mardi 25 octobre 2011

Isabelle Ratié


Isabelle Ratié, docteur en philosophie (2009, EPHE, Sorbonne, Paris), est chercheuse à l’Institut für Indologie und Zentralasienwissenschaften (université de Leipzig). Elle a publié plusieurs articles sur la Pratyabhijñā et prépare actuellement l’édition critique et la traduction du chapitre II, 4 de l’Īśvarapratyabhijñāvimarśinī d’Abhinavagupta.
Source du texte : Brill


Si les récents travaux de recherche consacrés au śivaïsme ont permis de mieux comprendre les dimensions religieuses des mouvements śivaïtes médiévaux, les aspects proprements philosophiques de certains des textes produits dans ces milieux demeurent largement méconnus. La présenté étude [Le Soi et l'Autre] se propose de contribuer à combler cette lacune en explorant le système philosophique complexe et original élaboré par les śivaïtes non dualistes cachemiriens Utpaladeva (925-975) et Abhinavagupta (975-1025). Montrant que ce système ne se réduit pas à une exégèse scripturaire, l’ouvrage examine la genèse des concepts de la philosophie de la Pratyabhijñā ou “Reconnaissance” en prenant en compte la complexité du champ philosophique (déjà investi par divers courants aussi bien bouddhiques que brahmaniques) dans lequel la pensée d’Utpaladeva s’est développée.
Source du texte : Brill


Bibliographie (en français) :
- Le Soi et l’Autre. Identité, différence et altérité dans la philosophie de la Pratyabhijñā, Jerusalem Studies in Religion and Culture 13, Brill, Leiden, 2011, 785 pp.
Commande sur Amazon : Le Soi et l'Autre : Identite, Difference et Alterite dans la Philosophie de la Pratyabhijna.
 - Le non-être, une preuve de l’existence du Soi ? La notion d’abhāva dans la philosophie de la Pratyabhijñā, Journal Asiatique 298 (2), 2010, pp. 421-493
- La Mémoire et le Soi dans l’Īśvarapratyabhijñāvimarsinī d’Abhinavagupta, Indo-Iranian Journal 49 (1-2), 2006, pp. 39-103.
En ligne : Introduction aux problèmes de la philosophie indienne classique et médiéval (compte rendu d'un cycle de conférences)

Bibliographie exhaustive : Université de Leipzig


Introduction - Le non-être et la stratégie de la Pratyabhijna.
Rien n'est plus ordinaire que l'expérience du non-être : il n'est pas d'existence pratique sans la compréhension familière que tel objet manque, que telle personne est absente, que telle chose n'est pas telle autre. Cette compréhension a pourtant quelque chose de mystérieux : comment pouvons-nous prendre conscience de ce qui semble devoir échapper à toute perception parce que cela n'est rien ?  (...)
Extrait de : Le non-être, une preuve de l’existence du Soi ? La notion d’abhāva dans la philosophie de la Pratyabhijñā, Journal Asiatique 298 (2), 2010, pp. 421-493


(...)
Il est vrai que cette reconnaissance émerveillée de soi n'est en rien garantie par la raison. Comme Utpaladeva l'admet lui-même, les plus belles démonstrations de cette absence de contradiction ne produisent pas nécessairement, chez un sujet empirique pourtant saturé de bonne volonté, la réalisation de son identité avec la conscience absolue. Car dans un système qui fait une place aussi immense à la liberté, la nécessité de la raison n'est contraignante qu'à condition que la conscience veuille bien se laisser contraindre, et même si la démarche rationnelle du traité parvient au but que la Pratyabhijna lui assigne, il demeure un gouffre entre l'admission théorique de la possibilité de dire du Soi qu'il est le Seigneur décrit par Utpaladeva et Abhinavagupta, et la pleine réalisation de cette identité. Ce gouffre, paradoxalement, n'est qu'un écart infinitésimal, la "pointe" évanouissante d'un acte cognitif : le sujet qui fait nécessairement l'expérience de sa pure subjectivité lorsqu'il comprend l'inférence constituée par le traité est toujours libre d'ignorer cette expérience au-delà du temps et cependant nichée au coeur de la temporalité, de laisser passer cet instant fugitif dans lequel il n'est plus que la conscience absolue d'être conscience absolue - il lui suffit de ne porter attention qu'à l'état intermédiaire de l'acte cognitif dans lequel il s'appréhende lui-même comme un sujet saisissant un objet conceptuel distinct de lui, et de se laisser emporter, instant après instant, dans le flot des concepts, sans jamais prendre pleine conscience de la subjectivité dont sourd et dans laquelle se résorbe constamment ce flot. En dernière instance, c'est donc de la grâce (anugraha) seule que dépend la Reconnaissance : la raison ne peut que mettre en évidence une évidence à laquelle la conscience peut toujours refuser de se rendre. De ce point de vue, le système de la Pratyabhijna a quelque chose de profondément tragique - ou de profondément comique, comme on voudra : ce ne sont là sans doute que deux aspects partiels que recouvre la notion de jeu (drita) de la conscience -, car la grâce des sivaites non dualistes n'est certes pas le bon vouloir d'un dieu lointain, mais celui de la conscience elle-même choisissant de s’apparaître aliénée, elle n'en demeure pas moins appréhendée par le sujet aliéné comme le bon vouloir d'un Autre auquel il demeure désespérément suspendu, précisément parce que le sujet empirique est la conscience s'apparaissant comme aliénée. (...)
Extrait (sans les notes) de : Le Soi et l’Autre. Identité, différence et altérité dans la philosophie de la Pratyabhijñā, Jerusalem Studies in Religion and Culture 13, Brill, Leiden, 2011, 785 pp.
Commande sur Amazon : Le Soi et l'Autre : Identite, Difference et Alterite dans la Philosophie de la Pratyabhijna.
   

3 commentaires:

  1. Bonsoir,
    J'effectue des recherches sur la notion Abhava/Bhava et le temps.
    Pouvez-vous m'éclairer s'il vous plait ?
    Merci à vous.

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  2. Bonjour,
    Je ne suis pas un spécialiste par contre David Dubois : http://shivaisme-cachemire.blogspot.ch/
    Bonnes recherches

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  3. Merci à vous !
    Bonne continuation.

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