mercredi 10 août 2016

Le FMI avoue avoir immolé la Grèce pour le compte de l‘Eurogroupe


Documentaire de Philippe Menut, La Tourmente grecque, Chronique d'un coup d'Etat (2016)

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Le FMI avoue avoir immolé la Grèce pour le compte de l‘Eurogroupe
Par Yanis Varoufakis, le 2 août 2016 - Paul Jorion


Cette semaine a débuté avec un débat au parlement grec, lancé par l’Opposition Officielle (le principal – mais pas le seul – supporter de la troïka à l’intérieur de la Grèce), avec pour objectif final de me faire inculper pour avoir osé contrer la troïka lorsque je fus ministre des finances durant les six premiers mois de 2015. La troïka, qui avait organisé une panique bancaire avant même que je prenne pied dans mon ministère, qui m‘avait menacé de fermeture des banques trois jours après que j‘aie assumé ma charge ministérielle, et qui avait mis en œuvre la fermeture de nos banques, avait à présent décidé de m’accuser d’avoir… fermé les banques et imposé le contrôle des capitaux. Comme tout bon harceleur, la troïka s’est montrée plus que prompte à blâmer ses victimes, et à bafouer et vilipender tout qui oserait résister à ses violences.

Ma réaction aux accusations de la troïka et à la menace d’être entraîné dans une enquête judiciaire fut simple : « Allez-y ! » « Je vous affronterai », les ai-je défiés, « dans l’arène que vous choisirez : dans un amphithéâtre, sur un plateau de télévision, même devant une cour de justice ! » Au final, ils se sont dégonflés, et la motion parlementaire a été rejetée lorsque quelques-uns d’entre eux (un petit parti qui est habituellement totalement inféodé à la troïka) ont fait le choix stratégique de voter contre elle.

Ensuite, pour parfaire la raclée essuyée par la troïka cette semaine, le rapport du Bureau d’Évaluation Indépendante du FMI (IEO en anglais) a été publié. C’est une évaluation brutale qui ne laisse aucune place au doute quant à la théorie économique triviale et à la diplomatie à la canonnière utilisée par la troïka. Ce rapport met en difficulté le FMI, la BCE et la Commission : soit ils restaurent un minimum de leur légitimité en admettant leurs erreurs et en se séparant de ceux qui portent le plus de responsabilité dans cette affaire, ou ils ne font rien, par la même décuplant le mécontentement des citoyens européens envers l’UE, accélérant ainsi la déconstruction de cette dernière.

Lorsque j’étais ministre, occupé à négocier avec ce genre d’individus, la presse pro-troïka (ou plutôt, la presse dépendant de la troïka) affirmait que j’étais indigne de conduire ces négociations parce que j’avais osé insinuer que, de 2010 à 2014, le FMI, la BCE et la Commission avaient soumis la Grèce à des simulations de noyade fiscale, provoquant une Grande Dépression inutile en raison de leur imposition violente de politiques macroéconomiques incompétentes. Les médias de l’establishment affirmaient que le ministre des finances d’une petite nation en faillite, soumise à des simulations de noyade fiscale par les fonctionnaires de la toute-puissante troïka, ne pouvait pas se permettre de dire, que ce soit en public ou même en privé, que l’on était en train de soumettre cette petite nation en faillite à des simulations de noyade fiscale.

Ma réponse fut que nous avions tenté le silence et l’obéissance de 2010 à 2014. Le résultat ? Une perte de 28 % du revenu national, et les raisins de la colère qui « …s’étoffaient et se faisaient de plus en plus lourd pour la récolte. » Il était donc temps de donner à la troïka des contre-propositions modérées, rationnelles, tout en refusant de continuer à hocher la tête devant leur tactique visant à « faire comme si. » Jamais on ne m’a pardonné d’avoir adopté cette position.
Un an après que la troïka ait réussi à me faire éjecter du gouvernement grec, en convaincant Alexis Tsipras à capituler devant eux contre les souhaits de 62 % des électeurs grecs, le « bureau des affaires internes » du FMI confirme maintenant que ma position était totalement justifiée, et non erronée ou peu diplomate. Dans son article du 29 juillet au sein du Daily Telegraph, Ambrose Evans-Pritcher a dit ceci à propos du rapport du Bureau d’Évaluation Indépendante du FMI :

Un sous-rapport sur la saga grecque révèle que le pays a été forcé de se soumettre à un resserrement écrasant, équivalent à 11 % du PIB sur les trois premières années. Ceci a déclenché une spirale négative auto-alimentée. Plus la situation se dégradait, plus la Grèce était forcée de sabrer – ce que l’ex-ministre des finances Yanis Varoufakis a appelé « simulation de noyade fiscale. » (Voir plus bas pour des citations pertinentes du texte d’Evans-Pritchard).

À présent, la question est : que va-t-il se passer ensuite ?

Quel intérêt y a-t-il à recevoir un mea culpa, si les politiques imposées au gouvernement grec sont les mêmes que celles pour lesquelles un mea culpa a été publié ?
Quel intérêt y a-t-il à avoir un mea culpa, si les officiels qui ont imposé des politiques aussi désastreuses et inhumaines restent en place et sont, en fait, promus en récompense de leur incompétence crasse ?

Pour résumer, il est urgent que des excuses soient adressées au peuple grec, pas seulement de la part du FMI, mais aussi de la part de la BCE et de la Commission, dont les officiels ont encouragé le FMI à procéder à la simulation de noyade fiscale de la Grèce. Mais des excuses et un mea culpa collectif de la part de la troïka seraient terriblement insuffisants. Cela doit être suivi du licenciement immédiat d’au moins trois fonctionnaires.

Le premier sur la liste est M. Poul Thomsen – le chef de la première mission du FMI en Grèce, dont l’échec retentissant (selon les propres rapport du FMI, jamais auparavant un chef de mission n’avait présidé à pire désastre macro-économique) a résulté en une promotion au poste de Responsable pour l’Europe au sein du FMI. Le second, fort proche du premier sur cette liste, est M. Thomas Wieser, le président de l’EuroWorkingGroup, qui a trempé dans toutes les politiques et tous les coups qui ont conduit à l’immolation de la Grèce et l’ignominie de l’Europe, qui sera, il faut l’espérer, rejoint dans sa retraite par M. Declan Costello, dont les empreintes se retrouvent partout au sein des instruments utilisés pour la simulation de noyade fiscale. Et, enfin, un gentleman que mes amis irlandais ne connaissent que trop bien : M. Klaus Masuch de la BCE.

Enfin, et c’est le plus important, ces excuses et ces licenciements ne serviront à rien s’ils ne sont pas suivi d’un revirement complet sur les politiques macro-économiques, fiscales et de réformes appliquées en Grèce et au-delà.

Est-ce que l’un au moins de ces éléments se produira ? Ou le rapport du Bureau d’Évaluation Indépendante du FMI ne fera-t-il qu’illuminer le ciel un instant, avant d’être vite oublié ? Les signes penchent pour la seconde voie. Dans ce cas, les chances de l’UE de regagner la confiance de ses citoyens, chances qui sont déjà trop minces, s’échapperont des mains de nos dirigeants comme du fin sable blanc.

Carpe DiEM!
Yanis Varoufakis

Citations supplémentaires du texte d’Evans-Pritchard
« Le rapport du Bureau d’Évaluation Indépendante du FMI (IEO en anglais) passe au-dessus de la tête de sa directrice, Christine Lagarde. Il ne répond qu’au conseil d’administration, et les administrateurs d’Asie et d’Amérique Latine sont clairement révoltés devant la manière avec laquelle des initiés de l’UE ont utilisé le Fonds pour sauver leur propre, riche union monétaire et leur système bancaire. »
« Si les actions du Fonds étaient compréhensibles au centre de la crise, la dure vérité est que le programme de sauvetage a sacrifié la Grèce au cours d’une « mise en attente » destinée à sauver l’euro et les banques de l’Europe du nord. La Grèce a enduré le traditionnel choc d’austérité amené par le FMI, sans les remèdes de compensation du FMI que sont la réduction de la dette et la dévaluation monétaire pour rétablir la viabilité du pays. »
« Les plus hauts fonctionnaires du FMI ont trompé leur propre conseil d’administration, commis une série d’erreurs de jugement calamiteuses en Grèce, sont devenus des défenseurs enthousiastes du projet de l’euro, ont ignoré les signaux avertissant du déclenchement imminent d’une crise et, collectivement, ils ont échoué à maîtriser un concept élémentaire de la théorie monétaire. »
« De nombreux documents ont été préparés en dehors des canaux officiels connus ; la documentation écrite sur certains sujets sensibles n’a pas pu être localisée. »

« Le rapport de l’IEO décrit une ‘culture de la complaisance’, encline a produire des analyses ‘superficielles et mécaniques’, et retrace un effondrement de gouvernance choquant au sein du FMI, dressant un tableau trouble dans lequel on ne sait pas qui, en dernier recours, dirige cette organisation extrêmement puissante. »


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Grèce : la responsabilité du FMI mise au jour, mais tout continue comme avant
 Par Romaric Godin, le 29/07/2016- La Tribune
 
Le FMI a commis de lourdes fautes sur la Grèce. Et alors ?

L'instance de surveillance indépendante du FMI a mis en cause la gestion de la crise grecque par cette institution. Des critiques qui détruisent la narration officielle, mais ne la change pas...

Un peu plus de six ans après le début de la crise grecque, la narration officielle, le « storytelling » qui a été élaboré par les gouvernements et les institutions qui ont géré cette crise, tombe chaque jour un peu plus en lambeaux. Alors que la malheureuse Grèce, soumise à un troisième mémorandum signé voici un an avec ses créanciers, n'en finit pas de s'effondrer économiquement, le FMI, membre de la troïka qui a supervisé la gestion de cette crise, n'en finit pas de procéder à des mea culpa tardifs, mais sans appels.

Absence de discussions internes

Après avoir reconnu qu'elle avait sous-estimé les « multiplicateurs budgétaires », autrement dit l'impact de la consolidation budgétaire sur la croissance, pour la Grèce, l'institution de Washington avait récemment, dans un article de recherche reconnu les effets négatifs des politiques d'austérité imposées à Athènes. Ce jeudi 28 juillet, un nouveau rapport est venu critiquer le rôle pris par le FMI dans sa gestion de la crise grecque. Et il est sévère. Le Bureau indépendant d'évaluation du FMI (IEO) a publié un long rapport sur le « FMI et les crises en Grèce, au Portugal et en Irlande » qui dresse un constat : le FMI a agi sous la pression des intérêts de certains pays de la zone euro, contre ses propres intérêts et a cherché pour cela à court-circuiter le conseil d'administration. Cette procédure a clairement conduit à des erreurs d'appréciations majeures de la situation, notamment en Grèce.

Dans son rapport, l'IEO confirme notamment ce que, entre autres, la Commission de Vérité sur la dette grecque, établie au printemps 2015 par le parlement hellénique, avait pointé du doigt : pour faire passer le soutien financier à la Grèce du FMI malgré le caractère insoutenable de la dette grecque, la direction de l'institution a fait adopter discrètement une modification des critères d'accès à l'aide du FMI. « Le conseil d'administration n'a pas été consulté sur cette question. En fait, les directeurs ne furent pas même informés des doutes des équipes sur la soutenabilité de la dette grecque », estime l'IEO. Et de poursuivre : « ni la direction du FMI, ni les équipes n'ont cherché à porter l'attention du Conseil sur la décision proposée de modifier les critères ou sur le fait qu'un critère d'accès exceptionnel serait modifié en approuvant le programme grec ». En clair : il y a eu clairement une volonté de tromper le Conseil, en incluant cette modification cruciale, qui plaçait le FMI dans la position de s'exposer à un pays insolvable. L'IEO renforce cette idée en précisant que le Conseil a été pressé par le temps, et n'a pas eu la possibilité de regarder le programme en détail.

Conséquences désastreuses

Les conséquences de cette pratique ont été désastreuses pour la Grèce. Ce pays s'est en effet retrouvé dans la situation de devoir gérer une dette insoutenable et croissante. L'issue de cette impasse était une autre impasse : demander toujours plus d'aides pour rembourser la dette. Créer donc un schéma de Ponzi, avec la complicité du FMI et des pays de la zone euro désireux de maintenir la fiction de la « soutenabilité » de la dette grecque. C'est ce montage qui a obligé la Grèce à aller toujours plus loin dans la politique d'austérité puisque ses créanciers continuaient à vouloir faire croire qu'une purge budgétaire et des « réformes structurelles » suffiraient à rendre la dette soutenable. Cette « tromperie » du FMI est donc une des sources des maux grecs. En passant, on remarquera que l'IEO estime que ceci pose un problème de « légitimité » pour le FMI. Une question de légitimité qui se pose aussi pour la dette du FMI alors contractée par la Grèce et qui, en 2015, a pesé si lourd dans le sort du pays.

Soumission à la zone euro

Si le FMI avait appliqué ses critères habituels, il aurait imposé une restructuration de la dette dès 2010. C'est la procédure habituelle du Fonds : faire de l'austérité contre une coupe dans la dette. Selon une étude parue en 2015 aux Etats-Unis, les équipes avaient proposé cette possibilité au directeur général d'alors du FMI, Dominique Strauss-Kahn. Ce dernier l'aurait cependant rejeté et aurait refusé de le proposer aux Européens. Et ceci pose un autre problème majeur posé par l'étude de l'IEO : les amours coupables entre le FMI et la zone euro. Car les causes de ce refus de la restructuration de la dette en 2010 sont connues : c'est la protection des banques européennes, principalement françaises et allemandes, exposées à la dette grecque. Il fallait rapidement venir à la rescousse de ces créanciers, pour leur donner le temps de vendre les titres à des investisseurs rassurés par l'implication du FMI.

Le rapport de l'IEO ne va pas jusqu'à cette conclusion, désormais cependant bien connue, mais il pointe les relations très étroites entre la direction du FMI et la zone euro. Il critique ainsi la « faiblesse de la surveillance de la zone euro » fondée sur l'idée que « l'Europe est une chose différente ». Cette faiblesse a conduit à l'absence d'analyse des déséquilibres de la zone euro, notamment sur les comptes courants. Elle a ensuite conduit à un « oubli » des « leçons des crises passées ». Ces leçons « ne furent jamais appliquées », estime l'IEO. De fait, le FMI est largement apparu comme suiviste des décisions de l'Eurogroupe puisque les décisions de la zone euro « ont toujours précédé les réunions du conseil du FMI ». « Le FMI a perdu sa souplesse et son agilité en tant que gestionnaire de crise compte tenu des multiples couches de décisions dans la zone euro », explique l'IEO qui déplore aussi le poids de l'Eurogroupe qui a conduit « les jugements des équipes techniques du FMI à des pressions politiques ». C'est donc bien une soumission du FMI à la zone euro qu'implicitement dénonce l'IEO. Du reste, le rapport souligne la très forte « asymétrie de l'information » au sein du FMI puisque « des directeurs représentant les pays de la zone euro ont pu avoir accès à des informations qui n'étaient pas à la disposition des autres ».

L'IEO ne cache donc pas la soumission du FMI aux instances de la zone euro. Ceci pose, pour l'institution, la question de la nationalité de ses directeurs généraux. Le fait que le FMI ait été dirigé par un Français et l'est encore apparaît clairement comme une entrave à son bon fonctionnement, mais aussi à l'efficacité de ses politiques. Il est sans doute temps de donner aux pays dits émergents leur chance au sein du Fonds.

Destruction de la narration officielle

En attendant, cette soumission à la zone euro a eu des conséquences majeures pour la Grèce : nul ne s'est opposé aux décisions prises par Paris et Berlin pour « sauver la zone euro » et nul n'a vraiment apporté un esprit critique sur ses plans d'aide. Cette soumission du FMI a permis le développement du storytelling officiel : la faute est grecque. La Grèce aurait fait des excès et elle serait « sauvée » et « aidée » par les Européens. Plus tard, lorsque l'échec de ces politiques était devenu évident, le problème a encore été porté sur les Grecs qui auraient refusé de « s'approprier les programmes ». Or, là aussi l'IEO souligne que l'aveuglement du FMI a été total et qu'il a bien été commis des erreurs de politiques économiques majeures, notamment, comme on l'a vu par l'oubli du passé. « Les programmes du FMI pour la Grèce et le Portugal ont inclus des projections de croissance largement trop optimistes », indique le rapport qui ajoute des « projections plus réalistes auraient rendu évidents les impacts sur la croissance et la dynamique de la dette de la consolidation budgétaire ». L'IEO indique que ceci aurait conduit à laisser « jouer les stabilisateurs automatiques », ce qui n'a pas été fait et a conduit à l'effondrement de 25 % du PIB grec sur 6 ans en plongeant l'économie hellénique dans un cercle vicieux. En refusant la réalité par sa soumission politique, le FMI a donc été une des causes de la crise grecque. C'est une destruction en règle de la narration officielle.

Le rapport de l'IEO confirme donc ce que la Commission sur la dette grecque de 2015 avait établi sur 2010 : un déni de réalité a dominé les décisions d'alors, alimenté par des intérêts politiques dans les grands pays de la zone euro. Ce déni de réalité est devenu une vision officielle qu'il a fallu maintenir à tout prix et a conduit à l'effondrement de la Grèce. Le FMI a contribué à cette situation. C'est ce que la crise du premier semestre 2015 a prouvé : le nouveau gouvernement grec a réclamé la fin de ce cercle vicieux et a demandé la construction d'un compromis qui lui a toujours été refusé. Les créanciers ont préféré une nouvelle fois briser l'économie grecque plutôt que de reconnaître les erreurs que l'IEO met en avant aujourd'hui.

La réponse de Christine Lagarde

La question reste désormais de savoir quel sera l'impact réel de ce rapport. L'IEO rappelle que dès 2011, elle avait mis en garde contre l'aveuglement vis-à-vis de la zone euro, sans succès. La réponse, vendredi 29 juillet, de l'actuelle directrice générale Christine Lagarde n'est guère encourageante de ce point de vue : elle a repris la critique de la Grèce, de son manque « d'appropriation » des programmes, de l'instabilité politique du pays et a finalement rappelé que la Grèce est restée dans la zone euro, ce qui était « un objectif majeur ». Bref, le mea culpa au sein des instances agissantes du FMI n'est pas à l'ordre du jour. Rappelons que, de 2010 à 2015, la Grèce n'a connu qu'un mois d'instabilité politique après les élections de mai 2012. Le reste du temps, la majorité parlementaire en faveur de la troïka a été stable et les gouvernements ont pu appliquer les programmes. Certes, tout n'a pas été appliqué, mais ne serait-ce pas le signe que tout n'était pas applicable ? Selon une étude de l'OCDE datée de 2015, la Grèce a été le pays le plus « réformateur » de l'organisation. Dire que la Grèce n'a rien fait n'a pas de sens : l'effondrement de l'économie et le redressement des finances publiques sont les preuves de cette action. La réalité est bien que c'est la politique menée qui était insensée. Le maintien dans la zone euro est, de ce point de vue, une consolation bien maigre et une façon d'éviter le cœur du problème, ce qui semble le plus urgent pour Christine Lagarde.

La logique actuelle continue de dominer

En réalité, rien n'a changé. La politique du troisième mémorandum et du troisième mémorandum « et demi » imposée à la Grèce en août 2015 et encore en juin 2016 viennent le confirmer. Aucune critique n'a été réalisée au sein de la zone euro sur les politiques menées. L'Eurogroupe continue de dominer le jeu et d'imposer sa logique de consolidation budgétaire et de réformes structurelles à une économie exsangue. Cet Eurogroupe refuse toute remise en cause de la narration officielle et continue à réclamer du gouvernement grec un « engagement » dans le programme. La mise en place de coupes automatiques dans les dépenses pour atteindre l'objectif d'excédent primaire de 2018 est le nec plus ultra de cette logique. Et la preuve que rien n'a réellement changé. Aujourd'hui, la narration officielle fait toujours porter la faute de l'échec des programmes est toujours reporté sur les Grecs et sur son gouvernement qui a osé refuser au premier semestre 2015 ces politiques imposées par les créanciers. Or, cette critique qui était fort modérée et davantage un appel au compromis, se révèle chaque jour désormais plus pertinente.


Quant au FMI, il affirme avoir changé : il demande désormais une restructuration de la dette avant d'entrer dans le programme. C'est une avancée importante. Mais le FMI a néanmoins accepté le plan de juin 2016 et le report de l'essentiel de la restructuration de la dette à après 2018. A l'été 2015, il a tout fait pour faire échouer le gouvernement grec et le conduire à accepter un troisième mémorandum. Et, on l'a vu, l'analyse de Christine Lagarde demeure très proche de celle de l'Eurogroupe. Au final, le rapport de l'IEO est un élément important pour écrire l'histoire. Mais certainement pas pour la changer.

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