil de sécurité présidentiel russe pour, comme il le dit lui-même, réduire la vulnérabilité aux sanctions occidentales au cours des cinq prochaines années et préparer les fondations pour une croissance à long terme et la souveraineté économique. Parmi ses propositions, il y avait la création d’un Comité d’État sur la planification stratégique auprès du Président de la Fédération de Russie, et un Comité d’État pour la science et le développement technologique, calqué sur un système créé en Iran dans les années 1990 suite à l’introduction des sanctions occidentales.

La première mesure, la création d’un Comité sur la planification stratégique, fait écho au très réussi modèle français de planification nationale introduit sous la présidence de Charles de Gaulle, qui a été crédité de la transformation de la France, d’une économie largement paysanne stagnante en une nation industrielle avancée moderne et innovante au début des années 1970.

Dans les années 1960, la France a eu un Commissariat général au Plan qui a analysé l’ensemble de l’économie pour identifier les faiblesses critiques nécessitant une attention particulière pour un développement national global. Il devait fixer des objectifs pour les cinq prochaines années. Les membres de la Commission générale étaient des hauts fonctionnaires, des chefs d’entreprise, des syndicats et d’autres groupes représentatifs. Chaque plan proposé était ensuite envoyé au parlement national pour un vote d’approbation ou des amendements.

La différence cruciale entre la planification quinquennale de la France et le modèle soviétique de planification centrale, lui aussi quinquennal, était que le français était indicatif et non impératif comme le fut le plan quinquennal soviétique. Les entreprises privées ou étatiques pouvaient décider librement de se concentrer sur un secteur tel que le développement des chemins de fer, sachant que l’État encouragerait l’investissement avec des incitations fiscales ou des subventions à faible risque pour le rendre attrayant. Cela a été une grande réussite jusqu’au milieu des années 1970, lorsque que, suite aux chocs pétroliers massifs et à l’augmentation des directives réglementaire supra-nationales de Bruxelles, il était devenu de plus en plus difficile à mettre en œuvre.

Il y a d’autres points dans la proposition détaillée de Glazyev. Parmi les plus intéressants, il propose d’utiliser les ressources de la Banque centrale pour fournir des prêts ciblés pour les entreprises et les industries en leur fournissant de faibles taux d’intérêt, entre 1% et 4%, rendus possible par un assouplissement quantitatif [planche à billets, NdT] à hauteur de 20 milliards de roubles sur une période de cinq ans. Le programme suggère également que l’État supporte les entreprises privées au travers de la création d’obligations réciproques pour l’achat de produits et de services à des prix convenus.

La Russie est dans un processus fascinant qui repense chaque aspect de sa survie économique nationale, du fait de la réalité des attaques occidentales. Cela pourrait conduire à une transformation très saine, loin des défauts mortels du modèle financier de libre marché anglo-américain.

F. William Engdahl est consultant en risques stratégiques et conférencier, il est titulaire d’un diplôme en politique de l’Université de Princeton et est l’auteur de best-seller sur le pétrole et la géopolitique, exclusivement pour le magazine en ligne http://journal-neo.org.

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