mercredi 6 avril 2016

L’incroyable blanchiment du glyphosate cancérigène de Monsanto par Bruxelles

L’incroyable blanchiment du glyphosate cancérigène de Monsanto par Bruxelles
Par William F. Engdahl, le 11 mars 2016 – New Eastern Outlook / Le Saker francophone (trad)

Cette déclaration que le lobby de l’agrobusiness et spécialement l’ECPA  «est très contrarié que des pays puissent être influencés par… le principe de précaution» est une forme d’honnêteté étonnante de la part d’une organisation de lobbying parmi les plus corruptrices de l’Union Européenne.



Encore une incroyable histoire de corruption concernant Bruxelles. La Commission européenne est prête à approuver une nouvelle autorisation de mise sur le marché pour un produit reconnu cancérigène, le glyphosate, malgré les avertissements de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et de scientifiques indépendants du monde entier disant que ce produit est toxique pour les humains et les animaux. Mais de fortes protestations ont poussé l’UE à repousser au dernier moment sa tentative de vote pour approbation.

Le commissaire à la santé et à la sécurité alimentaire, Vytenis Andriukaitis, a repoussé la procédure de ré-autorisation ce mois ci, non pas parce qu’il a adopté une courageuse position morale en s’opposant au groupe corrompu qu’est l’Agence européenne pour la sécurité alimentaire, l’AESA, et en interdisant le renouvellement de l’autorisation pour l’herbicide le plus utilisé au monde, le glyphosate. Il est, au contraire, tout à fait disposé à renouveler cette autorisation. Même si un groupe de scientifiques de l’OMS a, en 2015, nommé le glyphosate comme un probable cancérigène humain et animal. Non, il a repoussé l’autorisation seulement parce que quatre États membres ont, contre toute attente, refusé d’approuver le renouvellement. Maintenant, Andriukaitis et le cartel des herbicides et OGM sont en train de chercher un nouveau moyen de réintroduire une demande d’autorisation.

Le glyphosate est un produit chimique très toxique et le composant principal de l’herbicide nommé Round Up de Monsanto. Sous d’autres formes, le glyphosate est aussi vendu par la plupart des compagnies agrochimiques mondiales dont BASF, Syngenta, Dow Chemical, DuPont et la Zhejiang Wynca Chemical chinoise.

Dans les années 1970, un chimiste de Monsanto, John Franz, l’a synthétisé avec des additifs chimiques ultra toxiques et il est rapidement devenu l’herbicide le plus utilisé aux États-Unis et en Europe. Aujourd’hui, le glyphosate est couplé à des OGM résistants au glyphosate tels que les sojas ou les maïs Roundup ready de Monsanto. Tous les plants OGM de Monsanto doivent, par contrat, utiliser le Roundup à base de glyphosate car «Cernez ces horribles mauvaises herbes et tuez les toutes».

Le problème pour renouveler l’autorisation du glyphosate est qu’en mars 2015, l’Agence internationale de recherche sur le cancer (AIRC), une branche de l’OMS, a classifié le glyphosate comme «probablement cancérigène pour les humains», à la suite d’études épidémiologiques sur l’animale et in vitro.

L’AIRC a fait une étude indépendante et extensive sur tous les indices, disponibles publiquement, liant le glyphosate au cancer. L’AIRC est spécialement qualifiée pour conduire de telles recherches, comme elle le fait depuis 40 ans au nom de l’OMS. Elle a examiné des centaines de produits chimiques et est considérée comme un organisme de référence par tous les gouvernements du monde. Des experts non affiliés à l’industrie ont témoigné de son intégrité et de sa crédibilité scientifique.

Alors que d’autres preuves de la haute toxicité du glyphosate, en combinaison avec d’autres additifs non précisés, apparaissent, l’attention portée par les organisations environnementales et de la santé sur les dangers d’un renouvellement pour 15 ans de l’autorisation européenne augmente.

Si l’UE en venait à supprimer la licence d’exploitation du glyphosate, cela porterait un coup fatal au premier herbicide mondial et à Monsanto ainsi qu’à l’industrie mondiale des OGM. Mais il ne s’agit pas seulement de profits commerciaux, c’est une question de géopolitique. Devinez qui exerce une pression intense sur Bruxelles pour arracher son renouvellement ?

L’ECPA

J’imagine que peu de lecteurs ont entendu parler de l’ECPA, l’European Crop Protection Association [L’Association européenne de protection des cultures, NdT]. Son site internet stipule qu’elle «représente les intérêts de l’industrie de protection des cultures au niveau européen. Toutes les principales compagnies et associations nationales d’Europe font partie de nos membres. Notre objectif est de rassembler tous ceux ayant un intérêt pour la protection des cultures afin d’échanger nos connaissances et apprendre les uns des autres. Ensemble, nous nous efforçons d’apporter des solutions dans un environnement européen très compétitif». La protection des cultures, cela sonne bien, n’est ce pas ?

La consommation mondiale de pesticides. En millions de livres.

Traduit rapidement, la déclaration de mission de l’ECPA, c’est de la merde. L’ECPA est une organisation de lobbying importante à Bruxelles, qui représente Monsanto, Dow Chemicals, Dupont, Syngenta, Bayer Cropsciences, BASF agro et d’autres. Quand il fut annoncé que quatre pays, la France, la Suède, la Hollande et l’Italie, étaient tous opposés au renouvellement de l’autorisation européenne du glyphosate, Jean Charles Bocquet, directeur de l’ECPA a dit : «Nous sommes très contrariés par le fait que certains pays ont été influencés par des pressions politiques venant du Comité à l’environnement du Parlement européen, d’ONG et par le principe de précaution.»

Cette déclaration que le lobby de l’agrobusiness et spécialement l’ECPA soit «très contrarié que des pays puissent être influencés par […] le principe de précaution » est une forme d’honnêteté étonnante de la part d’une organisation de lobbying parmi les plus corruptrices de l’Union européenne.

Le principe de précaution veut dire qu’en cas de risques, même présumés, de dommage à la population ou à l’environnement alors, en l’absence de consensus scientifique quant à la sécurité de l’action ou de la politique envisagée, la charge de la preuve revient à ceux qui exercent cette action ou politique, dans ce cas, Monsanto et le lobby agrochimique. C’est une loi de l’Union européenne. On dirait que l’ECPA admet qu’elle porte peu d’estime à ce principe de précaution. La domination de l’agrobusiness über alles. Mieux vaut être désolé qu’en sécurité ?

L’AESA faux nez de Monsanto.

En novembre 2015, l’AESA, l’Agence européenne pour la sécurité alimentaire, a ouvert la voie à la ré-autorisation du glyphosate. Elle a déclaré qu’ «il est peu probable que le glyphosate ait un effet cancérigène sur les humains… ». L’AESA s’est opposée aux déclarations de l’OMS en se basant sur six études financées par l’industrie agrochimique dont le détail des recherches n’a jamais été publié en entier ni dans des journaux scientifiques indépendants.

La déclaration de l’AESA comme quoi le glyphosate n’est pas cancérigène, et donc sain, se fonde sur une étude faussée du gouvernement allemand reposant elle-même sur une étude agrochimique faite par le Glyphosate Task Force. En résumé, une étude sans valeur réalisée par Monsanto et son Glyphosate Task Force a été sheep dippée [blanchie, NdT] par le gouvernement allemand pour lui donner un peu de crédibilité, puis transmis à l’AESA à Bruxelles qui l’a recommandée sans autre travail critique pour une autorisation par l’Union européenne.

L’expression sheep dippé a un double sens, mais les deux sont appropriés à notre cas. Sheep dipper un militaire ou un policier veut dire le déguiser pour qu’il ne soit plus reconnaissable comme policier mais plutôt comme un civil se confondant dans le groupe à infiltrer. La Commission européenne a sheep dippé ou déguisé une étude de Monsanto pour déclarer l’innocuité du glyphosate.

Sheep dipper veut aussi dire baigner un mouton dans un bain de produits chimiques très toxiques pour tuer les parasites externes comme les tiques ou les sangsues. Les bains pour moutons traditionnels sont faits de composants organophosphorés, dont on fait aussi les armes chimiques. Les composants organophosphorés sont très toxiques pour les humains car ils traversent facilement la peau. L’AESA et la Commission Européenne nous sheep dippent dans leur autorisation d’utilisation du glyphosate.

La Commission européenne et les États européens se partagent la responsabilité d’assurer la qualité et la sécurité des différents produits chimiques utilisés en Europe. Le Bureau fédéral allemand pour la protection des consommateurs et la sécurité alimentaire a eu la responsabilité de réétudier l’impact du glyphosate, en 2012, pour toute l’Europe. L’Allemagne a soumis son rapport sur le renouvellement de l’autorisation du glyphosate en janvier 2014, un énorme document préparé pour le Bureau fédéral allemand pour la protection des consommateurs et la sécurité alimentaire par l’Institut fédéral de l’évaluation des risques (Bfr).

C’est sur ce rapport allemand que l’AESA s’est basée pour sa décision de novembre 2015. Par contre, le Bfr a refusé de divulguer les deux études clés de toxicité sur lesquelles étaient fondées leur décision car, déclarèrent ils, ces études pourraient contenir des informations commercialement confidentielles. En plus, non seulement le rapport du Bfr allemand recommande l’approbation du glyphosate pour une utilisation européenne, mais elle a aussi augmenté l’exposition ou assimilation quotidienne au produit de 66%, passant la dose de 0,3 a 0,5 mg/Kg/Jour. Aucun principe de précaution ne tient avec ces gens. A fond les manettes !

Pour en rajouter à la collection de faits de corruption par la Commission européenne et l’AESA, et dans un cas que l’on pourrait qualifier d’entreprise criminelle en vue du renouvellement d’autorisation de glyphosate, le comité aux pesticides du Bfr allemand a, en tant que membres de son comité, des personnes directement lié au glyphosate, dont deux employés de BASF et un de Bayer Crop Science. Bayer et BASF sont tous les deux membres de l’ECPA. Jusqu’à peu BASF était associé avec Monsanto pour répandre les cultures d’OGM.

Encore plus étonnant pour ceux qui croient naïvement que l’administration allemande garde son intégrité quand il est question de santé et de sécurité, le Bfr allemand n’a pas réalisé son rapport tout seul. Il a, au contraire, utilisé le travail du Glyphosate Task Force (GTF). Le GTF est «un consortium d’entreprises groupant leurs forces pour le renouvellement d’autorisation européenne du glyphosate en faisant une demande commune». Parmi les membres du GTF, on compte Monsanto, Dow Agro Science et Syngenta ainsi que d’autres compagnies d’agrochimie.

Monsanto et Syngenta ont sheep dippé leur évaluation des risques, publiée par leur propre glyphosate Task Force, grâce au gouvernement allemand, son Bfr et son agence de protection du consommateur. Le ministre allemand a remis son rapport à Bruxelles et à l’AESA, qui l’a repris directement à son compte. Et maintenant, le commissaire européen sans honneur qu’est Andriukaitis a repris le rapport du GTF-Bfr-AESA pour justifier son intention de renouveler l’autorisation malgré toutes les indications de risque. En juin de cette année l’autorisation d’utilisation du glyphosate expire.

Le commissaire européen crache sur la science.

La conclusion de l’AESA et son acceptation inconditionnelle par le commissaire européen pour la sécurité alimentaire, Vytenis Andriukaitis, était si énorme qu’elle a provoqué la rédaction immédiate d’une lettre de protestation par 96 scientifiques reconnus, dont la plupart des scientifiques ayant participé à l’étude IARC 2015 de l’OMS. Cette lettre au commissaire Andriukaitis déclare que les bases de recherche de l’AESA n’étaient «pas crédibles car manquant de preuves. En conséquences, nous vous demandons, à vous et à la Commission européenne de ne pas considérer les fausses conclusions de l’AESA». Entre autres erreurs, ont-ils argumenté, l’AESA a choisi de ne pas tenir compte de sept études sur des animaux montrant un accroissement du nombre de tumeurs cancéreuses.

Le commissaire européen Andriukaitis répondit d’une façon moralement irresponsable en écrivant : «Je ne peux pas répondre à votre demande de ne pas tenir compte des conclusions de l’AESA.»

Andriukaitis a menti. Il pouvait très bien citer les preuves des 96 scientifiques qui demandaient une évaluation scientifique totalement indépendante du glyphosate. Encore un bureaucrate sans honneur qui prend des décisions fondamentales concernant la vie humaine sans apparemment sentir le moindre besoin d’être responsable d’une manière démocratique. Cela rappelle beaucoup la bureaucratie soviétique de l’ère stalinienne. Andriukaitis, qui est né pendant l’ère stalinienne, devrait pourtant comprendre de telles choses. Pendant les années 1940 toute sa famille a été déportée dans les camps de travaux forcés de Sibérie, où Andriukaitis est né en 1951 et a vécu jusqu’à l’âge de sept ans.

William F. Engdahl.

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Pesticides : la malédiction du soja (France 2, Envoyé spécial, 19 mars 2016)

Il tue les mauvaises herbes, mais il empoisonnerait le bétail et les hommes. Cancers, malformations, voici un document inédit sur un herbicide très utilisé dans l'agriculture.
En France, au Danemark ou encore en Argentine, le glyphosate est une molécule omniprésente dans les terres agricoles comme dans les jardins privés. C'est l'un des composants du Roundup, cet herbicide best-seller de la multinationale Monsanto.

Les mauvaises herbes font de la résistance
Des porcelets qui naissent avec deux têtes, des enfants qui viennent au monde avec de graves malformations et des mauvaises herbes qui résistent toujours plus à l'herbicide et appelle à un usage encore plus massif : les accusations ne manquent pas. Le problème est toujours de les prouver pour obtenir une éventuelle interdiction. On en est loin.
Source : FranceTVinfo

Voir aussi les pages : Monsanto

1 commentaire:

  1. Le combat n'est pas encore terminé : http://abonnes.lemonde.fr/planete/article/2016/04/07/roundup-bruxelles-demande-a-monsanto-de-rendre-publiques-ses-etudes_4897456_3244.html

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