Dans son œuvre il se propose, soit d'« exposer directement certains aspects des doctrines métaphysiques de l'Orient », doctrines métaphysiques que René Guénon définissait comme étant « universelles », soit d'« adapter ces mêmes doctrines [pour des lecteurs occidentaux] en restant toujours strictement fidèle à leur esprit » ; il ne revendiqua que la fonction de « transmetteur » de ces doctrines , dont il déclarait qu'elles sont de nature essentiellement « non-individuelle », reliées à une connaissance supérieure, « directe et immédiate » qu'il nomme « intuition intellectuelle ». Ses ouvrages, écrits en français (il contribua également en arabe pour la revue El Maarifâ), sont traduits en plus de vingt langues.
Son œuvre, qui oppose aux civilisations orientales restées selon lui fidèles à l'« esprit traditionnel », l'ensemble de la civilisation moderne considérée comme déviée, a modifié en profondeur la réception de l'ésotérisme en Occident dans la seconde moitié du xxe siècle, et a eu une influence marquante sur des auteurs aussi divers que Mircea Eliade, Raymond Queneau ou encore André Breton.
Source : wikipedia / Autre présentation
Bibliographie :
- Introduction générale à l'étude des doctrines hindoues, Marcel Rivière, Paris, 1921
- Le Théosophisme, histoire d'une pseudo-religion, Nouvelle Librairie Nationale, Paris, 1921
- L'Erreur spirite, Marcel Rivière, Paris, 1923
- Orient et Occident, Payot, Paris, 1924
- L'Homme et son devenir selon le Vêdânta, Bossard, Paris, 1925
- L’Ésotérisme de Dante, Ch. Bosse, Paris, 1925
- Le Roi du Monde, Ch. Bosse, Paris, 1927
- La Crise du monde moderne, Bossard, Paris, 1927
- Autorité spirituelle et pouvoir temporel, Vrin, Paris, 1929
- Saint Bernard, Publiroc, 1929
- Le Symbolisme de la Croix, Véga, 1931
- Les États multiples de l'Être, Véga, 1932
- La Métaphysique orientale, Editions traditionnelles, 1939
il s'agit de la transcription d'une conférence donnée à la Sorbonne en 1926
- Le Règne de la Quantité et les Signes des Temps, Gallimard, 1945
- Les Principes du Calcul infinitésimal, Gallimard, 1946
- Aperçus sur l'Initiation, Éditions Traditionnelles, 1946
- La Grande Triade, Gallimard, 1946
Bibliographie complète
En ligne :
- La crise du monde moderne (texte intégral) : scribd
- autres textes : scribd
Voir aussi les pages : Infini et indéfini / René Guénon ou la tradition
CONSIDÉRATIONS ANALOGIQUES TIRÉES DE L'ÉTUDE DE L'ÉTAT DE RÊVE - Extrait de Les Etats multiples de l'Etre
Nous quitterons maintenant le point de vue purement métaphysique auquel nous nous sommes placé, dans le chapitre précédent, pour envisager la question des rapports de l'unité et de la multiplicité, car nous pourrons peut-être mieux encore faire comprendre la nature de ces rapports par quelques considérations analogiques, données ici à titre d'exemple, ou plutôt d' « illustration » , si l'on peut ainsi parler, et qui montreront dans quel sens et dans quelle mesure on peut dire que l'existence de la multiplicité est illusoire au regard de l'unité, tout en ayant, bien entendu, autant de réalité qu'en comporte sa nature. Nous emprunterons ces considérations, d'un caractère plus particulier, à l'étude de l'état de rêve, qui est une des modalités de manifestation de l'être humain, correspondant à la partie subtile (c'est-à-dire non-corporelle) de son individualité, et dans lequel cet être produit un monde qui procède tout entier de lui-même, et dont les objets consistent exclusivement dans des conceptions mentales (par opposition aux perceptions sensorielles de l'état de veille), c'est-à-dire dans des combinaisons d'idées revêtues de formes subtiles, ces formes dépendant d'ailleurs substantiellement de la forme subtile de l'individu lui-même, dont les objets idéaux du rêve ne sont en somme qu'autant de modifications accidentelles et secondaires .
L'homme, dans l'état de rêve, se situe donc dans un monde qui est tout entier imaginé par lui, dont tous les éléments sont par conséquent tirés de lui-même, de sa propre individualité plus ou moins étendue (dans ses modalités extracorporelles), comme autant de « formes illusoires » (mâyâvirâpa) , et cela alors même qu'il n'en possède pas actuellement la conscience claire et distincte. Quel que soit le point de départ intérieur ou extérieur, pouvant être fort différent suivant les cas, qui donne au rêve une certaine direction, les événements qui s'y déroulent ne peuvent résulter que d'une combinaison d'éléments contenus, au moins potentiellement et comme susceptibles d'un certain genre de réalisation, dans la compréhension intégrale de l'individu ; et, si ces éléments, qui sont des modifications de l'individu, sont en multitude indéfinie, la variété de telles combinaisons possibles est également indéfinie. Le rêve, en effet, doit être regardé comme un mode de réalisation pour des possibilités qui, tout en appartenant au domaine de l'individualité humaine, ne sont pas susceptibles, pour une raison ou pour une autre, de se réaliser en mode corporel ; telles sont, par exemple, les formes d'êtres appartenant au même monde, mais autres que l'homme, formes que celui-ci possède virtuellement en lui-même en raison de la position centrale qu'il occupe dans ce monde . Ces formes ne peuvent évidemment être réalisées par l'être humain que dans l'état subtil, et le rêve est le moyen le plus ordinaire, on pourrait dire le plus normal, de tous ceux par lesquels il lui est possible de s'identifier à d'autres êtres, sans cesser aucunement pour cela d'être lui-même, ainsi que l'indique ce texte taoïste : « Jadis, raconte Tchoang-tseu, une nuit, je fus un papillon, voltigeant content de son sort ; puis je m'éveillai, étant Tchoang-tcheou. Qui suis-je, en réalité ? Un papillon qui rêve qu'il est Tchoang-tcheou, ou Tchoang-tcheou qui s'imagine qu'il fut papillon ? Dans mon cas, y a-t-il deux individus réels ? Y a-t-il eu transformation réelle d'un individu en un autre ? Ni l'un ni l'autre ; il y a eu deux modifications irréelles de l'être unique, de la norme universelle, dans laquelle tous les êtres dans tous leurs états sont un ».
Si l'individu qui rêve prend en même temps, dans le cours de ce rêve, une part active aux événements qui s'y déroulent par l'effet de sa faculté imaginative, c'est-à-dire s'il y joue un rôle déterminé dans la modalité extra-corporelle de son être qui correspond actuellement à l'état de sa conscience clairement manifestée, ou à ce qu'on pourrait appeler la zone centrale de cette conscience, il n'en faut pas moins admettre que, simultanément, tous les autres rôles y sont également « agis » par lui, soit dans d'autres modalités, soit tout au moins dans différentes modifications secondaires de la même modalité, appartenant aussi à sa conscience individuelle, sinon dans son état actuel, restreint, de manifestation en tant que conscience, du moins dans l'une quelconque de ses possibilités de manifestation, lesquelles, dans leur ensemble, embrassent un champ indéfiniment plus étendu. Tous ces rôles apparaissent naturellement comme secondaires par rapport à celui qui est le principal pour l'individu, c'est-à-dire à celui où sa conscience actuelle est directement intéressée, et, puisque tous les éléments du rêve n'existent que par lui, on peut dire qu'ils ne sont réels qu'autant qu'ils participent à sa propre existence c'est-lui-même qui les réalise comme autant de modifications de lui-même, et sans cesser pour cela d'être lui-même indépendamment de ces modifications qui n'affectent en rien ce qui constitue l'essence propre de son individualité. De plus, si l'individu est conscient qu'il rêve, c'est-à-dire que tous les événements qui se déroulent dans cet état n'ont véritablement que la réalité qu'il leur donne lui-même, il n'en sera aucunement affecté alors même qu'il y sera acteur en même temps que spectateur, et précisément parce qu'il ne cessera pas d'être spectateur pour devenir acteur, la conception et la réalisation n'étant plus séparées pour sa conscience individuelle parvenue à un degré de développement suffisant pour embrasser synthétiquement toutes les modifications actuelles de l'individualité. S'il en est autrement, les mêmes modifications peuvent encore se réaliser, mais, la conscience ne reliant plus directement cette réalisation à la conception dont elle est un effet, l'individu est porté à attribuer aux événements une réalité extérieure à lui-même, et, dans la mesure où il la leur attribue effectivement, il est soumis à une illusion dont la cause est en lui, illusion qui consiste à séparer la multiplicité de ces événements de ce qui en est le principe immédiat, c'est-à-dire de sa propre unité individuelle .
C'est là un exemple très net d'une multiplicité existant dans une unité sans que celle-ci en soit affectée ; encore que l'unité dont il s'agit ne soit qu'une unité toute relative, celle d'un individu, elle n'en joue pas moins, par rapport à cette multiplicité, un rôle analogue à celui de l'unité véritable et primordiale par rapport à la manifestation universelle.
Nous quitterons maintenant le point de vue purement métaphysique auquel nous nous sommes placé, dans le chapitre précédent, pour envisager la question des rapports de l'unité et de la multiplicité, car nous pourrons peut-être mieux encore faire comprendre la nature de ces rapports par quelques considérations analogiques, données ici à titre d'exemple, ou plutôt d' « illustration » , si l'on peut ainsi parler, et qui montreront dans quel sens et dans quelle mesure on peut dire que l'existence de la multiplicité est illusoire au regard de l'unité, tout en ayant, bien entendu, autant de réalité qu'en comporte sa nature. Nous emprunterons ces considérations, d'un caractère plus particulier, à l'étude de l'état de rêve, qui est une des modalités de manifestation de l'être humain, correspondant à la partie subtile (c'est-à-dire non-corporelle) de son individualité, et dans lequel cet être produit un monde qui procède tout entier de lui-même, et dont les objets consistent exclusivement dans des conceptions mentales (par opposition aux perceptions sensorielles de l'état de veille), c'est-à-dire dans des combinaisons d'idées revêtues de formes subtiles, ces formes dépendant d'ailleurs substantiellement de la forme subtile de l'individu lui-même, dont les objets idéaux du rêve ne sont en somme qu'autant de modifications accidentelles et secondaires .
L'homme, dans l'état de rêve, se situe donc dans un monde qui est tout entier imaginé par lui, dont tous les éléments sont par conséquent tirés de lui-même, de sa propre individualité plus ou moins étendue (dans ses modalités extracorporelles), comme autant de « formes illusoires » (mâyâvirâpa) , et cela alors même qu'il n'en possède pas actuellement la conscience claire et distincte. Quel que soit le point de départ intérieur ou extérieur, pouvant être fort différent suivant les cas, qui donne au rêve une certaine direction, les événements qui s'y déroulent ne peuvent résulter que d'une combinaison d'éléments contenus, au moins potentiellement et comme susceptibles d'un certain genre de réalisation, dans la compréhension intégrale de l'individu ; et, si ces éléments, qui sont des modifications de l'individu, sont en multitude indéfinie, la variété de telles combinaisons possibles est également indéfinie. Le rêve, en effet, doit être regardé comme un mode de réalisation pour des possibilités qui, tout en appartenant au domaine de l'individualité humaine, ne sont pas susceptibles, pour une raison ou pour une autre, de se réaliser en mode corporel ; telles sont, par exemple, les formes d'êtres appartenant au même monde, mais autres que l'homme, formes que celui-ci possède virtuellement en lui-même en raison de la position centrale qu'il occupe dans ce monde . Ces formes ne peuvent évidemment être réalisées par l'être humain que dans l'état subtil, et le rêve est le moyen le plus ordinaire, on pourrait dire le plus normal, de tous ceux par lesquels il lui est possible de s'identifier à d'autres êtres, sans cesser aucunement pour cela d'être lui-même, ainsi que l'indique ce texte taoïste : « Jadis, raconte Tchoang-tseu, une nuit, je fus un papillon, voltigeant content de son sort ; puis je m'éveillai, étant Tchoang-tcheou. Qui suis-je, en réalité ? Un papillon qui rêve qu'il est Tchoang-tcheou, ou Tchoang-tcheou qui s'imagine qu'il fut papillon ? Dans mon cas, y a-t-il deux individus réels ? Y a-t-il eu transformation réelle d'un individu en un autre ? Ni l'un ni l'autre ; il y a eu deux modifications irréelles de l'être unique, de la norme universelle, dans laquelle tous les êtres dans tous leurs états sont un ».
Si l'individu qui rêve prend en même temps, dans le cours de ce rêve, une part active aux événements qui s'y déroulent par l'effet de sa faculté imaginative, c'est-à-dire s'il y joue un rôle déterminé dans la modalité extra-corporelle de son être qui correspond actuellement à l'état de sa conscience clairement manifestée, ou à ce qu'on pourrait appeler la zone centrale de cette conscience, il n'en faut pas moins admettre que, simultanément, tous les autres rôles y sont également « agis » par lui, soit dans d'autres modalités, soit tout au moins dans différentes modifications secondaires de la même modalité, appartenant aussi à sa conscience individuelle, sinon dans son état actuel, restreint, de manifestation en tant que conscience, du moins dans l'une quelconque de ses possibilités de manifestation, lesquelles, dans leur ensemble, embrassent un champ indéfiniment plus étendu. Tous ces rôles apparaissent naturellement comme secondaires par rapport à celui qui est le principal pour l'individu, c'est-à-dire à celui où sa conscience actuelle est directement intéressée, et, puisque tous les éléments du rêve n'existent que par lui, on peut dire qu'ils ne sont réels qu'autant qu'ils participent à sa propre existence c'est-lui-même qui les réalise comme autant de modifications de lui-même, et sans cesser pour cela d'être lui-même indépendamment de ces modifications qui n'affectent en rien ce qui constitue l'essence propre de son individualité. De plus, si l'individu est conscient qu'il rêve, c'est-à-dire que tous les événements qui se déroulent dans cet état n'ont véritablement que la réalité qu'il leur donne lui-même, il n'en sera aucunement affecté alors même qu'il y sera acteur en même temps que spectateur, et précisément parce qu'il ne cessera pas d'être spectateur pour devenir acteur, la conception et la réalisation n'étant plus séparées pour sa conscience individuelle parvenue à un degré de développement suffisant pour embrasser synthétiquement toutes les modifications actuelles de l'individualité. S'il en est autrement, les mêmes modifications peuvent encore se réaliser, mais, la conscience ne reliant plus directement cette réalisation à la conception dont elle est un effet, l'individu est porté à attribuer aux événements une réalité extérieure à lui-même, et, dans la mesure où il la leur attribue effectivement, il est soumis à une illusion dont la cause est en lui, illusion qui consiste à séparer la multiplicité de ces événements de ce qui en est le principe immédiat, c'est-à-dire de sa propre unité individuelle .
C'est là un exemple très net d'une multiplicité existant dans une unité sans que celle-ci en soit affectée ; encore que l'unité dont il s'agit ne soit qu'une unité toute relative, celle d'un individu, elle n'en joue pas moins, par rapport à cette multiplicité, un rôle analogue à celui de l'unité véritable et primordiale par rapport à la manifestation universelle.
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