Alain de Libera est un professeur de philosophie français né en 1948. Spécialiste de philosophie médiévale, il est, depuis 1985, directeur d'études à l'École pratique des hautes études, où il enseigne l'histoire des théologies chrétiennes dans l'Occident médiéval, et, de 1997 à 2008, professeur à l'Université de Genève. Depuis la rentrée 2008, il enseigne de nouveau à l'École pratique des hautes études.
Source du texte : wikipedia
Autre biographie : Unige
Publications (détail) : Université Genève (PDF)
Cours : Collège de France
Publications :
- La Philosophie médiévale, coll. Que sais-je ?, PUF, 1989.
- Albert le Grand et la philosophie, Vrin, 1990.
- Penser au Moyen Age, Éd. du Seuil, 1991; coll. « Points », 1996.
- Averroès et l'averroïsme, Que sais-je ?, PUF, 1991.
- La Philosophie médiévale, coll. Premier cycle, PUF, 1993.
- La Mystique rhénane. D'Albert le Grand à Maître Eckhart, Paris, Éd. du Seuil, coll. « Points », 1994.
- « Le don de l’Islam à l’Occident », in C. David et J.-Ph. de Tonnac, éd., L’Occident en quête de sens, Paris, Maisonneuve et Larose, 1996, p. 189-196.
- La Querelle des universaux, de Platon à la fin du Moyen Age, Seuil, 1996.
- Eckhart, Suso, Tauler, ou la Divinisation de l'homme, Paris, Bayard, 1996.
- Maître Eckhart et la Mystique rhénane, Paris, éditions du Cerf, 1999.
- L'Art des généralités. Théories de l'abstraction, Paris, Aubier, 1999.
Morgen Schtarbe (roman), Flammarion, 1999.
- « Pour Averroès ». Introduction à Averroès. L'Islam et la Raison, Paris, GF-Flammarion, 2000, p. 9-76.
- La Référence vide. Théories de la proposition, Paris, PUF, 2002.
- Raison et Foi. Archéologie d'une crise, d'Albert le Grand à Jean-Paul II, Paris, Éd. du Seuil, 2003.
- Thomas d'Aquin. L'Unité de l'intellect contre les averroïstes, Paris, Vrin, 2004.
- Métaphysique et noétique. Albert le Grand, Paris, Vrin, 2005.
- Archéologie du sujet. I. Naissance du sujet, Paris, Vrin, 2007.
- Archéologie du sujet. II. La Quête de l'identité, Paris, Vrin, 2008.
- Les Latins parlent aux Latins, in Ph. Büttgen, A. de Libera, M. Rashed & I. Rosier-Catach, éd., Les Grecs, les Arabes et nous: Enquête sur l'islamophobie savante, Paris, Fayard, 2009.
- L'invention du sujet moderne, Ed. Vrin, 2015
Traductions et présentations :
Porphyre, Isagoge ; textes grecs et latins, trad. par Alain de Libera et Alain Philippe Segonds. Paris, J. Vrin, 1998.
Averroès, L'Intelligence et la Pensée, GF-Flammarion, 1999.
Averroès, Discours décisif, trad. M. Geoffroy, introduction Alain de Libera, 1999.
Thomas d'Aquin, Contre Averroès, GF-Flammarion, 1999.
Maître Eckhart, Traités et sermons, GF-Flammarion, 1999.
En collaboration :
Avec Emile Zum Brunn : Maître Eckhart. Métaphysique du Verbe et théologie négative, éd. Beauchesne, 1997.
Avec Claude Gauvard et d'autres spécialistes : Dictionnaire du Moyen Âge, Paris, PUF, 1re édition, 2002.
Hommage à Alain de Libera :
Alexandrine Schniewind (dir.), Christophe Erismann (dir.), Compléments de substance. Études sur les proprietés accidentelles offertes à Alain de Libera, éd. Vrin, 2008.
Les Racines du ciel par Frédéric Lenoir, Leili Anvar.
La spiritualité au Moyen Âge avec Alain de Libera et Jean-René Valette 01.03.2015
Les Nouveaux chemins de la connaissance par Adèle Van Reeth
Actualité philosophique : Alain de Libera 24.04.2015L'Un ou la Trinité ?
Sur un aspect trop connu de la théologie eckhartienne.
(...)
Posons donc, pour aller à l'urgence, une première thèse. Il n'y a pas de doute dans l'esprit d'Eckhart sur la nature de son entreprise. Le maître de Thuringe ne se veut pas philosophe contre théologien. Les philosophes sont pour lui ce qu'ils sont pour Albert le Grand : les représentants d'une science qui, pour être païenne dans son origine, n'est pas la "science du dehors". (...) il n'y a pas un territoire du philosophe et un autre du théologien. D’où l'extraordinaire programme d’exégèse qui ouvre ledit Commentaire [Évangile selon Jean] (§2) : "expliquer par les raisons naturelles des philosophes les affirmations de la sainte foi chrétienne et de l'Ecriture dans les deux Testaments" et sa réciprocité (§3) : "montrer comment les vérités des principes, des conclusions et des propriétés des choses de la nature sont clairement indiquées dans ces mêmes mots de l'Ecriture sainte que l'on interprète au moyen de ces réalités naturelles". (...)
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Posons donc, pour aller à l'urgence, une première thèse. Il n'y a pas de doute dans l'esprit d'Eckhart sur la nature de son entreprise. Le maître de Thuringe ne se veut pas philosophe contre théologien. Les philosophes sont pour lui ce qu'ils sont pour Albert le Grand : les représentants d'une science qui, pour être païenne dans son origine, n'est pas la "science du dehors". (...) il n'y a pas un territoire du philosophe et un autre du théologien. D’où l'extraordinaire programme d’exégèse qui ouvre ledit Commentaire [Évangile selon Jean] (§2) : "expliquer par les raisons naturelles des philosophes les affirmations de la sainte foi chrétienne et de l'Ecriture dans les deux Testaments" et sa réciprocité (§3) : "montrer comment les vérités des principes, des conclusions et des propriétés des choses de la nature sont clairement indiquées dans ces mêmes mots de l'Ecriture sainte que l'on interprète au moyen de ces réalités naturelles". (...)
Soit donc la question directrice de notre intitulé présente sous forme d'alternative : l'Un ou la Trinité. Le thème n'est pas neuf, et, en un sens, il est trop connu. Ce que nous voulons reprendre ici n'a rien non plus d'original. On peut l'exprimer en disant que l'énigme de la théologie eckhartienne réside d'abord dans le fait qu'elle est une transposition allemande de la théologie de Denys.
(...)
"Il faut que l'esprit s'élève au-dessus de tout nombre, qu'il perce toute multiplicité, et alors Dieu perce également en lui. Et autant Dieu perce en moi, autant moi je perce en Lui. Dieu conduite cet esprit dans le Désert, dans l'unité de Lui-même, là où il est un Un pur jaillissant en Lui-même. Un tel epsirt est sans pourquoi; s'il devait encore avoir un pourquoi, l'unité aussi devrait avoir un pourquoi. Un tel esprit est dans l'unité et la liberté" (Sermon 29)
Si le Lieu de Dieu et de l'âme est le vide, la percée, durchbruch, ou traversée, ubervart, est-elle une expérience sans sujet ? C'est un détachement, un dépouillement, abegescheidenheit, où Dieu se dépouille de Lui-même en tant que Deus trinus, durant que l'homme se dépouille de lui-même en dépassant les puissances psychiques - mémoire, intelligence, amour - qui, selon Augustin, sont en l'âme l'image ou le vestige de la Trinité. Le Dieu qui vient à l'esprit détaché n'est pas Dieu, ce n'est pas même un Dieu-Un, c'est le Fond, autrement dit l'absence de toute forme, qui se fait Forme, forme informe ou plutôt sans formes :
"Si l'âme contemple Dieu en tant qu'il est Dieu, ou en tant qu'Il est Image ou en tant qu'il est trinitaire, il y a en elle un manque. Mais quand toutes les images de l'âme sont écartées et qu'elle contemple seulement l'unique Un, l'être nu de l'âme reposant passivement en lui-même rencontre l'être nu, sans forme, de l'unité divine, qui est l'être suressentiel. (Sermon 83)
(...)
L'Un ou la Trinité ? article paru dans la Revue des sciences religieuses 70 no1 (1996), p.31-47.
* * *
(...)
AL : Oui. Je pense que mon Archéologie du sujet est une table d’orientation sur les problématiques du sujet dans la longue durée philosophique. Rien de plus. Mais rien de moins.
AP : Il ne s’agit donc pas pour toi de proposer une nouvelle « théorie du sujet » comme Badiou ou d’autres ?
AL : Non, absolument pas. Mon travail est d’ordre archéologique : on n’attend pas d’un archéologue qu’il invente quoi que ce soit, mais seulement qu’il reconstitue un dispositif. Concernant la question du sujet, il s’agit pour moi de reconstituer les grandes étapes de l’émergence de cette notion et de donner les étapes clés des différentes figures du sujet et de la subjectivité. J’ajoute que je ne suis pas soumis à la linéarité chronologique et que je m’autorise de nombreux va-et-vient en circulant dans les concepts, les thèses et les arguments que je prends, comme je l’ai dit au début, comme fonctionnant en réseau. Là aussi, mon projet se démarque de « l’histoire de la philosophie » au sens classique du terme. On ne verra la cohérence d’ensemble de l’Archéologie du sujet qu’à la fin du quatrième (ou cinquième !) tome.
Entretien avec Alain de Libera autour de l'Archéologie du sujet par Henri de Monvallier
Source du texte (complet) : actu-philosophia
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"Il faut que l'esprit s'élève au-dessus de tout nombre, qu'il perce toute multiplicité, et alors Dieu perce également en lui. Et autant Dieu perce en moi, autant moi je perce en Lui. Dieu conduite cet esprit dans le Désert, dans l'unité de Lui-même, là où il est un Un pur jaillissant en Lui-même. Un tel epsirt est sans pourquoi; s'il devait encore avoir un pourquoi, l'unité aussi devrait avoir un pourquoi. Un tel esprit est dans l'unité et la liberté" (Sermon 29)
Si le Lieu de Dieu et de l'âme est le vide, la percée, durchbruch, ou traversée, ubervart, est-elle une expérience sans sujet ? C'est un détachement, un dépouillement, abegescheidenheit, où Dieu se dépouille de Lui-même en tant que Deus trinus, durant que l'homme se dépouille de lui-même en dépassant les puissances psychiques - mémoire, intelligence, amour - qui, selon Augustin, sont en l'âme l'image ou le vestige de la Trinité. Le Dieu qui vient à l'esprit détaché n'est pas Dieu, ce n'est pas même un Dieu-Un, c'est le Fond, autrement dit l'absence de toute forme, qui se fait Forme, forme informe ou plutôt sans formes :
"Si l'âme contemple Dieu en tant qu'il est Dieu, ou en tant qu'Il est Image ou en tant qu'il est trinitaire, il y a en elle un manque. Mais quand toutes les images de l'âme sont écartées et qu'elle contemple seulement l'unique Un, l'être nu de l'âme reposant passivement en lui-même rencontre l'être nu, sans forme, de l'unité divine, qui est l'être suressentiel. (Sermon 83)
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L'Un ou la Trinité ? article paru dans la Revue des sciences religieuses 70 no1 (1996), p.31-47.
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AL : Oui. Je pense que mon Archéologie du sujet est une table d’orientation sur les problématiques du sujet dans la longue durée philosophique. Rien de plus. Mais rien de moins.
AP : Il ne s’agit donc pas pour toi de proposer une nouvelle « théorie du sujet » comme Badiou ou d’autres ?
AL : Non, absolument pas. Mon travail est d’ordre archéologique : on n’attend pas d’un archéologue qu’il invente quoi que ce soit, mais seulement qu’il reconstitue un dispositif. Concernant la question du sujet, il s’agit pour moi de reconstituer les grandes étapes de l’émergence de cette notion et de donner les étapes clés des différentes figures du sujet et de la subjectivité. J’ajoute que je ne suis pas soumis à la linéarité chronologique et que je m’autorise de nombreux va-et-vient en circulant dans les concepts, les thèses et les arguments que je prends, comme je l’ai dit au début, comme fonctionnant en réseau. Là aussi, mon projet se démarque de « l’histoire de la philosophie » au sens classique du terme. On ne verra la cohérence d’ensemble de l’Archéologie du sujet qu’à la fin du quatrième (ou cinquième !) tome.
Entretien avec Alain de Libera autour de l'Archéologie du sujet par Henri de Monvallier
Source du texte (complet) : actu-philosophia
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