mardi 3 mai 2016

TTIPleaks (ou TAFTAleaks)

MAJ de la page : TTIP ou TAFTA


TTIPleaks
Une fuite du Traité transatlantique confirme les menaces sur l'environnement
Le 2 mai 2016 - Greenpeace 

Greenpeace Pays-Bas a obtenu 248 pages confidentielles du projet de Traité de libre-échange transatlantique (Transatlantique Free Trade Agreement, TTIP ou TAFTA). Ces documents ont été rendus publics intégralement par Greenpeace Pays-Bas, ce matin à 11h. Ils représentent les 2/3 du texte du traité à l’ouverture en avril du 13e round de négociation entre les Etats-Unis et l’Union européenne à New York. Ils recouvrent treize chapitres sur des questions allant des télécommunications aux pesticides, de l’alimentation à l’agriculture en passant par les barrières commerciales.

"Ces documents confirment ce que nous disons depuis longtemps, explique Jorgo Riss, le Directeur de l’Unité européenne de Greenpeace: ce traité mettrait les intérêts des grandes entreprises au centre du processus de décision politique et législatif au détriment des enjeux environnementaux ou de santé publique. Nous savions que la position européenne était mauvaise mais ces documents montrent que la position américaine est encore pire. Un compromis entre les deux serait désastreux."

Les principaux risques identifiées par Greenpeace

- L’ancienne règle de la protection environnementale supprimée
La règle de "l'exception générale", vieille de 70 ans et consacrée par l’accord du GATT (Accord Général sur les tarifs douaniers et le commerce signé en 1947) et par l’OMC est absente du document. Ce principe permet aux nations de "réguler le commerce" pour "protéger la vie, la santé des humains, des animaux et des plantes".

- La lutte contre les changements climatiques mise à mal par le TTIP
Dans les documents révélés demain, les intérêts commerciaux ne semblent être soumis à aucune règle ni objectifs de réduction des émissions de CO2. Pire, les mesures de réduction semble être entravées dans les chapitres sur la "coopération réglementaire" et sur "l'accès aux marchés" des biens industriels. Par exemple, la régulation des importations de carburants forts émetteurs de CO2 comme ceux issus des sables bitumineux serait proscrite.

- Le principe de précaution oublié
Le principe de précaution tel qu’inscrit dans la Constitution européenne (article 191), n’est mentionné dans aucun des treize chapitres révélés. Par contre, les Etats-Unis réussissent à insérer dans plusieurs chapitres leur approche du risque environnemental ou sanitaire qui consiste à "gérer" les substances dangereuses plutôt que de les éviter. Ceci saperait la capacité du régulateur à prendre des mesures préventives contre de telles substances comme par exemple les perturbateurs endocriniens.

- Une mainmise des entreprises sur les grandes décisions
Tandis que la protection de l’environnement ou de la santé est mise à mal, les grandes entreprises ont accès aux premiers stades des prises de décision.



En publiant ces documents, Greenpeace appelle tous les décideurs politiques européens, parlementaires à les lire et s’en saisir, tant les conditions de consultation était jusqu’alors restreintes. Cette publication permettra enfin à des millions de citoyens de mieux comprendre ce qui se négocie en leur nom.

"Les effets du traité sont à priori subtiles mais seront finalement dévastateurs, explique Jorgo Riss. Les lois européennes seraient jugées en fonction de leurs conséquences sur le commerce et
l’investissement, au détriment de l’environnement et de la santé."

Ces documents publiés représentent un long et complexe texte légal. Greenpeace Pays-Bas s’est associée à un collectif de journalistes allemands de la WDR, NDR et du Süddeutscher Zeitung.

* * *

Partenariat transatlantique: une folie !
Par Marie-Hélène Miauton, le 25 février 2016 - Le Temps

Le 12e cycle de négociations sur le partenariat transatlantique entre l’UE et les USA s’est ouvert à Bruxelles ce 22 février. La Suisse en subira les conséquences mais le projet est mal connu parce que tenu secret. Marie-Hélène Miauton fait un point critique de la situation

Le traité de libre-échange transatlantique (TTIP/TAFTA) suscite des interrogations, voire des inquiétudes, quand ce n’est pas un franc rejet au sein de nombreux milieux de l’Union européenne. Par ricochet, la Suisse sera forcément touchée par cet accord dont l’ampleur frise le jamais vu puisqu’il concernera presque la moitié du commerce mondial. Il est donc utile de s’y intéresser et de comprendre la nature des changements qu’il amènera. Comme chacun le sait, il s’agit de créer un marché unique entre les USA et l’UE, en supprimant non seulement les droits de douane qui existent encore sur certains produits, agricoles entre autres, mais aussi d’harmoniser les normes qui prévalent à leur fabrication ou production, ainsi que pour les services.

Sous le sceau de la confidentialité

Pour l’instant, les transactions se déroulent sous le sceau de la plus stricte confidentialité, les Américains ayant opposé un veto catégorique à la divulgation des discussions intermédiaires. Ces cachotteries ne font qu’aviver les peurs. Peur d’un redoutable concurrent auquel on ouvre grand les portes. Peur d’un nivellement par le bas des normes de qualité et de sécurité, sur la base de standards américains plutôt laxistes en regard des nôtres. Peur de la mauvaise foi, réelle ou supposée, d’un interlocuteur réputé pour ne pas s’encombrer d’états d’âme en matière commerciale. Peur d’un enterrement de première classe pour l’agriculture, secteur européen le plus malmené par la mondialisation, avec la disparition des AOC par exemple, qui furent si soigneusement élaborées. Peur enfin d’un affadissement culturel puisque l’identité, chacun le sait, commence par ce que nous mangeons et s’étend à notre façon d’enseigner ou de soigner, ce qui détermine au plus près la vie des populations.

L’emprise de la loi dans le domaine des services

Dans le domaine des biens, rien n’échappe à l’accord, mais c’est dans le domaine des services que son emprise est la plus grande. Mis à part les charges régaliennes, tout en fait partie, y compris les professions libérales. Pourtant, il tombe sous le sens que certains domaines sont stratégiques et qu’ils devraient en être exclus. Pensons à l’eau (dont on sait l’importance actuelle et future), à l’enseignement et la culture, ou à la santé. Par quelle perversion de la pensée, les gouvernements peuvent-ils ainsi se dépouiller eux-mêmes de leurs prérogatives essentielles? Les peuples européens qui, depuis l’avènement de l’UE, se plaignent déjà que les décisions ne sont plus prises au niveau de proximité où elles s’appliquent, devront encore se soumettre à des règles atlantistes. Quant à l’instauration d’une Cour des investissements, soit un tribunal d’arbitrage privé pour traiter des différents économiques, elle ouvrirait la voie à une internationalisation de la justice (à l’américaine?) et à la multiplication du système des amendes.

Manque de représentativité de la commission européenne

Il faut encore ajouter le manque de représentativité démocratique de la Commission européenne, chargée depuis 2013 de négocier avec les USA. Une fois le projet sous toit, c’est le Conseil européen qui l’approuvera, c’est-à-dire le sommet des chefs d’Etat des 28 pays de l’Union. Les peuples n’auront pas forcément leur mot à dire alors qu’on sait très bien qu’ils ne veulent pas de cet accord. De nombreux milieux tentent actuellement de s’y opposer par les rares moyens à leur disposition, mais la Commission est sourde…

A quoi répond cette hâte d’élargir, encore et toujours, le champ du libre-échange? L’Union vient de procéder à son propre marché unique, non sans mal et avec de nombreux grincements de dents. Et, avant même qu’il soit digéré, la voilà qui, au pas de charge, souhaite l’élargir aux USA, tant l’ouverture est à la mode, quels que soient ses conséquences et ses avantages mesurables. Une véritable fuite en avant, peut-être pour cacher les vrais problèmes.

La Suisse doit rester libérale, mais pas idiote

Quant à la Suisse, elle a beau être un pays libéral, et qui doit le rester, cela ne l’oblige pas à être idiote. Comme on connaît ses saints, on les honore dit le bon sens populaire. Or, on connaît l’administration américaine, qu’elle soit âne ou éléphant, peu importe. Elle est efficace parce que sans scrupule et elle cache sous un vernis moralisateur sa lutte permanente pour maintenir ses intérêts géostratégiques et économiques. Les banquiers suisses en savent quelque chose… dont les clients ont pu se réfugier sous les cieux plus cléments des paradis fiscaux américains, ce que j’avais dénoncé dans un livre paru il y a quatre ans déjà.

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